Paris, France – L’infirmière ou l’infirmier d’accueil et d’orientation (IAO) aux urgences, disposera bientôt d’une nouvelle échelle de tri, élaborée par laSociété Française de Médecine d’Urgence (SFMU) et présentée par le Dr Carlos El Khoury (Vienne) lors du congrès Urgence 2015 [1].
Rappelons que la notion d’IAO, introduite par une circulaire du 14 mai 1991, officiellement reconnue par un décret du 22 mai 2006, est définie de la manière suivante par le Code de la santé publique (Art. 6124-18) : « Lorsque l’activité de la structure des urgences le justifie, l’équipe comprend en outre un infirmier assurant une fonction d’accueil et d’organisation de la prise en charge du patient ».
«En pratique, il existe un IAO 24h/24 à partir de 40 000 passages/an », a précisé le Dr El Khoury.
Les conséquences de cette étape dans la prise en charge ont été chiffrées par l’enquête menée en 2013, sur 24 heures (le 11 juin 2013), par la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES) qui montre que dans les établissements disposant d’un IAO, 19% des patients sont priorisés entre l’enregistrement et la prise en charge médico soignante, et 17% entre l’évaluation et la prise en charge médico-soignante, contre 4% et 1,75% respectivement en l’absence d’IAO.
Le délai médian d’admission d’un AVC passe ainsi de 23 minutes entre l’arrivée et le contact médico-soignant en l’absence d’IAO, à 6 minutes en présence d’un IAO. Commentaire du Dr El Khoury : « Si certains ne sont pas encore convaincus… »
Il existe un certain nombre d’échelles de tri, comme l’Emergency Severity Index américaine, la Manchester Triage Scale, qui remonte à 1996, ou encore la Canadian Emergency Department Triage and Acuity Scale.
Les principales caractéristiques des échelles utilisables en France ont été définies par les recommandations formalisées d’experts de 2013.
Ces recommandations prévoient notamment que le triage effectué par un ou uneIDE dédié(e) et spécialement formé(e), avec idéalement une ancienneté de 6 mois à un an aux urgences. Le triage doit concerner tous les patients, dans un délai ne dépassant pas 30 minutes.
Ce triage doit faire appel à une échelle spécifique, comportant 4 à 5 niveaux, définissant pour chaque niveau un délai maximal d’attente avant prise en charge médicale (avec une réévaluation sommaire quand le délai prévu est dépassé).
Enfin, l’échelle doit être adaptée aux caractéristiques de l’organisation nationale des soins. Les experts proposent donc la construction d’une échelle de triage spécifique, unique au niveau national, prenant en compte les spécificités de l’adulte et de l’enfant.
Une telle échelle, dite Classification Infirmière des Malades aux Urgences (CIMU) a été élaborée en 2009 par les experts de la SFMU [2].
La version 2015, présentée par le Dr El Khoury au congrès Urgences, est la suivante.
CIMU version 2015/ présentée au congrès SFMU
Tri |
Situation |
Risque d’aggravation |
Perte de chance en cas d’attente |
Actes hospitaliers prévisibles |
Hospitalisation prévisible |
Actions |
Délais d’intervention |
Installation |
1 |
Détresse vitale majeure |
Dans les minutes |
++++ |
> 5 |
> 90% |
Support d’une ou des fonctions vitales |
Sans délai (infirmière+ médecin) |
Salle d’accueil des urgences vitales (SAUV) |
2 |
Atteinte patente d’un organe ou lésion traumatique majeure |
Dans l’heure |
+++ |
> 5 |
> 80% |
Traitement de l’organe ou lésion traumatique |
Infirmière<10 min. Médecin<20 min. |
SAUV ou Box |
3A |
Atteinte potentielle d’un organe ou lésion traumatique instable ; Comorbidité(s) lourde(s) ou patient adressé par un médecin |
Dans les 24 heures |
++ |
> 3 |
> 50% |
Evaluation diagnostique et pronostique, en complément du traitement |
Médecin<60 min. puis infirmière si besoin |
Box ou SAUV Ou salle d’attente |
3B |
Idem tri 3A Patient sans comorbidité lourde |
Dans les 24 heures |
+ |
> 3 |
> 30% |
Evaluation diagnostique et pronostique, en complément du traitement |
Médecin<90 min. puis infirmière si besoin |
Box ou salle d’attente |
4 |
Atteinte fonctionnelle ou lésionnelle stable |
Non |
0 |
1 ou 2 |
> 10% |
Aide diagnostique et/ou thérapeutique limitée |
Médecin<120 min. puis infirmière si besoin |
Box ou salle d’attente |
5 |
Pas d’atteinte fonctionnelle ou lésionnelle évidente |
Non |
0 |
0 |
0% |
Pas d’acte diagnostique et/ou thérapeutique |
Médecin<240 min. |
Box ou salle d’attente ou maison médicale de garde |
Cette échelle est assortie d’une centaine d’exemples de motifs de présentations aux urgences, présentés avec des critères depuis l’arrêt cardiaque, évidemment de niveau 1, jusqu’à l’hypothermie, de niveau 2, où l’on recherchera une T°C < 35,2°C, ou l’hyperglycémie (niveau 3B), avec recherche d’un taux > 20 mmol et d’une cétonurie. Il existe egalement des critères modulateurs non spécifiques d’une pathologie, comme la douleur ou l’agitation : par exemple, une colique néphrétique est classée en niveau 1du fait de la douleur, de même qu’un patient violent.
REFERENCES :
El Khoury C. Triage aux Urgences. Recommandations formalisées d’experts. Congrès Urgences 2015. Paris, 12 juin 2015.
Taboulet P, Moreira V, Haas L, et coll. Triage with the French Emergency Nurses Classification in Hospital scale: reliability and validity. Eur J Emerg Med. 2009 Apr;16(2):61-7. PubMed PMID: 19194114. Epub 2009/02/06. eng..
Citer cet article: Vincent Bargoin. La SFMU va proposer son échelle de tri pour l’accueil des urgences - Medscape - 13 juil 2015.
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