Paris, France-- Le Collègue National des Gynécologues et Obstétriciens Français s’est déclaré favorable à ce que les femmes qui le souhaitent puissent faire congeler (vitrifier) leurs ovocytes , à leur convenance, en vue d’une grossesse ultérieure [1]. « L’autoconservation de convenance est possible pour les hommes. Il n'y a pas de raison particulière pour que cela ne soit pas autorisé aux femmes, » arguent les experts.
Jusqu’à très récemment, la conservation des ovocytes par le procédé de congélation lente était peu efficace et la question de l’autoconservation des ovocytes à plus « grande échelle » ne se posait pas vraiment. C’est la récente maîtrise du procédé de vitrification des ovocytes qui la rend d’actualité. En effet, les performances obtenues à partir des ovocytes vitrifiés semblent identiques à celles des ovocytes « frais » [2][3].
La France à la traine ?
Le Collège rappelle qu’avec le don d’ovocytes, l’autoconservation ovocytaire est la seule méthode de traitement de l’infertilité réellement efficace à 40 ans et plus : « elle permet aux couples d’utiliser leur propre capital génétique, ce qui n’est pas le cas du don d’ovocytes qui souffre d’une réelle pénurie en France nécessitant le recours, pour de nombreuses femmes, à des centres étrangers.»
Aujourd’hui, de nombreux pays acceptent la conservation d’ovocytes dans le cadre de la convenance (Etats-Unis, Grande-Bretagne, Espagne…), et la société européenne de reproduction humaine et d’embryologie (ESHRE) a, à son tour, redu un avis favorable.
En France, la pratique de la vitrification et de la conservation des ovocytes est devenue courante « lorsque la fertilité est menacée par un traitement stérilisant (en cas de cancer) » mais pas dans le cadre de la convenance sauf si les femmes acceptent de donner une partie de leurs ovocytes. « Un tel chantage nous parait éthiquement inacceptable », s’insurge la société savante.
Limiter les risques de dérive
Le CNGOF est conscient « des problèmes soulevés par cette technique » :
• Risque d’encourager les grossesses tardives : des grossesses à risque pour la mère et l’enfant dès 40 ans avec une franche majoration après 45 ans. « Un groupe de travail doit encore faire le point pour situer l'âge limite jusqu'auquel il serait acceptable qu'une grossesse puisse être induite par ce procédé. En effet, il ne serait pas raisonnable de ne pas fixer de limite en raison de l'augmentation importante des risques gravidiques liés à l'augmentation de l'âge maternel », indique le communiqué du groupe d’experts.
• Risque de donner de faux espoirs aux femmes. « Une récente étude étrangère souligne que, dans le meilleur des cas, le taux de naissances est de 62 %. Le déclin du taux de succès de l’AMP s’amorce dès 35 ans et s’accentue à partir de 37 ans. Il faudrait donc réaliser la conservation avant 35 ans pour un maximum d’efficacité. L'âge limite à partir duquel l'autoconservation rendrait illusoire les chances de grossesse doit cependant encore être déterminé par un groupe de travail », précise le CNGOF.
• Problème du financement (qui toutefois éviterait à l’assurance maladie des prises en charge inefficaces de l’infertilité).
En conclusion le CNGOF est favorable à l’autorisation de l’autoconservation ovocytaire sociétale mais il rappelle qu’il est indispensable que « les femmes soient dûment informées de la chute de la fertilité avec l’âge, des risques des grossesses tardives pour elles-mêmes et leurs enfants à naitre, ainsi que des chances incertaines de réussite de l’autoconservation. »
RÉFÉRENCES
Communiqué de presse CNOGF. Auto-conservation sociétale des ovocytes - la position du CNGOF. 12 décembre 2012.
Rienzi L, Romano S, et coll. Embryo development of fresh 'versus' vitrified metaphase II oocytes after ICSI: a prospective randomized sibling-oocyte study. Hum Reprod. 2010 Jan;25(1):66-73. Epub 2009 Oct 27.
Cobo A, Meseguer M, Remohí J, Pellicer A. Use of cryo-banked oocytes in an ovum donation programme: a prospective, randomized, controlled, clinical trial. Hum Reprod. 2010 Sep;25(9):2239-46. Epub 2010 Jun 30.
Citer cet article: Les françaises bientôt libres de conserver leurs ovocytes à leur gré ? - Medscape - 21 déc 2012.
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