Microbiologie des rhino-sinusites
Les caractéristiques microbiologiques des sinusites évoluent en différentes phases (Figure 2).
Figure 2. Les virus et bactéries en cause dans les otites et les sinusites
Dans les premiers temps de l’évolution (rhino-sinusite aiguë) se sont généralement des virus qui sont en cause (rhinovirus, adénovirus, influenza ou parainfluenza) et ce pour une durée allant jusqu’à 10 jours.(2) Dans certains cas, il peut survenir secondairement une infection bactérienne aiguë. Les bactéries les plus souvent en cause sont : Streptococcus pneumoniae, H influenzae, et Moraxella catarrhalis. Si cet épisode aigu ne guérit pas, des micro-organismes aérobies ou anaérobies de la flore oropharyngée (S aureus, par exemple) peuvent coloniser les sinus et devenir prédominants avec le temps.(2,5-13)
La prédominance des anaérobies dans les sinusites chroniques a été prouvée à la fois chez l’enfant (11,12,14) et chez l’adulte.(5,9) Dans une série de cultures d’aspirations endoscopiques répétées de sinus pharyngés chez 5 patients dont les symptômes persistaient en dépit du traitement antibiotique, différentes bactéries anaérobies résistantes ont été retrouvées au cours de l’évolution : Prevotella, Porphyromonas, Fusobacterium nucleatum et Peptostreptococcus.(13)
Parmi les facteurs qui favorisent l’émergence d’anaérobies on peut citer :
• Une pression de sélection du fait de l’utilisation d’antibiotiques permettant à des micro-organismes résistants de survivre ;
• L’inflammation et l’œdème des muqueuses qui limitent la vascularisation des sinus et, de ce fait, la présence d’oxygène. (15);
• La consommation d’oxygène par les bactéries aérobies qui abaisse le pH sinusien (16);
• L’expression de facteurs de virulence par les anaérobies.(17)
Les bacilles Gram négatifs aérobies tels que Pseudomonas aeruginosa, Klebsiella pneumoniae, Enterobacter, Proteus mirabilis, et Escherichia coli, sont impliqués dans le développement de sinusites chroniques, en particulier chez des patients aux antécédents médicaux tels qu’une mucoviscidose (Pseudomonas est le plus souvent en cause), un diabète ou une immunodépression.(4,18,19)
Les bacilles Gram négatifs aérobies se développent le plus souvent chez des patients qui ont été traités de façon extensive et répétée par des antibiotiques ou chez ceux qui ont subi une chirurgie des sinus.(19,20) Tous les S aureus - y compris ceux qui sont résistants à la méthicilline (SARM) - peuvent aussi coloniser la muqueuse nasale et ils sont impliqués occasionnellement dans des rhino-sinusites chroniques.(21,22) Staphylococcus epidermidis peut aussi coloniser les cavités nasales mais son rôle physiopathologique dans les sinusites chroniques doit encore être précisé.(19) Les infections poly-microbiennes sont fréquentes et elles sont synergiques par nature.(17)
Les champignons peuvent induire des rhino-sinusites allergiques, une colonisation fongique ou des sinusites invasives. Les sinusites fongiques surviennent généralement chez des patients immunodéprimés et elles peuvent soit évoluer rapidement soir rester quiescentes. Les sinusites d’origine dentaire sont une entité bien définie et elles représentent 10 à 12 % des sinusites maxillaires(23). Elles peuvent évoluer de façon aiguë ou chronique. Du fait de leur physiopathologie, les sinusites d’origine dentaire sont polymicrobiennes aéro-anaérobies et leur flore correspond à celle qui est présente dans la cavité orale.(23) Le lien entre les abcès périapicaux et les rhino-sinusites a été établi à l’occasion d’une étude qui comparait la composition microbienne de ces deux entités chez 5 patients.(24)
Les antibiotiques sont-ils nécessaires ?
Le but du traitement médical est d’améliorer le drainage des sinus, de réduire l’inflammation chronique et d’éradiquer les pathogènes. On dispose actuellement de données limitées sur l’intérêt d’un traitement antibiotique exclusif. Aujourd’hui, il est plutôt recommandé d’utiliser des antimicrobiens associés à des glucocorticoïdes (topiques ou systémiques), parfois d’autres agents thérapeutiques. Bien que les études sur le traitement médical dans cette indication manquent, la plupart des experts estiment que les antibiotiques sont indispensables. Lorsque le traitement de première intention n’améliore pas les symptômes, le patient doit être adressé pour avis à un ORL afin de préciser l’intérêt éventuel d’un geste chirurgical.
Des études randomisées effectuées chez des adultes afin de comparer différents antibiotiques n’ont pas permis de conclure à la supériorité de l’un par rapport aux autres.(25,26) Toutefois, des études observationnelles suggèrent que les antibiotiques actifs sur les anaérobies pourraient se révéler plus efficaces.(9,27) Une étude randomisée sur plus de 200 patients adultes atteints de rhino-sinusite chronique a montré un taux de rechute significativement plus important dans le groupe traité par céfuroxime comparativement au groupe traité par l’association amoxicilline/acide clavulanique (7% contre 0 %), suggérant ainsi que l’action anti-anaérobie est particulièrement importante à prendre en compte.(25)
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Citer cet article: Cas clinique : comment diagnostiquer et traiter une rhino-sinusite chronique ? - Medscape - 18 sept 2014.
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