La vaccination antigrippale en prévention de la FA ?

Vincent Bargoin, avec Pam Harrison

Auteurs et déclarations

11 février 2016

Taipei, Taiwan – Selon des résultats taiwanais publiés dans Heart Rythm, une grippe serait un facteur de risque d’apparition de fibrillation atriale (FA) dans l’année qui suit. Inversement, la vaccination serait un facteur protecteur. Enfin, la survenue d’une grippe malgré une vaccination ramènerait le risque au niveau de celui d’une population contrôle, qui n’a été exposée ni à la grippe ni au vaccin [1].

Ces résultats sont ceux d’une étude observationnelle. Ils sont donc à prendre avec précaution.

 
Son bénéfice potentiel en santé publique pourrait être plus important qu’on ne l’a supposé jusqu’à présent – Les auteurs
 

Les résultats suggèrent que « l’infection par le virus influenza pourrait augmenter le risque de FA, et que ce risque pourrait être réduit par la vaccination », écrivent les auteurs. « La vaccination annuelle devrait donc être promue chez les patients à haut risque ».

« La vaccination antigrippale pourrait constituer un moyen simple, coût-efficace, pour prévenir la FA » surenchérissent les Drs Nishant Verma et Bradley Knight (Northwestern University, Chicago, Etats-Unis) dans un éditorial associé [2]. Ils notent par ailleurs que la vaccination est de toutes façons déjà recommandée dans les catégories de patients qui se trouvent être aussi à risque de FA, mais que « son bénéfice potentiel en santé publique pourrait être plus important qu’on ne l’a supposé jusqu’à présent. »

Un bémol, cependant. Interrogée par l’édition internationale de Medscape, le Dr Charlotte Warren-Gash (Imperial College, Londres, Royaume-Uni) souligne le caractère malgré tout très spéculatif des conclusions. D’abord parce que le caractère observationnel de l’étude ne permet pas d’exclure totalement les facteurs confondants. « Nous savons que les personnes vaccinées sont globalement en meilleure santé, et sont généralement à moindre risque de problèmes comme la FA », souligne-t-elle.

 
Le déclenchement d’un FA jusqu’à un an après la grippe n’est pas très plausible -- Dr Charlotte Warren-Gash
 

Ensuite parce qu’on manque d’un mécanisme pour relier la grippe et la FA. On songe naturellement à l’inflammation, sur laquelle insistent les auteurs, en notant que l’inflammation systémique accroit le tonus sympathique « qui joue un rôle important dans la pathogénèse de la FA ». Mais en ce cas, « la grippe déclencherait l’apparition d’une FA en quelques jours », estime pour sa part le Dr Warren-Gash. Et dans cette hypothèse, le lien entre les deux pathologies aurait vraisemblablement été fait depuis longtemps. Or, l’étude taiwanaise porte sur une période de un an après la grippe, et « le déclenchement d’un FA jusqu’à un an après la grippe n’est pas très plausible ».

Des précédents chez les coronariens
En 2013, une méta-analyse publiée dans le JAMA montrait que la vaccination contre la grippe est associée à une baisse des événements cardiovasculaires de 36% chez les patients à haut risque cardiovasculaire. Chez les patients présentant un antécédent de syndrome coronarien aigu, la vaccination était associée à une diminution de 55% du risque d'accidents cardiovasculaires majeurs [3].

Ces données confirmaient les résultats d’une étude cas-témoins publiée peu auparavant dans Heart, qui montraient un effet préventif du vaccin vis-à-vis de l’infarctus de myocarde de l’ordre de 45 % chez les 40-64 ans, et de 33 % chez les sujets plus âgés [4].

L’étude a été menée sur 11374 patients, chez lesquels une FA a été diagnostiquée entre 2000 et 2010. Ces patients ont été identifiés à partir des registres de l’assurance santé nationale taiwanaise, considérés comme exhaustifs. Chaque patients a été affecté de quatre sujets contrôles, appariés en âge et sexe, mais sans FA.

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