REACTUALISATION - Le Haut Conseil de la Santé Publique (HCSP), par un avis rendu public sur son site, suspend la recommandation de vaccination des nourrissons contre le rotavirus : Rotarix® (GlaxoSmithKline) et Rotateq® (Sanofi Pasteur, MSD) du fait « de l’évolution défavorable de certains cas rapportés d’invagination intestinale aiguë (décès, résections) probablement liée à une prise en charge tardive ». Le HCSP souligne qu’on ne peut « exclure que de telles situations se reproduisent ». Il ajoute qu’« une stratégie de vaccination sélective, ciblée sur certains nourrissons ne peut être proposée puisque ni la littérature internationale relative aux pays industrialisés, ni les données épidémiologiques nationales ne permettent d’identifier des facteurs de comorbidité ou des facteurs de risque environnementaux (conditions de vie, zone géographique sur le territoire national) susceptibles de définir une population de nourrissons pour laquelle la balance bénéfice/risque pourrait être plus favorable ». |
Saint-Denis, France/ 1er avril 2015 -- 508 notifications d’effets indésirables, 201 effets indésirables graves, 47 invaginations intestinales aiguës et 2 décès. Les données de pharmacovigilance disponibles depuis 2006 et publiées par l’ANSM sur les vaccins per-os contre les rotavirus (Rotarix® GlaxoSmithKline et RotaTeq® Sanofi Pasteur-MSD) soulèvent de vraies questions sur l’intérêt de ces vaccins qui sont recommandés par leHaut Conseil de la Santé Publique depuis 2014 chez les nourrissons de moins de 6 ans.
A l’occasion d’un Comité technique de pharmacovigilance, les experts présents qui ont analysé les données ont souligné que « le taux de notification d’effets indésirables graves est bien supérieur avec ces vaccins par rapport à celui d’autres vaccins pédiatriques recommandés dans le calendrier vaccinal. Dans les 7 jours après la vaccination le risque d’effets indésirables graves est de 6 pour 100 00 nourrissons vaccinés. Le taux de complications létales ou mettant en jeu le pronostic vital est de 8,5 % ».
Par ailleurs ce comité souligne que « la maladie de Kawasaki figure parmi les effets indésirables d’intérêt particulier. Si aucun cas n’a été rapporté dans le suivi national, 62 cas ont été signalé au niveau international durant le développement clinique de RotaTeq® ».
Rotarix ® : invaginations et maladie de Kawasaki
Entre la commercialisation en mai 2006 et le 31 octobre 2014, 422 effets indésirables dont 161 graves (38 %) ont été rapportés avec Rotarix®. Il s’agissait principalement d’effets digestifs (74,6 %), 35 cas d’invagination intestinale aiguë sont survenus dans le mois suivant la vaccination. Vingt et une de ces 35 invaginations ont été rapportées dans la semaine qui a suivi l’administration du vaccin : 2 enfants ont été admis en réanimation et un troisième est décédé.
Parmi les 67 effets indésirables non digestifs, on retient 6 urticaires et 4 malaises correspondant à des fausses routes favorisées par les modalités d’administration (seringue par voie orale).
Dans le monde, un total de 23 450 effets indésirables, dont 10 361 graves ont été signalés entre juillet 2004 et le 31 mai 2013. Le comité technique souligne la notification de 650 effets indésirables graves, de 48 cas de cyanose, de 30 cas d’apnée, de 64 cas d’hypersensibilité de 13 maladies de Kawasaki (dont 12 graves).
RotaTeq ® : invaginations et malaises
En France, depuis janvier 2007, un total de 86 signalement d’effet indésirables dont 40 graves a été rapporté avec RotaTeq. Il s’agissait principalement d’effets digestifs (74,4 %) dont 12 cas d’invaginations intestinales aiguës survenues dans le mois suivant la vaccination. Six de ces douze cas se sont produits dans les 7 jours suivant l’administration du vaccin et un enfant est décédé des suites d’une invagination.
Parmi les 15 effets indésirables non digestifs, le comité retient un urticaire et deux cas graves de malaise-apnée correspondant à des fausses routes.
Dans le monde, un total de 21 174 effets secondaires dont 7 582 graves ont été signalés avec RotaTeq ® entre novembre 2005 et novembre 2014. Le comité technique souligne la notification de 905 effets indésirables graves, de 88 cas d’apnée et de 62 maladies de Kawasaki (dont 61 graves).
Des recommandations à revoir
Quelles conséquences à cette notification de l’ANSM ? Le comité technique précise que « le risque de malaise au moment de l’administration pourrait nécessiter une information des professionnels sur les modalités d’administration permettant de minimiser ce risque. L’ajout du risque d’urticaire (pour la spécialité Rotarix®) et de gastroentérite, même en l’absence de déficit immunocombiné sévère (pour les deux spécialités) est à envisager ».
« Les membres du Comité technique s’interrogent sur le bien fondé de recommander la généralisation de cette vaccination en France … Ils insistent sur l’information aux professionnels de santé et aux familles sur la gravité de ces effets indésirables en rappelant les signes cliniques d’appel de l’invagination intestinale aiguë afin de permettre une prise en charge précoce qui améliore le pronostic ».
Une lettre aux professionnels de santé sur la prise en charge des invaginations intestinales aiguës a été éditée et va être adressée aux praticiens.
Devant la publication de cet avis de l’ANSM, le Haut Conseil de la Santé Publique (HCSP) a prévu de réexaminer dans les prochains jours ses recommandations relatives à la vaccination des nourrissons contre les infections par rotavirus. Il est vrai que jusqu’à présent le Haut Conseil de la santé publique recommandait la vaccination des moins de 6 mois « sous réserve d’une politique tarifaire conduisant à des ratios coût/efficacité acceptables ».
REFERENCE :
ANSM. Vaccins contre les rotavirus (RotaTeq et Rotarix) et rappel sur la prise en charge de l’invagination intestinale aiguë du nourrisson - Point d'Information. 31/03/2015.
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Citer cet article: Dr Isabelle Catala. Rotavirus : le HCSP suspend la recommandation de vaccination - Medscape - 12 mai 2015.
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