Etats-Unis – Chez les jeunes filles,les premiers cycles suivant la ménarche se manifestent fréquemment par des irrégularités. Difficile de savoir si ces anomalies sont liées à l’immaturité physiologique de l’axe gonadotrope ou si elles sont les prémices d’une pathologie sous-jacente qui ne se révèlera qu’à l’âge adulte. Et ce d’autant que le sujet est souvent plus ou moins négligé de part et d’autre, par les jeunes patientes comme par les médecins, par manque de connaissance sur le cycle menstruel des adolescents, ou pour des raisons culturelles et sociologiques, qui font des menstruations un sujet (qui reste) tabou.
Comme ils le font déjà depuis plusieurs années, les médecins du Collège américain des obstétriciens et des gynécologues (ACOG) viennent de renouveler une fois de plus leur souhait de voir les professionnels de santé inclure une évaluation du cycle menstruel dans toute consultation de l’adolescente en partant du principe que les règles peuvent apparaître comme un signe extérieur de bon fonctionnement sur le plan de la santé reproductive et de la santé en général.
Sujet tabou
La perception d’un cycle normal ou pathologique varie d’une femme à une autre et dépend de multiples facteurs (vécu personnel, familial et socioculturel). C’est d’autant plus vrai chez l’adolescente qui, en pleine période de maturation de l’axe gonadotrope, connait fréquemment des cycles irréguliers (fréquence, durée) ou des saignements plus ou moins abondants. Il devient alors ardu pour les jeunes filles, comme pour leurs parents (ou tuteurs) de savoir ce qui relève de la normalité ou non. Et pour peu qu’ils soient réticents à aborder le sujet, les adolescentes et leur entourage ne vont pas évoquer d’eux-mêmes le problème avec les professionnels de santé (médecins généralistes, gynécologues, infirmières scolaires…).
« Pourtant des cycles irréguliers, des saignements anormaux peuvent masquer un problème médical avec des conséquences à long terme » signale le communiqué de l’ACOG. Par ailleurs, pour les professionnels de santé, aborder la question des menstruations avec les jeunes filles est une façon de diminuer l’anxiété liée à leur survenue (et ce d’autant que la famille n’aura pas donné d’explications à ce sujet). Pour toutes ces raisons, les médecins du Collège américain des obstétriciens et des gynécologues souhaitent voir inclure une évaluation du cycle menstruel dans toute consultation de l’adolescente.
« Au même titre que l’on vérifie d’autres signes vitaux comme la pression artérielle, le rythme cardiaque, la fréquence respiratoire, s’informer du cycle menstruel de la jeune fille et identifier des troubles du cycle peut permettre d’anticiper des problèmes de santé révélés parfois seulement à l’âge adulte, ou mettre en évidence une maladie systémique » affirment-ils.
Ce qui est normal
Comment évaluer le cycle ? Les différentes caractéristiques du cycle menstruel normal sont énumérées dans l’encadré ci-dessous. Malgré des variations au niveau mondial et au sein même des Etats-Unis, l’âge moyen des premières règles est resté relativement stable – entre 12 et 13 ans – chez les populations des pays développés au cours des 30 dernières années. Les chiffres européens sont équivalents. La ménarche survient dans les 2/3 ans qui suivent le bourgeonnement des seins. A 15 ans, 98% des jeunes femmes sont réglées.
« Une évaluation pour aménorrhée primaire devrait conduite chez toute adolescente qui n’aurait pas ses menstruations à 15 ans ou dans les 3 ans qui suivent le développement de la poitrine – dont l’absence à 13 ans doit interroger » précise l’ACOG.
La longueur des cycles menstruels est souvent irrégulière pendant l’adolescence, notamment l’intervalle de temps entre le tout premier cycle et les suivants. En raison de l’immaturité de l’axe gonadotrope pendant les premières années et de cycles non ovulatoires, les cycles peuvent être plus longs que la moyenne ; néanmoins dans 90% des cas, ils durent entre 21 et 45 jours, même si certains peuvent être inférieurs à 20 jours et d’autres supérieurs à 45 jours. Au bout de la troisième année de menstruation, 60-80% des cycles menstruels durent 21 à 34 jours comme ceux des adultes. La durée du saignement se situe, lui, chez la plupart des jeunes filles, pendant 2 à 7 jours au cours des premières menstruations.
Cycles menstruels normaux chez les adolescentes en chiffres Age des premières règles : 12,43 ansDurée moyenne du cycle (première année) : 32,2 jours Durée moyenne du cycle : entre 21 et 45 jours Durée du flux : 7 jours (ou moins) Protections : 3 à 6 serviettes hygiéniques (ou tampons) par jour |
Ce qui n’est normal
Caractérisés par un timing non prédictif et une abondance variable du flux, les troubles du cycle de l’adolescente agissent comme des révélateurs – lorsqu’ils ne sont pas attribuables aux seuls cycles anovulatoires. En effet, bon nombre de pathologies (voir encadré) peuvent être à l’origine d’un saignement utérin anormal allant de l’aménorrhée – qui doit interroger quand elle est supérieur à 3 mois - à l’hyperménorrhée (définie par une perte d’environ par 80 mL par cycle ou la nécessité de changer de protections hygiéniques toutes les 1 à 2 heures, en particulier si > 7 jours). De même, une aménorrhée de plus de 3 mois (90 jours) doit interroger.
Citer cet article: Stéphanie Lavaud. Cycle menstruel de l’adolescente : ce qui est normal et ce qui ne l’est pas - Medscape - 2 déc 2015.
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