Refus de vaccination : quelles conséquences pour vous et pour les parents ?

Aude Lecrubier

Auteurs et déclarations

8 janvier 2016

Auxerre, France -- ACTUALISATION Vous avez en consultation un enfant que les parents refusent de vacciner ? Serez-vous responsable en cas de maladie théoriquement couverte par les vaccinations obligatoires?
Hier, un couple a été condamné à 2 mois de prison avec sursis pour avoir refusé de faire vacciner leurs deux enfants contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite (DTP).

Initialement poursuivis pour « soustraction par un parent à ses obligations légales compromettant la santé (…) de son enfant », un délit puni jusqu’à deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende, les faits avaient été requalifiés en « refus de se soumettre à l’obligation vaccinale ». Une infraction relevant du code de la santé publique, qui prévoit une peine maximum de six mois d’emprisonnement et 3 750 euros d’amende.

Aujourd’hui du côté du médecin, constituent une faute : une prescription fautive du vaccin, un manquement à une obligation technique, une maladresse ou une négligence.

Mais, concernant le refus de vaccination, la législation ne donne pas de réponse établie: le médecin peut respecter le libre choix des parents ou s’opposer au refus de soins émis par les adultes ayant l’autorité parentale en vertu de l’article L.1111-4, 6è alinéa du Code de Santé publique.

En pratique, établir et faire signer un certificat de refus indiquant que le médecin a donné une information éclairée sur la vaccination, inscrire ce refus dans le carnet de santé, et garder un double dans le dossier médical semblent des mesures de bon sens.

 

Aurora, Etats-Unis/ 16 novembre 2015 — Aujourd’hui, les médecins rencontrent de plus en plus de parents qui s’opposent à la vaccination de leur enfant. Or, selon une étude publiée dans la revue Pediatrics, près de 20% des pédiatres américains refusent souvent, voire systématiquement, de revoir ces familles en consultation [1]. Une attitude controversée, contraire aux recommandations de l’American Academy of Pediatrics (AAP) et des Centers for Disease Control (CDC).

Peut-on s’attendre au même type de comportement en France ? Medscape France a interrogé le Dr Jean Stagnara (pédiatre libéral à Lyon et Vice-Président de la Société Française de Pédiatrie) et le Pr Christophe Delacourt (Service de Pneumologie pédiatrique, Hôpital Necker-Enfants Malade, Paris ; Secrétaire général de la SFP).

Les pédiatres américains baissent les bras

L’enquête du Dr Sean O'Leary et coll. (Service de pédiatrie, Université du Colorado Anschutz, Aurora, Etats-Unis) a été menée par internet auprès d’un échantillon représentatif de pédiatres et de médecins de famille exerçant aux Etats-Unis entre juin et octobre 2012.

Le taux de réponse aux questionnaires a été de 66% (534/815).

Globalement, il ressort de l’analyse des données que 21% des pédiatres arrêtent « souvent ou définitivement » de recevoir les familles qui refusent un ou plusieurs vaccins contre 4%, seulement, des médecins généralistes.

Les auteurs expliquent cette différence par le fait que la vaccination des enfants est le cœur de métier des pédiatres et qu’ils sont donc plus souvent confrontés à ces refus. Toutefois, ils notent également que cette différence peut être « le reflet de philosophies différentes entre spécialités. »

Sur un mois typique, la majorité des pédiatres (83 %) évalue le taux de refus des familles à plus de 1 % mais ce taux s’élève à plus de 5% pour 20% d’entre-eux.

Les chercheurs indiquent que les pédiatres qui ne reçoivent plus les familles travaillent plus souvent dans le privé (RR=4,90, IC 95% : 1,40-17,19], dans le Sud des Etats-Unis (RR=4,07, IC 95% : 1,08-15,31] et résident dans un état qui n’autorise pas les exemptions à la vaccination pour croyances personnelles (RR=3,7, IC 95% 1,74-7,85).

La majorité des pédiatres (64%) précisent qu’ils demandent « systématiquement ou souvent » aux parents de signer un formulaire de « refus de vaccination » émanant de l’AAP indiquant qu’ils refusent la vaccination et que cette décision comporte des risques. Seulement 29% des médecins généralistes font de même, probablement parce qu’ils ne sont pas contraints à des recommandations aussi strictes que leurs confrères (p<0,001).

Sans surprise, les pédiatres exerçant dans des états sans possibilité d’exemption pour raisons non-médicales ou avec des procédures plus contraignantes pour obtenir ces dérogations rapportent plus souvent « qu’aucun parent n’a refusé la vaccination au cours d’un mois typique » vs les états les autorisant (17% vs 8%, p=0,03). Cette différence n’est pas observée chez les médecins généralistes.

« Puisque de nombreux pédiatres refusent des rendez-vous à ces familles en dépit des recommandations, cette pratique devrait être mieux étudiée et comprise en termes de causes et de conséquences attendues et inattendues » concluent les auteurs.

Les pédiatres français continuent à se battre

Interrogés sur l’importance de ces refus parentaux en France, le Dr Jean Stagnara et le Pr Christophe Delacourt indiquent qu’ils restent minoritaires même s’ils ont tendance à augmenter.

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