Après syndrome coronarien aigu, place à la psychocardiologie

Vincent Bargoin

Auteurs et déclarations

1er décembre 2015

Paris, France – La prise en charge de l’impact psychologique d’un syndrome coronarien aigu (SCA) fait partie de la prévention secondaire. Cet aspect est d’ailleurs souligné par les recommandations européennes, tandis que l’American Heart Association reconnait la dépression comme facteur de risque après SCA.

Lors du 21ème congrès du Collège National des Cardiologues des Hôpitaux, le Dr Jean-Pierre Houppe (Thionville) a rappelé les grandes lignes de cette prise en charge [1].

« Depuis l’étude INTERHEART [2004], on sait que des facteurs psychosociaux interviennent dans le pronostic. C’est même aujourd’hui en cardiologie qu’on a le plus de preuve de l’impact de ces facteurs », a-t-il indiqué. « Dans quelques années, dans tous les services [de cardiologie], il y aura des soins de psychocardiologie ». Du moins dans un monde idéal.

 
Sans surprise, les patients sont psychologiquement sous le choc
 

Après SCA, une dépression est présente chez 20% des patients, l’anxiété chez 30%, tandis qu’un syndrome de stress post traumatique peut être caractérisé dans 30% des cas également.

Il est évident que l’accident « perturbe gravement les buts de vie », selon l’expression du Dr Houppe. Et grosso modo, lorsque des symptômes psychologiques persistent à un niveau diagnostiquable, la mortalité est multipliée par un facteur 2 dans l’année.

Elément contributif de cette augmentation : une augmentation du taux de suicide par un facteur 4 dans le premier mois – moins élevée il est vrai qu’après annonce d’un diagnostic de cancer (x13 après annonce d’un cancer de la prostate).

On note également que la prise en charge du patient est une chose. Mais qu’il peut y avoir une famille à considérer : « le taux de suicide après SCA augmente aussi chez les conjoints », remarque le Dr Houppe.

Un déni fréquent de la situation

Après évaluation, et orientation vers un centre de réadaptation, la difficulté est souvent de faire admettre la situation au patient. « Les patients qui bénéficieraient le plus de cette prise en charge sont aussi ceux qui refusent le plus », avertit le Dr Houppe.

« Il est bien certain que la vie après un SCA ne va pas recommencer comme avant. Mais il y a un deuil à faire ».

Or, le déni semble fréquent. Intervenant ultérieurement, dans un exposé portant sur l’activité physique post-SCA, le Dr Michel Ross (Abreschviller, France) a confirmé ce point : « le plus difficile, c’est de faire comprendre à un coronarien qu’il est porteur d’une maladie chronique ».

On ne dispose d’aucun chiffre sur la prévalence de cette attitude. Ce qu’on sait, c’est qu’elle est volontiers masculine, et qu’elle est difficile à prendre en charge. « Plus on oppose des arguments rationnels, plus le déni se renforce », résume le Dr Houppe.

L’activité physique, « drogue miracle »

Le plus difficile, c’est de faire comprendre à un coronarien qu’il est porteur d’une maladie chronique -- Dr Michel Ross

Sur le plan thérapeutique, les médicaments sont d’une utilité limitée. « Les antidépresseurs améliorent le profil psychologique, mais ne modifient pas l’inflammation associée à la dépression, et ne réduisent donc pas le risque de récidive ».

Quant aux anxiolytiques, le Dr Houppe a signalé une étude taiwanaise portant sur les benzodiazépines – unique en son genre, semble-t-il. Cette étude ne rapporte toutefois des améliorations qu’après … 5 ans de traitement par benzodiazépine.

Le traitement privilégié par le Dr Houppe reste donc l’activité physique, véritable « drogue miracle », dont l’effet est « majeur », et qui « ne traite pas que le psychisme ».

A quoi peuvent s’ajouter l’hypnose, la méditation, la sophrologie, l’EMDR, etc, en fonction du choix du patient.

« L’efficacité de ces études n’est pas complètement prouvée dans les études considérées individuellement », note le Dr Houppe. « Mais elle l’est dans les méta-analyses ».

 

Le Dr Houppe a déclaré n’avoir aucun conflit d’intérêt en rapport avec le sujet.

 


REFERENCE :

  1. See comment in PubMed Commons belowHouppe J-P. Prise en charge psychologique post SCA. Session : Vivre sa vie après SCA. 21ème congrès du CNCH. Paris, 20 novembre 2015.

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