Paris, France -- Proposé en remplacement du test au gaïac de recherche de sang dans les selles (Hemoccult II®), le nouveau test immunologique de dépistage du cancer colorectal sera disponible à partir de mi-avril, ont annoncé Benoit Vallet, directeur général de la santé, et Agnès Buzin , présidente de l'Institut national du cancer (Inca), lors du congrès des Journées francophones d'hépatogastroentérologie et d'oncologie digestive (JFHOD) 2015 [1]. Le dépistage organisé pourra alors reprendre, après six mois d'interruption.
Plus sensible, ce nouveau test permettrait de détecter 2 à 2,5 fois plus de cancers et 3 à 4 fois plus d'adénomes, ce qui devrait amener à doubler le nombre de coloscopie. Une hausse d'activité pour les gastro-entérologues, qui fera l'objet d'un suivi régulier de la part des autorités sanitaires, afin « d'ajuster le programme », a précisé le responsable de la DGS.
Des outils pédagogiques destinés aux médecins
Les kits contenant le test « pourront être commandés sur le site ameli.fr ou auprès des structures de gestion, en charge du dépistage du cancer colorectal, à partir de mi-avril », a indiqué Agnès Buzin, qui compte sur « une forte mobilisation », en particulier des médecins généralistes, pour « redonner une impulsion au dépistage organisé ».
Afin d'accompagner le lancement du nouveau test, un dispositif de communication sera également lancé. « Il sera maintenu tout au long de l'année », a annoncé la présidente de l'Inca. Il prévoit de former les professionnels de santé aux caractéristiques et à l'utilisation du nouveau test, à travers la mise à disposition d'un diaporama ou de fiches pratiques sur le site de l'institut.
Une campagne d'information grand public sera également lancée avec la diffusion de messages de sensibilisation au dépistage, via la télévision, la radio et internet.
Objectif ambitieux de 50% de participation au dépistage
Le programme de dépistage organisé du cancer colorectal est généralisé à l'ensemble de la France depuis 2009. Tous les deux ans, un test est proposé à l'ensemble de la population âgée de 50 à 74 ans, soit plus de 18 millions de personnes concernées.
Si la participation a progressé depuis la généralisation du dépistage, elle reste faible. En 2013-2014, elle était seulement de 29,8%, avec de fortes disparités selon les régions, les chiffres variant de moins de 25% à plus de 50% de participation, selon l'Inca.
« L'objectif est d'augmenter la participation au dépistage organisé de 10 à 15% pour arriver dans les année à venir à un seuil de 50% au niveau national », a indiqué Benoit Vallet. « Une meilleure participation pourrait réduire la mortalité [par cancer colorectal] de 30 à 40% ».
Sans modification de la participation, la détection des cas de cancer colorectal par dépistage « devrait passer en théorie de 20 à 40% » grâce au nouveau test, a commenté le Pr Robert Benamouzig, (hôpital Avicenne, Bobigny, AP-HP), lors d'une conférence de presse [2].
Avec une hausse de la participation au dépistage, « on devrait pouvoir détecter 50 à 60% des cancers ».
Un seul prélèvement de selle
Le test immunologique présente l'avantage de nécessiter qu'un seul prélèvement de selle, tandis que le test au gaïac est réalisé à partir de six prélèvements. Un aspect pratique qui, à lui seul, devrait contribuer à une meilleure participation de la population cible.
Le seuil à partir duquel le test est jugé positif a été fixé à 150 ng d'hémoglobine par mL de selle. Avec ce seuil, le nombre de cancers détectés serait doublé, tout comme le nombre de coloscopies réalisées.
Les études ont montré que la hausse des examens par coloscopie engendrée « est acceptable pour les gastro-entérologues », a précisé Agnès Buzin. « Il y aura toutefois la possibilité d'ajuster le seuil de positivité pour adapter, au fur et à mesure, le programme de dépistage organisé. »
« Avec la DGS, nous allons suivre le taux de participation et surtout le taux de positivité, ainsi que les difficultés pratiques ». Un premier bilan est prévu pour l'automne 2015, « après trois à quatre mois de généralisation », en vue d'un éventuel ajustement, a annoncé la présidente de l'Inca.
Chaque année, 42 000 nouveaux cas de cancer colorectal sont enregistrés en France. C'est le troisième cancer le plus fréquent, mais aussi le deuxième cancer le plus meurtrier, avec près de 18 000 décès par an.
Anciens tests stoppés/nouveaux attendus : so what ? Afin d'assurer la transition vers le test immunologique, la DGS a demandé l'arrêt de la lecture des tests Hemoccult et leur destruction à partir du 31 janvier 2015. Une décision qui aurait conduit à l'abandon de près de 11 000 analyses, selon Le Figaro. Interrogé par Medscape, le directeur général de la santé, Benoit Vallet, n'a pas pu confirmer ce chiffre, mais a défendu la décision en évoquant « l'inégalité d'accès à la santé » subie par les patients concernés, alors qu'ils peuvent bénéficier d'un test plus performant. Une inégalité qui serait « difficile à justifier ». Selon lui, les pertes restent minimes, la transition vers les tests immunologiques, annoncée en 2012, ayant été anticipée. L'arrêt de la distribution des tests a été ordonné en novembre 2014. « Le marché se terminant, il aurait été compliqué de le renouveler. Il aurait fallu reconstituer des stocks », alors que l'arrivée du nouveau test était imminente, a précisé le responsable. Au cours de l'allocution, Benoit Vallet a indiqué que « les patients ayant effectué un test au gaïac, dont la lecture n'a pas pu être réalisée, seront prioritaires », lorsque les nouveaux tests de dépistage seront disponibles. |
REFERENCES :
1. Vallet B, Buzyn A, Allocutions du directeur général de la Santé et de la présidente de l’INCa, JFHOD 2015, 19 mars 2015.
2. Benamouzig R, Dépistage du cancer colorectal: les "plus" du test immunologique, JFHOD 2015, conférence de presse du 19 mars 2015.
Citer cet article: Vincent Richeux. Cancer colorectal : l’Hemoccult enfin remplacé par un test immunologique ! - Medscape - 24 mars 2015.
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