Paris, France – Les résultat de l’enquête FLAHS (French League Against Hypertension Survey) cuvée 2014, viennent d’être présentés en conférence de presse par le CFLHTA (Comité Français de Lutte contre l’HTA).
Deux résultats ressortent. Premièrement, le taux de sujets hypertendus contrôlés par leur traitement reste inférieur à l’objectif des 70%, que le CFLHTA voudrait atteindre en 2015.
Deuxièmement, l’enquête, qui cette année, était accompagné d’un questionnaire sur les capacités mnésiques, fait ressortir une proportion de 11% de personnes âgées de 55 à 74 ans présentant une plainte qui justifierait un bilan.
Comme il se doit, le message du CFLHTA est que la fréquence des troubles mnésiques est plus importante en cas d’HTA non contrôlée, et que la prise en charge de l’HTA est donc une composante de la prévention globale vis-à-vis des démences des personnes âgées.
Instantané dans la vraie vie
L’enquête FLAHS 2014 a été menée en octobre 2014 par Kantar Health, à la demande du CFLHTA, auprès d’un échantillon de de 3562 personnes âgées de 35 ans et plus, résidant en France métropolitaine. La méthode est celle du questionnaire auto-administré (4 pages).
Premier constat : une certaine stabilité. Cette année, 30% des personnes interrogées ont déclaré prendre un médicament antihypertenseur. Elles étaient 31% en 2012, et 30% en 2010.
Cette proportion varie naturellement en fonction de l’âge, mais là encore, selon des répartitions stables. Dans la tranche des 35-44 ans, 5% des sujets prennent un traitement antihypertenseur (6% en 2012), puis les taux montent par tranche de 5 ans à 18% (19%), 40% (41%), 49% (50%), et enfin, 58% (58%) à 75 ans et plus.
Cette stabilité des chiffres recouvre évidemment un certain renouvellement de la population : ainsi, 10% des sujets traités le sont depuis moins de 2 ans, a relevé le Pr Girerd, ce qui « donne une idée de l’absorption de nouveaux patients par le système de soins ».
La plus haute colonne de l’histogramme reste néanmoins celle des patients traités depuis 10 à 20 ans (28%).
La part des IEC augmente, mais les ARAII restent en tête
En ce qui concerne le classes thérapeutiques prescrites, les ARA II viennent en tête (45%), suivis par les diurétiques (35%), les bêta-bloquants (33%), les inhibiteurs calciques (28%), les IEC (27%), la spironolactone (6%). Les antihypertenseurs centraux, les alpha-bloquants et les inhibiteurs directs de la rénine restent d’une utilisation marginale.
S’agissant de l’aliskiren, qui représente moins de 1% des prescriptions, le Pr Gired a souligné le particularisme de la France qui a abaissé le remboursement à 30% voici 18 mois.
En ce qui concerne les évolutions, les ARAII restent stables depuis 2012, les diurétiques également, mais une baisse de leur part relative avait été enregistrée entre 2007 et 2010. La part des IEC, en revanche, est en augmentation, conformément aux objectifs de prescriptions. L’utilisation des associations fixes est également en augmentation.
Les traitements sont dans leur majorité des monothérapies (45%). Viennent ensuite 36% de bithérapies, 15% de trithérapies, et 5% de quadrithérapies ou plus.
En monothérapie, la classe la plus prescrite est celle des ARAII. On note enfin que 36% des ordonnances comportent une association fixe.
50% à l’objectif
En ce qui concerne les résultats de cette prise en charge, 49% des sujets de plus de 35 ans, traités par antihypertenseur, présentaient une PA moyenne inférieure à 135/85 mmHg lors de 3 mesures au domicile (61% en prenant 140/90 pour seuil).
Depuis 2007, cette proportion reste stable. Ce plateau est un progrès par rapport aux 38% de patients contrôlés observés en 2004. Il reste néanmoins loin des 70% de patients contrôlés, qui, pour le Pr Jean-Michel Halimi (Tours, Président du CFLTHTA), constituent l’objectif du CFLHTA pour 2015 – objectif « ambitieux » a-t-il admis.
« Une reconnaissance des structures dédiées à l’HTA, et notamment des centres d’excellence, pourrait contribuer à atteindre cet objectif », a souligné le Pr Halimi.
L’HTA fait partie des facteurs de risque évitables d’Alzheimer
Ceux qui, néanmoins, y contribueront le plus sont les hypertendus eux-mêmes, qu’il s’agisse d’hypertendus qui s’ignorent, ou qui conservent des chiffres trop élevés après diagnostic.
Pour communiquer avec le grand public, le CFLHTA a décidé cette année de mettre l’accent sur le risque neurovasculaire associé à l’HTA.
A un questionnaire autoadministré de 10 questions portant sur d’éventuelles difficultés cognitives dans les six derniers mois, les réponses ont montré chez 11% des personnes de 55 à 74 ans, des plaintes qui justifieraient un bilan plus poussé. Chez les sujets hypertendus contrôlés par leur traitement, ce taux est de 15%. Il n’est pas significativement différent des 11% de la tranche d’âge 55-74 ans, prise pour référence.
En revanche, constituent des facteurs de risque significatifs (tous les p <0,001) un antécédent paternel ou maternel d’Alzheimer (19%), une HTA non contrôlée (20%), un âge > 75 ans, des antécédents CV personnels (24%) et des antécédents personnels d’AVC (34%).
Le Pr Olivier Hanon (Hôpital Broca, Paris) a rappelé à ce propos l’étude SYST-EUR2 qui, dès 2002, avait montré que le traitement de 1000 hypertendus permettait d’éviter la survenue de 20 cas d’Alzheimer [1].
Manifestement, le CFLHTA tente de faire monter la lutte contre l’HTA dans le train de la prévention des affections neurodégénératives. Mais avec les données publiées récemment dans le Lancet Neurology , il ne manque pas d’arguments [2].
Le Dr Bernard Vaïsse (Hôpital de la Timone, Marseille) a insisté sur les facteurs de risque modifiables de maladie d’Alzheimer.
L’HTA. Une HTA diagnostiquée entre 35 et 64 ans augmente le risque de maladie d’Alzheimer de 61%. A l’échelle mondiale, compte tenu de la prévalence de l’HTA, son risque attribuable dans l’Alzheimer est de 6,8%. La réduction de la prévalence de l’HTA de 25% réduirait le nombre de malades d’Alzheimer de 100 000.
Le diabète. Il augmente de 46% le risque d’Alzheimer ultérieur. Sa part attribuable dans l’Alzheimer, est de 3,1%. Sa réduction de 25% éviterait 203 000 cas d’Alzheimer.
Le tabagisme. Il augmente le risque d’Alzheimer de 59%. Sa part attribuable en population est de 13,6%. Sa réduction de 25% se solderait par un million de cas d’Alzheimer évités.
L’obésité. Presqu’à égalité avec l’HTA, elle augmente le risque d’Alzheimer de 60%. Sa part attribuable est de 4,1%. Sa réduction de 25% éviterait 203 000 cas d’Alzheimer.
La sédentarité. Elle augmente le risque d’Alzheimer de 82%. Sa part attribuable dans l’Alzheimer se monte à 20,3%. Sa réduction de 25% préviendrait 1 million de cas d’Alzheimer.
On pourrait ajouter pour finir, même si sa prise en charge ne relève pas vraiment de la médecine, le faible niveau d’éducation, dont la part attribuable dans l’Alzheimer en population générale est de 13,6%, à égalité avec le tabac.
REFERENCES :
Forette F, Seux ML, Staessen JA, et coll. The prevention of dementia with antihypertensive treatment : New evidence from the Systolic Hypertension in Europe (Syst-Eur) study. Arch Intern Med 2002;162:2046-52.
Norton S, Matthews FE, Barnes DE et coll. Potential for primary prevention of Alzheimer's disease: an analysis of population-based data. Lancet Neurol. 2014 Aug;13(8):788-94
Citer cet article: Vincent Bargoin. FLAHS 2014 : le taux d’hypertendus contrôlés stagne à 50% depuis 8 ans - Medscape - 16 déc 2014.
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