Malmö, Suède — Une nouvelle étude multicentrique suédoise rassure sur l’utilisation des nouveaux anticoagulants (NACO) dans la vraie vie, principalement sur le dabigatran [1].
L’étude de terrain publiée dans le Thrombosis Journal montre que les risques d’AVC, d’accidents ischémiques transitoires et de saignements majeurs ne diffèrent pas significativement entre les patients qui reçoivent de la warfarine et ceux qui reçoivent un NACO.
« Cette étude, largement basée sur l’utilisation du dabigatran, montre que le traitement est efficace et bien toléré dans la pratique clinique de tous les jours, sans différence statistiquement significative comparé à une cohorte recevant de la warfarine avec un bon taux de réponse en termes d’anticoagulation », indiquent les auteurs, le Dr Ashkan Labaf et coll. (Malmö, Suède).
En tout, 826 patients atteints de fibrillation auriculaire (âge moyen 70 ans) et recevant des NACO ont été identifiés à partir du registre national AuriculA. Ils ont tous été traités dans trois grands centres hospitaliers suédois (le Halland County hospital à Halmstad, le CHU Skane à Lund et le CHU Skane à Malmö) entre 2009 et septembre 2013. Leurs risques d’AVC, d’AIT et de saignements majeurs ont été comparés avec ceux d’une cohorte de patients recevant de la warfarine.
Le NACO le plus utilisé était le dabigatran (79% de la cohorte) suivi, dans une moindre mesure par le rivaroxaban. L’apixaban n’a reçu une AMM qu’ultérieurement et seuls quelques patients en prenaient.
Peu de complications et de saignements intracrâniens
« Au final, il ne ressort pas de différence significative pour les AVC/AIT et les saignements majeurs comparé à une cohorte de patients sous warfarine avec un pourcentage de temps moyen passé dans l’intervalle thérapeutique (TTR) de 76% (élevé). »
Les incidences des AVC/AIT et des saignements majeurs étaient de respectivement 1,9 et 2 pour 100 patients-années pour les NACO versus 1,5 et 2,5 pour 100 patients-années pour la warfarine.
En tout, 12 cas de saignements majeurs sont survenus : 7 gastro-intestinaux (incidence de 1,2 pour 100 patients-années), 2 hématomes sous-duraux, 1 hématome musculaire, une blessure au cuir chevelu et un saignement oculaire critique.
En termes d’effets secondaires non liés aux critères primaires de jugement, leurs taux étaient respectivement de 5,9% et de 4,4% respectivement pour 110 mg de dabigatran deux fois par jour et 150 mg de dabigatran deux fois par jour. Le plus fréquent était la dyspepsie.
Concernant la fonction rénale, elle était similaire chez les patients recevant les NACO et chez ceux recevant la warfarine. « Probablement du fait de la sélection des patients en fonction de ce critère comme l’indiquent les recommandations, mais aussi en raison du suivi régulier avec ajustement des doses ou arrêt du traitement si nécessaire, » soulignent les chercheurs.
« Avec un suivi régulier de la fonction rénale et un ajustement des doses si nécessaire, le taux de complications est faible et les saignements intracrâniens rares », concluent le Dr Labaf et coll.
Comparaison avec les résultats de RE-LY
Dans l’essai randomisé RE-LY , le taux d’AVC/AIT était de 1,53% par an dans le groupe qui recevait 110 mg de dabigatran deux fois par jour. Par comparaison dans l’étude suédoise, le taux était de 3,8%.
Concernant les saignements majeurs, dans RE-LY, les taux étaient de 2,71% par an dans le groupe qui recevait 110 mg de dabigatran deux fois par jour. Et, dans l’étude suédoise, le taux était de 3,3 %.
Les auteurs expliquent ces différences par le fait que les patients de l’étude suédoise étaient plus âgés que ceux de l’étude RE-LY et donc plus sujets aux comorbidités associées à l’âge et donc à ce type de complications. Une étude de sous-groupe de RE-LY avait, d’ailleurs, montré que les sujets de plus de 75 ans étaient plus sujets aux saignements majeurs que les plus jeunes, après ajustement pour la fonction rénale.
Moins d’effets secondaires et moins de sorties d’étude que dans RE-LY
En revanche, les effets secondaires, hors AVC/AIT ou saignements, étaient moins fréquents dans « la vraie vie » que dans l’essai randomisé RE-LY (dyspepsie 1,7% vs 11% dans les groupes dabigatran).
Aussi, le taux de sorties d’étude était de 6,5% en pratique clinique et de 15% dans l’essai RE-LY.
Le taux de sortie plus important dans l’étude RE-LY pourrait être attribuable « à la vigilance accrue des patients testant une nouvelle molécule. Mais, le plus faible taux de sorties d’études dans la vraie vie est, de toute façon, rassurant », indiquent les auteurs.
Le Pr Svensson est conseiller et orateur pour Boehringer Ingelheim, BMS/Pfizer et Bayer. |
REFERENCE:
Labaf A, Carlwe M, Svensson PJ. Efficacy and safety of novel oral anticoagulants in clinical practice: a report from three centers in Sweden. Thrombosis Journal 2014
Citer cet article: Aude Lecrubier. Dabigatran dans la vraie vie : un peu moins performant que dans RE-LY mais sans excès de risque - Medscape - 10 déc 2014.
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