New-York, Etats-Unis – Le Journal of Clinical Endocrinology and Metabolism publie la série de résultats sur lesquels la FDA s’est appuyée pour renforcer la mise en garde vis-à-vis du risque fracturaire associé à la canagliflozine (Invokana®, Invokamet®, Johnson & Johnson / Janssen aux E-U) [1,2].
Ce risque était en fait déjà mentionné sur les RCP de cet antidiabétique, de la nouvelle famille des anti SGLT2 ou gliflozines. Mais en septembre dernier, sur la base d’une étude de surveillance post-marketing qu’elle avait exigée, et de neuf essais cliniques de la canagliflozine, l’agence américaine avait décidé d’une mise en garde spécifique concernant une baisse de la densité minérale osseuse des vertèbres lombaires et de la tête fémorale.
« Avant mise en route du traitement, les médecins sont invités à évaluer le risque fracturaire du patient et à l’informer sur le risque de fragilité osseuse afin d’éviter des situations à risque », recommande aujourd’hui la FDA.
Un effet classe ? S’agissant d’un éventuel effet classe, un petit sur-risque de fracture, en cas d’insuffisance rénale, est mentionné pour la dapagliflozine (Farxiga®, Xigduo®, AstraZeneca). Aucun effet osseux n’est en revanche mentionné dans les RCP de l’empagliflozine (Jardiance®, Glyxambi®, Synjardy®, Lilly / Boehringer Ingelheim). La question est néanmoins ouverte puisque deux mécanismes communs aux inhibiteurs de la SGLT2 pourraient agir négativement sur le métabolisme osseux : l’augmentation de la concentration sérique de phosphate, probablement par l'intermédiaire d’une augmentation de la réabsorption tubulaire de phosphate, et l’augmentation des concentrations d'hormone parathyroïdienne (PTH), laquelle peut conduire à long terme à majorer la résorption osseuse et à augmenter le risque de fracture [2]. |
L’étude post-marketing publiée dans le J. Clin. Endocrinol. Metab. a été menée par 90 centres répartis dans 17 pays, chez 716 diabétiques âgés de 55 à 80 ans. Ces patients ont été randomisés pour recevoir de la canagliflozine à 100 ou 300 g/j, ou un placebo. La durée totale de l’étude a été de 104 semaines.
Sur cette période, par rapport au placebo, la prise de canagliflozine à 100 et 300 mg/j a été associée à une baisse de la densité minérale osseuse (DMO) au niveau de la hanche de 0,9% et 1,2% respectivement. Cette baisse relative de DMO n’a pas été observée au niveau de la tête fémorale, des lombaires, ou encore, des poignets, indiquent les auteurs.
Après ajustement sur la DMO du groupe placebo, les experts de la FDA ont, eux, retenu une baisse de 0,1% au niveau de la tête fémorale avec les deux doses de canagliflozine et de 0,4% au niveau de l’extrémité distale de l’avant-bras avec la dose de 300 mg exclusivement (pas de différence avec la dose de 100 mg).
Evaluée par tomodensitométrie, la résistance osseuse apparait non affectée par le traitement. Seule la mesure à 52 semaines est toutefois disponible dans le J. Clin. Endocrinol. Metab.
Par ailleurs, à 52 semaines toujours, les auteurs rapportent une augmentation du peptide C-terminal du collagène-1β sérique, et de l’ostéocalcine, qui reflètent respectivement la résorption et la formation osseuse. Enfin, une réduction de l’estradiol est constatée chez les femmes.
Après, tout est affaire d’interprétation. Les auteurs soulignent que « les patients diabétiques de type 2 présentent un risque accru de fracture, qui augmente avec l’âge ». Ils indiquent également que l’augmentation du collagène-1β est corrélée à la perte de poids, et suggèrent que le remodelage osseux pourrait s’interpréter « au moins en partie » comme simple conséquence de cette perte de poids. Clairement, l’option retenue est la mise en cause a minima de la canagliflozine.
Citer cet article: Vincent Bargoin. Des précisions sur l’effet osseux de l’antidiabétique canagliflozine - Medscape - 9 févr 2016.
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