Plaque instable : l’essai SOLID-TIMI 52 devrait sonner la fin du darapladib

Aude Lecrubier

Auteurs et déclarations

1er septembre 2014

Barcelone, Espagne –En mai dernier, GlaxoSmithKline annonçait l’échec du darapladib, médicament destiné à freiner l'évolution de l'athérosclérose, dans l’étude SOLID-TIMI 52 (Stabilization of Plaques Unsing Darapladib-Thrombosis in Myocardial Infarction 52).

Les résultats détaillés de cet essai de phase III réalisé en post-syndrome coronarien aigu (SCA) ont été présentés lors du congrès de l’European Society of Cardiology et publiés simultanément dans le JAMA [1,2].

Cet échec, qui fait écho à celui du varespladib (Anthera Pharmaceuticals), autre inhibiteur de la PLA2-Lp, pourrait bien sonner le glas de cette classe thérapeutique.

Pourquoi le darapladib ?
Des travaux expérimentaux ont suggéré que l'enzyme phospholipase A2 associée aux lipoprotéines (PLA2-Lp) était impliquée dans le développement de la plaque d'athérome et pouvait contribuer à l'instabilité des plaques via des processus inflammatoires [3]. En outre, des études épidémiologiques ont montré que des taux élevés de PLA2-Lp étaient associés à un risque accru d'événements coronariens [4]. Or, le darapladib est un inhibiteur direct de la PLA2-Lp capable de réduire l'activité de l'enzyme dans le plasma et au niveau des plaques d'athérome. En 2008, l'étude IBIS-2 (Integrated Biomarker and Imaging Study-2) a montré des effets favorables du darapladib sur un certain nombre de paramètres de la stabilité de la plaque, évalués par échographie intravasculaire (IVUS). Malheureusement, depuis, les essais de prévention cardiovasculaire avec le darapladib se sont révélés négatifs.

 

Dans SOLID-TIMI 52, le Pr Michelle L. O’Donoghue et coll. (Brigham and Women’s Hospital, Boston, Etats-Unis) ont randomisé 13 026 patients dans les 30 jours suivant leur hospitalisation pour un SCA pour recevoir soit une dose quotidienne de darapladib (6504), soit un placebo (6522) en complément d’un traitement classique. L’étude multicentrique (868 centres) a été menée dans 36 pays.

Pr Michelle L. O'Donoghue

Les patients ont été suivis pendant en moyenne 2,5 ans.

Aucun bénéfice clinique

A la fin du suivi, le critère primaire composite associant les décès des suites d’une maladie coronarienne, les infarctus du myocarde ou les revascularisations en urgence pour infarctus du myocarde est survenu chez 903 des 6504 participants du groupe darapladib et chez 910 des 6522 participants du groupe placebo (16,3 % vs 15,6 % à 3 ans. RR= 1, IC 95% : 0,91 à 1,09 ; p=0,93)

En parallèle, le critère composite associant décès d’origine cardiovasculaire, infarctus du myocarde ou AVC est survenu chez 824 patients du groupe « darapladib » et chez 838 patients du groupe placebo (15% vs 15% à 3 ans. RR= 0,99, IC 95% : 0,9 à 1,09 ; p=0,78).

Enfin, les taux de mortalité toutes causes étaient similaires dans les deux groupes (darapadib :7,3% vs placebo : 7,1%)

Concernant les effets indésirables, l’incidence des événements graves était similaire dans les deux groupes. En revanche, les patients du groupe darapladib ont rapporté plus de problèmes d’odorat : principalement odeurs de selles, d’urine, de peau (11,5% vs 2,5%) et plus de diarrhées (10,6% vs 5,6%).

« Ces résultats ne sont pas en faveur d’une stratégie thérapeutique ciblée de l’inhibition de la PLA2-Lp par le darapladib chez les patients stabilisés après un SCA», a conclu le Pr O’Donoghue lors d’une présentation à la presse.

Une succession d’essais négatifs

L’échec du darapladib après un SCA, suit celui annoncé en 2013 chez les coronariens stables dans l’essai de phase III STABILITY qui n’avait pas atteint ses objectifs sur le critère primaire associant décès cardiovasculaire, IDM et AVC (RR=0,94, p=0,20). Cependant, dans cet essai, le darapladib avait réduit le risque de deux critères de jugement secondaires : les événements coronariens majeurs et le nombre total d’événements coronariens, encourageant ainsi les chercheurs à tester la molécule dans l’essai SOLID-TIMI 52.

 
SOLID-TIMI 52 : Another one bites the dust - Pr Robert Califf.
 

Lors de la discussion des résultats en session « hotline », le Pr Robert Califf (Durham, Etats-Unis) a proposé un début d’explication aux résultats décevants de SOLID-TIMI 52 par rapport aux espoirs suscités par les critères secondaires de STABILITY. Il a souligné que les courbes divergeaient légèrement à deux ans suggérant qu’il était possible que les effets sur la plaque prennent plus de temps à se traduire par un bénéfice (comme dans les essais LIPID).

Toutefois, les résultats négatifs de SOLID-TIMI 52  font également écho à ceux du varespladib (Anthera Pharmaceuticals), autre inhibiteur de la PLA2-Lp, dans l’essai VISTA 16 (Vascular Inflammation Suppression to Treat Acute Coronary Syndrome for 16 Weeks) en post-SCA. Les résultats de l’essai, arrêté prématurément, et présentés lors du congrès de l’American Heart Association, ont montré que le varespladib n’apportait aucun bénéfice clinique et qu’il pourrait même augmenter le risque d’infarctus du myocarde.

Est-ce donc la fin de cette potentielle classe thérapeutique ?  L’intitulé de la présentation du Pr Califf : « SOLID-TIMI 52 : Another one bites the dust », semble parler de lui-même.

Selon le chercheur, «  la PLA2-Lp est un marqueur de risque mais peut-être pas un facteur de risque. »

L'essai a été financé par GlaxoSmithKline. Le Pr Michelle L. O'Donoghue a reçu des bourses de GSK, AstraZeneca et Eisai. Elle a reçu des honoraires de diaDexus. Le Pr Robert M Califf a des liens d'intérêts multiples avec GSK. Les liens d'intérêt des auteurs sont indiqués dans la publication.

 

REFERENCES :

  1. The stabilization Of pLaques usIng Darapladid-Thrombolysis in Myocardial Infarction 52 (SOLID-TIMI 52) trial : Primary results and discussion. Hot Line : Coronary artery disease and lipids. ESC congress. 31 août 2014

  2. O'Donoghue ML, Braunwald E, White HD et coll.  for the SOLID-TIMI 52 Investigators. Effect of Darapladib on Major Coronary Events After an Acute Coronary Syndrome: The SOLID-TIMI 52 Randomized Clinical Trial. JAMA. 2014 Aug 31. doi: 10.1001/jama.2014.11061

  3. Mallat Z, Lambeau G, Tedgui A. Lipoprotein-associated and secreted phospholipases A2 in cardiovascular disease. Circulation. 2010;122(21):2183-2200

  4. Thompson A, Gao P, Orfei L, et al; Lp-PLA(2) Studies Collaboration. Lipoprotein-associated phospholipase A(2) and risk of coronary disease, stroke, and mortality. Lancet. 2010;375(9725):1536-1544

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