Servier et Sanofi dégraissent

Jean-Bernard Gervais

Auteurs et déclarations

5 février 2016

Paris, France – Coup sur coup, deux « big pharmas », Sanofi Aventis et les laboratoires Servier, viennent d’annoncer à quelques jours d’intervalle des licenciements concernant plusieurs centaines de salariés, principalement des visiteurs médicaux. Cause de ces dégraissages : le ralentissement de l’innovation et la crise de la visite médicale. Ce sont les laboratoires Servier qui ont été les premiers à annoncer la mauvaise nouvelle – par mail – à leurs 690 visiteurs médicaux.

Suppression de la quasi-totalité des forces de vente : grève chez Servier

 
Les visiteurs médicaux sont d’autant plus amers qu’ils ont servi de boucliers entre les médecins et le laboratoire, au plus fort du scandale du Médiator.
 

Un véritable électrochoc pour les salariés de cette entreprise, bousculée par le scandale du Médiator®. À tel point qu’ils décidaient, pour la première fois depuis la création du laboratoire, de l’organisation d’une grève, le 2 février. Une grève justifiée, selon le syndicat Unsa Chimie, qui appelait aussi à manifester devant le siège de l’entreprise Servier à Suresnes (92) [1]. Car ce sont 657 emplois de visiteurs médicaux qui sont menacés par ce plan social, sur un total de 690 postes. Une hécatombe. Selon un communique de Unsa Chimie, « la suppression injustifiée et incohérente de la quasi-totalité des forces de vente met en danger l’ensemble des emplois du groupe Servier Biogaran en France ». Les visiteurs médicaux sont d’autant plus amers, que selon les syndicats, ils ont servi de boucliers entre les médecins et le laboratoire, au plus fort du scandale du Médiator. Dernièrement, en octobre dernier, ils ont été chargés par le laboratoire, selon le communiqué de Unsa Chimie, de remettre à chacun des médecins une lettre dédouanant Servier des possibles effets de ses molécules [1]…

Redéploiement de Servier vers le marché hospitalier et l’oncologie

Face à cette mobilisation historique – 200 personnes ont fait le pied de grue ce 2 février devant le siège de Servier – la direction s’est fendue d’un communiqué, arguant qu’elle « comprend parfaitement l’émotion et les questionnements que peuvent susciter le projet de réorganisation des activités de la filiale de promotion en France, présenté le 26 novembre 2015 ». Et de justifier ces suppressions d’emplois, en pointant du doigt les pertes de brevet, la progression rapide des génériques, les déremboursements, les baisses de prix imposées, les retards dans l’obtention d’AMM…

La direction envisage également une nouvelle organisation, « davantage adaptée à l’évolution du portefeuille de produits et aux besoins et attentes du marché ». Servier envisage en effet de redéployer une partie de ses visiteurs médicaux vers le marché hospitalier et l’oncologie. Un marché trop petit, pour recaser la totalité des postes possiblement supprimés. Un comble, selon Unsa Chimie, qui rappelle que le « groupe Servier Biogaran dispose d’une trésorerie de 2 milliards d’euros et affiche des résultats toujours très positifs malgré l’affaire du Médiator® : un chiffre d’affaire encore en progression à 3,9 milliards d’euros, avec un objectif de 5 milliards d’euros dans trois ans ».

600 emplois supprimés chez Sanofi

Ce même 2 février, Sanofi Aventis convoquait pour sa part l’ensemble des comités d’entreprise du groupe pour une réunion extraordinaire. À l’ordre du jour : « Des licenciements économiques sans oublier les annonces du projet de cession de la société Merial et de l’activité générique Zentiva », selon les dires de la CGT. Plus prosaïquement, la direction de Sanofi avançait qu’elle avait présenté « un projet d’évolution de son organisation qui constitue une étape importante dans la mise en œuvre de son plan stratégique annoncé le 6 novembre 2015 ».

Ce plan, de portée mondiale, vise la réorganisation de la société en cinq entités.

Les 5 futures entités de Sanofi

Médecine générale

Marchés émergents

Médecine de spécialité (Sanofi Genzyme),

Diabète et cardiovasculaire

Vaccins (Sanofi Pasteur)

À ce titre, la mise en place de ce plan se traduirait en France par la suppression de 600 postes sur les trois prochaines années. Pas de licenciement secs, prévient la direction, uniquement des congés de fin de carrière (pré-retraites). « Ce projet ne prévoit pas de fermeture d’usine et n’aura pas d’impact sur les effectifs de la R&D », ajoute le groupe.

Par la même occasion, la direction confirmait la vente de Merial à Boehringer Ingelheim, sans pour autant s’étendre sur le sort réservé à l’activité générique Zentiva. La production pharmaceutique SWI (Sanofi Winthrop Industrie) de Sanofi serait la plus touchée puisqu’il serait question d’y supprimer 400 emplois. 200 postes de visiteurs médicaux devraient également être supprimés, selon la CGT.

Plan social pour préserver « la compétitivité de Sanofi »

Cette annonce de suppression d’emplois suit celle de 2013. Il était alors question de supprimer 900 emplois. Malgré les manifestations, la direction avait maintenu son plan, qui a cependant été retoqué, en 2014, pour des questions de forme, par la justice. Contacté par Medscape, édition française, Marc Heimlich, coordonnateur adjoint de la CGT Sanofi, déplore un plan de départs volontaire, à seule fin de préserver « la compétitivité de Sanofi », et d’économiser 7 milliards d’euros. La branche recherche et développement devrait être réorganisée : « Nous avions obtenu la création de 500 postes en R&D, il y a fort à parier que ces postes ne seront jamais créés », ajoute Marc Heimlich. La consultation des institutions représentatives du personnel pourrait durer deux mois, à l’issue de laquelle le plan serait mis en branle.

 

REFERENCE :

  1. Unsa Chimie. 18 mois après la disparition de Jacques SERVIER, la liquidation de la Maison a commencé©. Communiqué du 27/01/16.

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