Tarbes, France -- Même si le taux de satisfaction des patientes est très variable, l'utilisation des pessaires dans le traitement du prolapsus génital n'est pas à négliger chez les femmes âgées réfractaires au traitement chirurgical, mais aussi avant d'envisager une opération, a rappelé le Pr Claude Hocké (CHU de Bordeaux), aux 29èmes Journées Infogyn, à Tarbes [1].
Introduit au fond du vagin pour maintenir le prolapsus génital et limiter ce qui est communément appelé une descente d'organes, le pessaire est « un traitement conservateur économique, simple et efficace, également associé à un faible risque de complication », a souligné le gynécologue.
En forme d'anneau, de cube, de donut…
Selon le Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF), qui a publié un document consacré aux indications du pessaire, cette méthode, utilisée depuis l'antiquité, est considérée dans les pays anglo-saxons comme une option thérapeutique fiable, « au même titre que la chirurgie ». Ce qui n'est pas le cas en France, où il existe « une certaine désaffection pour ce traitement, au profit du traitement chirurgical ».
Pourtant, « le pessaire a sa place dans le traitement du prolapsus », estime le Pr Hocké. « Il ne faut pas forcément écarter cette solution, en particulier chez les femmes âgées, en cas de refus de la chirurgie, mais aussi dans l'attente d'une opération ». Selon lui, la prescription d'un pessaire peut être envisagée en première intention.
Il existe une multitude de pessaires, aux formes très variables. Autrefois confectionnés en bronze, en liège, voire en or ou en argent, ils sont désormais à base de latex ou de silicone. Deux modèles se distinguent: les pessaires dits "de support", en forme d'anneau, qui soutiennent en laissant la lumière vaginale libre, et ceux qui comblent l'espace vaginal, généralement des cubes aux faces concaves.
L'anneau reste le plus facile à utiliser. Il est indiqué dans le traitement conservateur des prolapsus de stade I et II (voir encadré). Le cube, qui agit par un phénomène de ventouse, est davantage indiqué pour les prolapsus de stade III, de même que les anneaux volumineux, de type "donut" (modèle mixte).
Le prolapsus en cinq stades A la classification française du prolapsus en trois stades (intravaginal, atteinte de la vulve, extériorisation), il est désormais préféré une classification internationale en cinq stades, avec l'hymen comme référence: - Stade 0: pas de prolapsus. Les points de référence (col vésical, col utérin, cul-de-sac vaginal postérieur…) sont situés à plus de 3 cm au-dessus de l'hymen. - Stade I: le point de référence le plus bas du prolapsus reste à 1 cm au-dessus de l'hymen. - Stade II: le point le plus bas se situe entre +1 (vers l'extérieur) et -1 cm de l'hymen. - Stade III: le point le plus bas est situé à +1 cm sous l'hymen, mais la longueur de l'extériorisation reste au moins inférieure de 2 cm. - Stade IV: tous les points sont au-delà du stade III. Le retournement du vagin est complet. |
Surveillance régulière obligatoire
Dans l'ensemble, « les pessaires sont surtout efficaces dans les stades II et III du prolapsus antérieur et utérin », indique le Pr Hocke. Si cette méthode est utile en cas de cystocèle (hernie de la vessie dans le vagin), elle reste contre-indiquée lors d'un prolapsus postérieur, s'accompagnant d'une rectocèle (hernie du rectum).
« Selon la littérature, les pessaires de comblement sont à utiliser en deuxième intention, en cas d'échec des anneaux. Mais tout dépend de la pratique » et du stade du prolapsus, souligne le Pr Hocké.
Le pessaire en cube a toutefois un inconvénient majeur: « il doit être retiré chaque jour pour être lavé, avant d'être replacé ». Tandis que l'anneau « peut être laissé en place plus de trois mois ». Dans tous les cas, les pessaires sont à changer « tous les trois à six mois ».
Selon le gynécologue, la prescription d'un pessaire est soumise à une stricte condition: « la patiente doit pouvoir venir régulièrement en consultation pour une surveillance en continu ». Les visites de contrôle sont, en effet, prévues 15 jours et 3 mois après la pose, puis tous les trimestres.
Un premier mois décisif
Pour déterminer la taille adéquate, le Pr Hocké recommande d'évaluer « l'écart entre le point de contact de la symphyse pubienne sur l'index et le bout de l'index, lorsque celui-ci est posé dans le cul-de-sac vaginal postérieur ». La mesure correspond au diamètre du pessaire à poser.
Il s'agit de « trouver le pessaire le plus large possible, sans inconfort ». Lorsqu'il est en place, « on doit pouvoir passer un doigt au pourtour du pessaire ». Un effort d'expulsion, glotte fermée (manoeuvre de Valsalva) peut être effectué par la patiente pour s'assurer que le dispositif se maintient.
Pour faciliter la tolérance, « il est conseillé de prescrire un traitement hormonal local sous forme crème, à appliquer sur le pessaire à chaque remplacement », en particulier chez les femmes ménopausées. Par ailleurs, en cas d'érosion ou d'ulcère, « il faut retirer provisoirement le pessaire et appliquer la crème pendant deux à trois semaines ».
« Selon une revue de la littérature, le taux de satisfaction est extrêmement variable, allant de 9 à 89%, tout pessaire confondu et avec des durées d'utilisation comprise entre 1 mois et 7 ans », précise le Pr Hocké.
Menée auprès de 246 femmes pendant cinq ans, une étude anglaise [2] montre que le pessaire est surtout abandonné le premier mois (24% des cas). A cinq ans, plus de la moitié des patientes (53%) continue de l'utiliser. Les complications sont restées mineures (saignements, douleur et constipation) et peu fréquentes (12% des cas).
« Si le traitement est bien accepté le premier mois, il est généralement conservé très longtemps », confirme le gynécologue.
REFERENCES :
1. Hocké C, Comment gérer un prolapsus chez la femme âgée, 29èmes Journées Infogyn, 2 octobre 2015, Tarbes.
2. Lone F, Thakar R, Sultan AH. A 5-year prospective study of vaginal pessary use for pelvic organ prolapse. International Journal of Gynecology & Obstetrics, 114 (1):56-59, juillet 2011.
Citer cet article: Traitement du prolapsus génital: quelle place pour les pessaires? - Medscape - 28 oct 2015.
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