Cancer de la prostate : l’IRM, élément-clé de la surveillance active

Stéphanie Lavaud

Auteurs et déclarations

27 novembre 2015

Dr Raphaëlle Renard Penna

Paris, France -- A l’occasion du 109ème congrès français d’urologie, le Dr Raphaëlle Renard Penna, radiologue (Pitié-Salpêtrière, Paris), a exposé la place fondamentale de l’imagerie par résonnance magnétique (IRM) dans la surveillance active (SA) du cancer de la prostate [1].

La surveillance active concerne 15% des cancers de la prostate

Le dépistage du cancer de prostate a considérablement augmenté le diagnostic des cancers à faible risque, entrainant une sur-détection de lésions potentiellement non significatives. « Beaucoup de patients vont mourir avec leur cancer de prostate plutôt que de leur cancer de prostate » a rappelé le Dr Raphaëlle Renard Penna. En effet, ce cancer existe sous plusieurs formes, certaines peu évolutives, indolentes alors que d’autres sont, à l’inverse, très agressives, avec un risque d’évolution péjoratif. Pour les patients atteints d’un cancer de bon pronostic, il est raisonnable d’éviter les sur-traitements, d’où le concept de «surveillance active» (voir encadré). Cette option de traitement s’est beaucoup développée au cours des dernières années, elle concernerait environ 15% de l’ensemble des patients avec un diagnostic de cancer de la prostate, soit 30 à 40% de cancers classés à faible risque, a considéré le Pr Michel Soulié, urologue (Hôpital Rangueil, Toulouse).

Surveillance active, une option de traitement

 

La surveillance active s’est affirmée dernièrement comme une nouvelle stratégie thérapeutique pour permettre de différer ou d’éviter un traitement radical pour les tumeurs à faible risque de progression. Pourquoi ?

Primo, une meilleure compréhension de l’évolution naturelle de l’adénocarcinome prostatique permet aujourd’hui de stratifier le risque lié à la maladie et de prédire, dans une certaine mesure, l’agressivité et l’évolutivité de la tumeur au moment du diagnostic.

Secundo, si les progrès de ces traitements à visée curative actuellement reconnus, que sont la prostatectomie radicale et la radiothérapie externe, ont permis d’améliorer les résultats fonctionnels et oncologiques, leur impact négatif sur les fonctions mictionnelle et sexuelle ne peut être négligé.

Le but de la surveillance active (SA) est donc de différer un traitement immédiat du cancer de la prostate, et de suivre attentivement l’évolution naturelle de la maladie pour ne la traiter qu’en cas de progression.L’objectif de la SA est bien curatif, et non attentiste ou palliatif. Le choix de la SA comme traitement, établi avec l’accord du patient, implique un suivi régulier – clinique et biologique mais aussi désormais morphologique et fonctionnel via l’IRM. Si au décours du suivi, une évolution de forme, de volume et/ou d’agressivité tumorale est observée, le patient est orienté vers un traitement médical ou chirurgical.

 

Les biopsies ont des limites

La surveillance active (SA) nécessite une sélection et une surveillance rigoureuse des patients. Les patients candidats doivent être demandeurs et avoir une tumeur cliniquement localisée et à faible risque de progression. Les critères actuels sont basés essentiellement sur des données cliniques (âge des patients, toucher rectal), biologiques (taux de PSA) et sur les données des biopsies prostatiques.

 
Beaucoup de patients vont mourir avec leur cancer de prostate plutôt que de leur cancer de prostate – Dr Raphaëlle Renard Penna
 

Ces dernières consistent en 12 prélèvements à des endroits différents de la prostate et permettent d’évaluer à la fois l’agressivité des cellules tumorales et le volume de la (ou les) tumeur(s) et de calculer le score de Gleason. « Les biopsies sont un outil remarquable mais elles ont leurs limites » pondère la radiologue. La principale étant leur réalisation « un peu à l’aveugle ». Même bien réalisés, les prélèvements peuvent très bien passer à côté d’une lésion et sous-estimer le volume de la tumeur et son agressivité. Sur le plan du suivi, la réalisation annuelle de biopsies est un examen douloureux, invasif, traumatisant pour les tissus et qui comporte des risques de complications (1 à 2% d’infections).

« Cartographie » du cancer à l’intérieur de la prostate

D’où l’intérêt de l’IRM, technique qui s'est largement répandue depuis les années 2000. « Sa performance est excellente depuis 2010 avec une valeur prédictive négative > 90% » s’enthousiasme le Dr Renard Penna. L’IRM peut non seulement avoir une valeur anatomique permettant de déterminer la localisation précise de la tumeur et sa taille (séquences morphologiques T2), mais aussi être fonctionnelle (séquences fonctionnelles de perfusion et de diffusion) et évaluer certaines caractéristiques des cellules tumorales, prédictives du risque de dissémination.

« En autorisant la détection, la localisation, le volume, le fonctionnement et l’agressivité tumorale, l’IRM établit une sorte de « cartographie » du cancer à l’intérieur de la prostate, explique la radiologue. Néanmoins, si en matière de diagnostic, seule l’IRM apporte des informations précieuses, elle ne remplace pas le toucher rectal et le PSA ».

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