Paris, France — Si le risque de décès dans les jours qui suivent un AVC est bien connu, la mortalité à un mois, voire à un an, l’est moins. Une lacune, aujourd’hui, en partie, comblée par une étude observationnelle réalisée par la DREES (Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques) [1].
Grâce à la base de données AMPHI (analyse de la mortalité post-hospitalisation en France en 2008-2010), Christine de Peretti (DREES) apporte un éclairage nouveau sur les décès dans les mois qui suivent une hospitalisation pour AVC et sur leurs causes.
La chercheuse montre qu’à un an, 28 % des patients hospitalisés pour un AVC sont décédés.
Au rang des principaux facteurs de risque : l’âge, la présence de comorbidités, l’AVC hémorragique et le passage ou non en soins intensifs dans des unités spécialisées (UNV).
Plus d’un quart de décès dans l’année qui suit l’hospitalisation
Selon la chercheuse, en 2008 et 2009, 14,5% des patients (adultes affiliés au régime de l’Assurance Maladie et hospitalisés pour AVC en 2008 ou 2009) sont décédés lors de l’hospitalisation initiale pour AVC. A un mois, la mortalité post-AVC s’élève à 16% et à un an, elle atteint 28%
Taux de mortalité post-AVC au cours du temps
Temps |
Hospitalisation initiale |
A un mois |
A un an |
Taux de mortalité |
14,5% |
16% |
28% |
En outre, le taux de mortalité à un an augmente fortement avec l’âge.
Taux de mortalité post-AVC en fonction de l’âge
Tranche d’âge |
18 à 64 ans |
65 à 84 ans |
Après 85 ans |
Taux de mortalité |
13% |
28% |
50% |
A titre de comparaison, le taux de mortalité [toutes causes] des personnes de plus de 85 ans de la base AMPHI sont de 27% et il est de 13% dans la population générale, précise la DRESS.
L’étude montre également que tous âges confondus, le taux de létalité féminin à un an est plus élevé que celui des hommes (31% versus 25%). Cependant, cette différence est le reflet du nombre important de femmes âgées car, à âge équivalent, les taux sont légèrement inférieurs chez les femmes.
Beaucoup plus d’AVC ischémiques En 2008 et 2009, près de 200 000 personnes ont été hospitalisées pour un AVC en France, dont 125 500 adultes relevant du régime général de l’Assurance maladie. Parmi eux, 29 % sont âgés de 18 à 64 ans, la moitié a entre 65 et 84 ans et 21 % au moins 85 ans. En tout, 62 % des patients ont fait un AVC ischémique, 26 % un AVC hémorragique et dans 12 % des cas, le type de l’AVC n’était pas précisé. |
Meilleur pronostic pour les AVC ischémiques que pour les AVC hémorragiques
Christine de Peretti constate que, quelle que soit la tranche d’âge, la survie après un infarctus cérébral est meilleure que pour les AVC hémorragiques. En 2008-2009, la mortalité hospitalière des AVC ischémiques est de 9%, et la létalité à un mois et à un an, respectivement de 10% et de 23 %. Là encore, elle augmente drastiquement avec l’âge.
Taux de mortalité post-AVC ischémique à un an en fonction de l’âge
Tranche d’âge |
18 à 34 ans |
35 à 44 ans |
Après 85 ans |
Taux de mortalité |
3% |
4% |
45% |
En parallèle, les décès suite à un AVC hémorragique surviennent essentiellement au cours du premier mois et sont plus fréquents. A un mois, la mortalité associée aux hémorragies cérébrales atteint 34% en 2008-2009, tous âges confondus. A un an, elle atteint 45% et varie en fonction de l’âge.
Taux de mortalité post-AVC hémorragique à un an en fonction de l’âge
Tranche d’âge |
18 à 34 ans |
Après 85 ans |
Taux de mortalité |
13% |
66% |
L’enquête montre que les hémorragies méningées sont moins nombreuses mais qu’elles affectent une population plus jeune (âge moyen de 56 ans). Leur létalité est inférieure à celle des hémorragies cérébrales mais plus élevée que celle des AVC ischémiques.
Les autres hémorragies intracrâniennes non traumatiques ont une létalité à un an de 37% (23 % après standardisation pour l’âge).
Le rôle important des comorbidités
Selon les résultats de l’étude, plus de 4 patients sur 10 présentent des comorbidités susceptibles d’interagir avec la survie.
Celles-ci ont été synthétisées dans l’étude grâce au score de Charlson qui additionne les poids affectés aux différentes pathologies chroniques prises en charge pendant le séjour, en fonction de leur gravité.
Il en ressort que « la survie à un an est fortement réduite pour les personnes présentant des valeurs élevées du score de Charlson [...] L’effet des pathologies chroniques sur la survie est sensible », indique Christine de Peretti.
Autre reflet de l’importance des comorbidités, explique-t-elle, sur les certificats de décès, l’AVC ou, plus largement, la maladie cérébro-vasculaire, ne figure dans la liste des causes de décès que dans 72% des cas et comme cause initiale que dans 52 % des cas.
Les soins intensifs dans des unités spécialisées augmentent les chances de survie
L’étude montre, enfin, que les patients ayant bénéficié d’un passage en soins intensifs ont une meilleure survie. L’effet protecteur de l’hospitalisation initiale en soins intensifs persiste et augmente même la survie à un an. Ces résultats « confortent à grande échelle ceux de méta-analyses ayant conduit à promouvoir le développement de filières spécialisées de prise en charge des AVC, et particulièrement les unités neurovasculaires spécialisées (UNV) et leurs lits de soins intensifs », note la chercheuse.
En conclusion, cette étude montre que « la létalité un an après un AVC reste importante, même si elle diminue progressivement », souligne Christine de Peretti.
Elle rappelle, en fin d’article, qu’une étude récente estime « à près de 90% la part des hémorragies cérébrales ou infarctus cérébraux qui sont dus à des facteurs de risque accessibles à la prévention ou au traitement, tels que le tabagisme, l’obésité, l’alimentation déséquilibrée, l’activité physique insuffisante, le diabète, la consommation d’alcool, le stress et la dépression, les dyslipidémies, les troubles du rythme cardiaque et surtout l’hypertension artérielle [2]. »
REFERENCES :
DREES. de Peretti C.Les risques de décès un an après un accident vasculaire cérébral . Études et Résultats, n° 939 octobre 2015.
O’Donnell MJ et coll. Risk factors for ischaemic and intracerebral haemorrhagic stroke in 22 countries (the INTERSTROKE study): a case-control study. Lancet Vol 376, N°9735, p112-123,10 july 2010.
Citer cet article: Aude Lecrubier. AVC : 28% de décès à un an - Medscape - 29 oct 2015.
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