Paris, France – Faut-il ou non réanimer un patient victime d’un arrêt cardiaque traumatique (ACT) en asystolie ? La question n’est toujours pas tranchée, d’où l’enjeu des données recueillies dans le registre national des arrêts cardiaques RéAC, présentée lors du congrès Urgences 2014 [1].
« Aux Etats-Unis, les ACT en asystolie ne sont pas considérés comme dignes d’être réanimés », a rappelé le Dr Karim Tazarourte (CH de Melun), qui présentait l’étude Réac au nom de Joséphine Escutnaire (GR-Registre électronique des arrêts cardiaques à Loos). Il y est recommandé de stopper ou de s’abstenir de toute réanimation cardiopulmonaire (RCP) si le patient n’a pas de retour à une circulation spontanée avant réanimation avancée.
A l’inverse, « le point de vue européen c’est plutôt qu’on peut en tirer d’affaire, avec un score neurologique compatible avec une insertion dans la vie sociale ».
Les recommandations ERC (European Resuscitation Council) et ILCOR (International Liaison Committee on Resuscitation) suggèrent ainsi la mise en place de la RCP comme pour un arrêt cardiaque non-traumatique.
Mais ces deux positions ne reposent que sur des travaux parcellaires. Le registre Réac a permis de mener une étude comparative, prospective multicentrique (221 SAMU-SMUR) afin d’éclaircir la question.
Sur 100 patients, 2 sont en vie à J30, 6 peuvent donner leurs organes
Les données recueillies entre le 1er juillet 2011 et le 10 décembre 2013 ont permis l’analyse de 2 090 arrêts cardiaques traumatiques en asystolie.
Comparativement aux arrêts cardiaques médicaux, ces arrêts cardiaques touchent des personnes significativement plus jeunes (48 ans contre 66 ans), davantage d’hommes (76,6% contre 62,8%) et bénéficient moins fréquemment de manœuvres de réanimation préhospitalières.
Un témoin est moins souvent présent et la réanimation de base moins souvent entreprise (22,6% contre 31,2%). Quand elle a lieu, elle est en outre moins souvent maintenue jusqu’à l’arrivée des secours (70% contre 83%).
De même, une réanimation avancée est moins souvent entreprise par le SMUR (56,4% contre 62,3%). En revanche, les délais d’intervention du SMUR sont plus courts (21 minutes contre 19 minutes).
Le mauvais pronostic se confirme avec seulement huit patients sur cent admis en réanimation mais le Dr Tazarourte souligne que parmi eux « on peut en sauver deux (2,1%) à un mois, dont au moins un (1,5%) avec un excellent score neurologique et on permet à six autres d’être altruistes en rendant possible la procédure de don d’organes ».
De quoi modifier les nouvelles recommandations attendues en 2015 ? Pas encore. « Des études complémentaires pour identifier les facteurs de bon pronostic fonctionnel sont indispensables », estime le spécialiste.
L’idée est notamment de distinguer les noyades, qui sont pour l’instant incluses dans les statistiques présentées, des cas de traumas pénétrants en asystolie qui semblent de plus mauvais pronostic.
Par ailleurs, d’autres informations utiles semblent encore manquer et en particulier la comparaison des taux de survie à 6 mois plutôt qu’à 1 mois et les raisons qui poussent les SMUR à entreprendre ou non une réanimation.
Cette communication a obtenu l’U d’or « médecin » délivré par la Société française de médecine d’urgence.
REFERENCE :
CP135. Arrêts cardiaques traumatiques en asystolie à l’arrivée des secours : la réanimation préhospitalière n’est pas futile. Tazarourte K. pour Escutnaire J. Jeudi 5 juin 2014, Communications libres médecin Session « U » d’Or.
Citer cet article: Adélaïde Robert-Géraudel. Réanimer un arrêt en asystolie avant l’arrivée des secours n’est pas futile - Medscape - 22 sept 2014.
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