Zurich, Suisse – Alors que la pression positive continue (PPC ou CPAP) reste indiquée en première intention dans le traitement du syndrome d’apnée du sommeil, les orthèses d’avancée mandibulaire font, étude après étude, la preuve de leur efficacité. Des chercheurs suisses viennent de montrer dans une méta-analyse en réseau regroupant 51 études que les appareils dentaires font aussi bien que le masque pour baisser la pression artérielle – dont l’élévation, notamment nocturne, est la conséquence des hypoxémies et des micro-éveils répétés [1].
CPAP versus orthèse mandibulaire
La suppression des apnées nocturnes par la ventilation en CPAP entraîne souvent une diminution de la pression artérielle de l’ordre de 2 mm Hg. Les résultats étaient jusqu’à présent beaucoup moins clairs avec les orthèses d’avancée mandibulaire (OAM), qui ont l’avantage d’être mieux supportées que le masque. La seule méta-analyse disponible ne reprenait que 2 essais randomisés et ses résultats ne permettaient pas de conclure.
Dans cette étude, publiée dans le JAMA, les auteurs ont colligé dans une méta-analyse en réseau 51 études, soit 4888 patients de plus de 18 ans diagnostiqués pour un syndrome d’apnées obstructives du sommeil (index d’apnée/hypoapnée > 5/h) traités par CPAP, par OAM ou traitement inactif (CPAP fantôme, OAM placebo, traitement conservateur non actif). Sur ces 51 études, 44 comparaient la CPAP à un contrôle inactif (4289 patients), 3 comparaient la CPAP aux OAM (126 patients) et 3 comparaient la CPAP et les OAM à un contrôle inactif (244 patients).
3 degrés de gravité Entre 5 et 15 apnées/hypopnées par heure : syndrome léger |
La pression artérielle systolique (PAS) était un des critères majeurs de toutes ces études et seule l’une d’entre elles ne rapportait pas la pression artérielle diastolique (PAD).
Le traitement du SAOS en France La pression positive continue (PPC) est le dispositif de référence pour le traitement des apnées obstructives du sommeil. Il s’agit d’un dispositif de ventilation nasale qui permet aux voies aériennes de rester dégagées pendant le sommeil. La mise à disposition de ce dispositif est réalisée par un prestataire de service au domicile du patient. Près de 530 000 patients ont bénéficié d’une CPAP en 2013 en France [2]. Traitement alternatif, l’orthèse d’avancée mandibulaire (OAM) est un dispositif dentaire réalisé sur mesure. Il permet de maintenir la mâchoire inférieure en position avancée pendant le sommeil, libérant ainsi le passage de l’air au niveau du pharynx. La prescription de cette orthèse suppose la collaboration entre un spécialiste du sommeil (diagnostic, traitement, suivi) et un praticien ayant des connaissances à la fois sur le sommeil et sur l'appareil manducateur (examen dentaire, prise d'empreintes, ajustements et réglages) [2]. Seules les marques reconnues par la HAS peuvent prétendre à un remboursement partiel sous condition [3]. |
Ré-équilibrage en faveur de l'OAM
Comparée à un contrôle inactif, la CPAP est associée à une réduction de 2,5 mmHg PAS (P<0,001) et à une baisse de 2,0 mmHg PAD (P<0,001).
Comparée à un contrôle inactif, l’OAM est associée à une réduction de 2,1 mmHg PAS (P=0,002) et à une baisse de 1,9 mmHg PAD (P=0,008).
Il n’y avait donc aucune différence significative entre la CCP et l’OAM en ce qui concerne l’effet sur la PA (–0,5 mmHg, P=0,55) ou la PAD (–0,2 mmHg, P=0,008).
Au-delà du résultat majeur de cette méta-analyse - l’absence de différence significative entre les 2 types de dispositifs -, les auteurs ont pu établir que la CPAP présente néanmoins une probabilité plus forte d’être associée à une réduction de la PAS (72% versus 28%, respectivement). Par ailleurs, l’effet de la CPAP sur la PAS est d’autant plus important que les patients font une grande utilisation de leur masque : ainsi, une heure d’utilisation supplémentaire de la CPAP par nuit était associée à une baisse de 1,5 mmHg PAS et à une réduction additionnelle de 0,9 mmHg PAD.
Ces résultats apportent de l’eau au moulin de l’OAM, traitement alternatif à la CPAP en cas de SAOS sévère, mais déjà recommandée par la HAS en première intention dans les SAOS légers ou modérés, sans comorbidité cardiovasculaire grave [2].
Pour le Dr Malcolm Kohler (Hôpital universitaire de Zurich, Suisse), auteur de l’étude, ces résultats sont susceptibles de rééquilibrer l’utilisation des dispositifs médicaux en faveur de l’OAM dans le SOAS, dont le marché est encore très largement dominé par la CCP (environ 95% CPP vs 3% OAM).
« Mon message serait que la CPAP est la meilleure option chez un patient très compliant. Mais quand ce dernier a beaucoup de difficulté à s’adapter à la CPAP (encombrante, bruyante), les OAM constituent une alternative intéressante » a-t-il commenté pour l’édition internationale de Medscape.
REFERENCES :
Bratton DJ, Gaisl T, Wons AM, Kohler M. MDCPAP vs Mandibular Advancement Devices and Blood Pressure in Patients With Obstructive Sleep Apnea. JAMA. 2015;314(21):2280-2293. doi:10.1001/jama.2015.16303
HAS. Apnées du sommeil : de nouvelles recommandations de prise en charge des patients, 10 septembre 2014.
HAS. Évaluation clinique et économique des dispositifs médicaux et prestations associées pour la prise en charge du syndrome d’apnées hypopnées obstructives du sommeil (SAHOS). 2015.
Citer cet article: Stéphanie Lavaud. Apnées du sommeil : les orthèses d’avancée mandibulaire gagnent du terrain - Medscape - 11 déc 2015.
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