Paris, France — « Le profil de l'homme atteint de cancer de la prostate résistant à la castration s'est modifié en moins de 10 ans : aujourd'hui, il s'agit d'un patient de plus de 75 ans - qui souffre donc généralement de comorbidités - dont la tumeur est généralement métastasée à l'os et qui a déjà été traité par castration intermittente puis totale et par chimiothérapie (docétaxel, en général).
Trois types de traitement peuvent lui être proposés : une nouvelle chimiothérapie par cabazitaxel, ou un traitement par de nouveaux anti-androgènes tels que l'acétate d'abiratérone ou l'enzalutamide », explique en préambule de la table ronde consacrée aux nouveaux traitements du cancer de la prostate à l'occasion du 107ème congrès français d'urologie, le Pr Pascal Rischmann (Toulouse)[1].
« Le choix entre ces traitements est dicté par le PSA (niveau ou cinétique), l'état général, les symptômes, l'âge, la localisation et l'agressivité des métastases, ainsi que la tolérance et l'adaptation au traitement ».
Chimiothérapie par cabazitaxel (Jevtana ®, Sanofi-Aventis)
« C'est l'étude TROPIC publiée en 2010 qui a prouvé l'intérêt de l'utilisation du cabazitaxel (25 mg/m2 IV toutes les 3 semaines pendant au maximum 10 cycles), chez les hommes souffrant de cancer de la prostate métastatique hormono-résistant progressant durant ou après un traitement par docétaxel », précise le Dr Philippe Beuzeboc (Paris). « Le cabazitaxel permet en effet un gain médian de survie globale de 2,4 mois et un bénéfice en terme de réponse objective et symptomatique ».
Cette chimiothérapie doit être proposée préférentiellement à l'hormonothérapie de deuxième ligne chez les patients à faible taux d'androgène, chez qui le score de Gleason est élevé ou en cas de durée courte de l'hormonosensibilité. Elle trouve aussi sa place chez les hommes qui souffrent d'une tumeur à composante neuroendocrine associée à des métastases viscérales.
Elle doit être utilisée en association avec du G-CSF pour limiter le risque d'effet indésirables de grade 3 ou plus, en particulier de neutropénies fébriles.
Acétate d'abiratérone (Zytiga®, Cougar Biotechnology)
« Ce nouvel anti-androgène agit en inhibant de façon irréversible le cytochrome P450c17 à deux niveaux : il empêche la transformation de la prégnénolone en 17OH prégnénolone ainsi que celle de la 17 OH prégnénolone en DHEA. Il cible donc les testicules, les surrénales et le tissu tumoral », explique le Pr Thierry Lebret (Suresnes).
« Les études de phase III ont montré que l'utilisation d'acétate d'abiratérone permet de majorer la survie globale (14,8 mois contre 10,9) et la survie sans progression (5,6 mois contre 3,6). Le risque de progression biologique de la maladie est réduit de 42 %, celui de la progression radiologique de 33 % ».
Le traitement par acétate d'abiratérone, induit une baisse du cortisol, le la DHEA, de l'androstènedione, de la testostérone et de la dihydrotestostérone. En raison d'un rétrocontrôle positif, ce médicament peut provoquer une hypertension, une hypokaliémie et des oedèmes.
C'est pour ces raisons qu'il est utilisé conjointement avec de la prednisolone (10 mg/j) afin de limiter les effets indésirables minéralocorticoïdes.
« Ce traitement peut actuellement être proposé après résistance à la castration, en deuxième ligne après une chimiothérapie. Mais il est possible qu'à l'avenir, il soit prescrit en pré-chimiothérapie tout en maintenant la castration », conclut le Pr Lebret.
Enzalutamide (Medivation Inc.)
Cet autre anti-androgène non stéroïdien a été développé sous le nom MDV3100.
Il bloque la voie de signalisation dépendant des récepteurs aux androgènes, facteur clé de la croissance tumorale, par deux mécanismes : inhibition de la fixation des androgènes aux récepteurs et inhibition de la translocation de ces récepteurs à l'intérieur du noyau cellulaire et ainsi de leur interaction avec l'ADN cellulaire.
« L'étude AFFIRM publiée dans le NEJM en 2012 a prouvé l'efficacité de ce traitement sur la survie globale (majorée de 4,8 mois après un suivi médian de 14,4 mois), la progression de la maladie (repoussée de 5,4 mois), la ré-ascension du taux de PSA (qui survient 5,3 mois plus tard), la douleur (douleurs minorées dans 45 % des cas contre 7 % sous placebo) et sur la qualité de vie », analyse le Dr Fred Saad (Montréal, Canada).
Ce traitement s'est révélé efficace dans les deux tranches d'âges retenues pour l'étude (avant et après 65 ans), quel que soit le nombre de lignes de chimiothérapies utilisées auparavant, en cas de douleurs sévères ou modérées, que l'évolution concerne plus particulièrement le PSA ou les images radiographiques, et, enfin, quel que soit les taux de PSA et de LDH initiaux.
En raison du risque majoré de convulsions avec ce traitement, il est recommandé de ne pas le prescrire en cas d'antécédents de convulsions ou d'atteinte neurologique récente.
Citer cet article: Cancer de la prostate résistant : trois nouvelles possibilités - Medscape - 6 déc 2013.
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