Ménopause : la supplémentation en vitamine D n’apporte rien

Aude Lecrubier, Veronica Hackethal

Auteurs et déclarations

20 octobre 2015

Les résultats sur l’absorption du calcium montrent qu’à un an, elle a augmenté de 1% dans le groupe « vitamine D à forte dose », et qu’elle a baissé de 2% dans le groupe « vitamine D à faible dose », et de 1,3% dans le groupe placebo (p=0,005 et p=0,03, respectivement, versus le bras « fortes doses »).

 
Les données sur un an ne confortent pas l’intérêt de la supplémentation en vitamine D à fortes doses et même à n’importe qu’elle dose comparé à un placebo -- Pr Deborah Grady
 

Aussi, aucune différence n’a été observée entre les trois groupes concernant la densité minérale osseuse à différents sites: colonne vertébrale, col du fémur, hanche et ensemble du corps.

De même, les trois groupes ont présenté des résultats similaires en termes de scores TBS (Trabecular Bone Score), de masse musculaire, de scores Timed Up and Go, du nombre de chutes, du nombre de femmes ayant chuté, d’activité physique, et de statut fonctionnel.

L’évaluation du remodelage osseux dans un sous-groupe de patientes a également montré qu’il était similaire dans les 3 bras.

Au final, « aucune des doses n’a amélioré la densité minérale osseuse, la force des patientes, la masse musculaire, le statut fonctionnel ou le nombre de chutes. Traiter plus d’un an aurait, peut être amélioré les résultats mais, les données sur un an ne confortent pas l’intérêt de la supplémentation en vitamine D à fortes doses et même à n’importe qu’elle dose comparé à un placebo », conclut le Pr Deborah Grady (Université de Californie, San Francisco, Etats-Unis) dans un éditorial accompagnant l’article [2].

Pourtant, de nombreux pays, dont la France, recommandent une supplémentation en vitamine D chez les plus de 65 ans car ils sont globalement considérés comme carencés (selon le taux de référence de 25-hydroxyvitamine D < 30 ng/mL).

Questionnements sur la légitimité et la valeur du seuil de référence en vitamine D

« Notre étude ne conforte pas l’idée généralement acceptée selon laquelle un taux de vitamine D supérieur à 30 ng/mL assure une santé musculosquelettique optimale », commente le Dr Hansen.

Les auteurs précisent que ce seuil ne fait d’ailleurs pas l’objet d’un consensus. Certains, comme l’Institut de Medecine (IOM, Etats-Unis) recommandent un seuil de référence, plus souple, de 20 ng/mL.

En France, en janvier 2013, dans une note de cadrage, des experts de la Haute Autorité de Santé (HAS) ont, eux-mêmes, jugé qu’au vu des données disponibles, il était impossible d’établir une valeur de référence pour définir l’insuffisance en vitamine D [3]. En revanche, le GRIO (Groupe de recherche et d’information sur les ostéoporoses) a, lui, adopté le taux de référence de 25-hydroxyvitamine D de 30 ng/mL [4].

Or, définir un seuil de 25-hydroxyvitamine D <30 ng/mL n’est pas anodin puisqu’il revient, tout de même, à supplémenter les trois quarts des femmes ménopausées aux Etats-Unis, précisent les auteurs.

Ils soulignent que « par conséquent, déterminer le meilleur seuil pour aboutir à une homéostase calcique et une santé osseuse optimales est important. »

D’après cette nouvelle étude, l’absence de différence avec le groupe placebo ou avec des doses de supplémentation faibles, laisse sous-entendre que le seuil optimal, s’il existe, pourrait être encore plus bas que les 20 ng/mL recommandés par l’IOM.

Au final, l’essai qui questionne clairement l’intérêt de la supplémentation en vitamine D chez les femmes ménopausées sans ostéoporose, est publiée dans un climat de doutes sur les bénéfices de la supplémentation vitamino-calcique.

Dernièrement, deux récentes méta-analyses publiées dans le British Medical Journal ont, pour leur part, remis en cause l’intérêt de la supplémentation calcique après 50 ans sur la dmo et le risque de fracture .

Le Dr Hansen a participé à un essai clinique financé par le laboratoire Takeda en tant qu’investigateur principal. Le Dr Grady n’a pas de liens d’intérêt en rapport avec le sujet.

 

REFERENCES :

1. Hansen K et coll. Treatment of Vitamin D Insufficiency in Postmenopausal Women A Randomized Clinical Trial. JAMA Intern Med. 2015;175(10):1612-1621. Publié en ligne le 3 août 2015.

2. Grady D. How Much Vitamin D Is Enough? JAMA Intern Med. 2015; 175(10):1621.Publié en ligne le 3 août 2015.

3. HAS. Note de cadrage. Utilité clinique du dosage de la vitamine D . Janvier 2013

4. Benhamou C.L. et coll. pour le Groupe de recherche et d’information sur les ostéoporoses (GRIO). La vitamine D chez l’adulte : recommandations du GRIO. 18 mai 2011.

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