Méduses : les dangereuses physalies désormais sur la côte atlantique

Dr Isabelle Catala

Auteurs et déclarations

16 juillet 2014

Bordeaux, France—« On ne peut plus parler d’une année à méduses : depuis 2008, toutes les années sont des années à méduses sur la côte Atlantique. Ainsi, si en 1998 aucune victime n’était recensée, en 2008, un cas collectif a concerné 40 personnes, puis en 2010, on a déploré 154 victimes en 3 mois puis 885 en trois mois l’année suivante », raconte le Dr Magali Labadie (Centre antipoison et de toxicovigilance de Bordeaux) à l’occasion des 15 èmes Journées Nationales d’Infectiologie (JNI). [1,2]

A quoi est liée cette prolifération sur la côte Atlantique ? Difficile de répondre : réchauffement, surpêche… Ce phénomène est généralisé et on parle de plus en plus de « gélification des océans ».

La physalie, méduse d’Australie et du Golfe du Mexique

Sur la côte Atlantique, la plupart des cas rapportés au Centre antipoison et de toxico-vigilance Aquitaine-Poitou-Charentes (CAPTV/CHU Bordeaux) sont en rapport avec une envenimation  à une physalie.

Un organisme appelé abusivement méduse

Cette méduse rose-bleu-violette, encore appelée galère portugaise, est dotée d’un voile de 15 à 20 cm et d’un flotteur, duquel partent de nombreux et longs tentacules (jusqu’à 40 mètres de long). Ses lieux de vie habituels avant les années 2000 étaient l’Australie et le Golfe du Mexique.

Appelée abusivement méduse, il s’agit en fait d’un méta-organisme constitué de plusieurs colonies de cnidaires. La famille des cnidaires recense près de 11 000 espèces allant des méduses (méduse mauve, chevelue, aurélie, jaune…) aux anémones de mer.

Son appareil venimeux contient un réseau de cellules spécifiques : les cnidoblastes qui sont constitués d’un cnidocyste (vacuole ou capsule urticariante qui libère du venin au moindre contact) et d’un cnidocil (prolongement cytoplasmique excitable).

 

En 2011, le centre antipoison de l’hôpital de Bordeaux (InVS Aquitaine/CAPTV/CRS des plages) a mis en place l’étude PHYSATOX [3] afin de préciser l’épidémiologie des envenimations dans cette région. Entre le premier juin 2011 et le 30 septembre de la même année, les postes de secours des plages et les SAMU côtiers avaient comme consigne de signaler tous les cas au centre antipoison qui a ensuite analysé les données en lien avec la CIRE Aquitaine.   

Etaient considérés comme cas bénins des personnes qui présentaient des signes cutanés caractéristiques (présence de tentacules, signes cutanés en collier de perle évolutifs)  associés à des douleurs immédiates et intenses. Les cas graves devaient aussi présenter des signes cutanés mais ils devaient être associés à au moins un signe général: perte de connaissance, douleur thoracique, hypo ou hypertension artérielle, gêne respiratoire, vomissements, douleurs abdominales aiguës, crampes musculaires.

885 patients en 3 mois, 15 % de cas graves

« En 2011, les premiers cas ont été rapportés dès le début du mois de juin, mais c’est de mi-juillet à début août que, régulièrement, des cas étaient signalés,  plus de 90 au total. Le nombre a ensuite baissé nettement et après le 28 août, aucune envenimation n’a été recensée », explique le Dr Labadie.

« Dans notre série, les 885 patients ont présenté des douleurs immédiates et intenses (EVA >7 pour 68 % des patients). Et les baigneurs sont restés algiques pendant 2,2 heures en moyenne. Au total, 15 % d’entre eux ont présenté des signes systémiques de gravité qui ont été immédiats pour les deux tiers d’entre eux. Lorsque les signes étaient retardés, ils apparaissaient dans un délai de 15 minutes. Il s’agissait de signes digestifs pour 55 % des patients, de signes respiratoires pour 34 % et neurologiques ou neuromusculaires pour 46 % », continue le Dr Labadie.

Les méduses peuvent aussi être à l’origine de symptômes prolongés notamment les douleurs souvent très inconfortables. Une étude va être mise en place en collaboration avec l’INSERM (PhysaReV) pour déterminer les composants de venins de méduse à l’origine des signes aigus graves et chroniques.

Que faire en cas de piqûre de physalie ?

« Actuellement, nous ne disposons d’aucun traitement spécifique de l’envenimation. Après piqûre, les tentacules doivent être ôtées. Utiliser de la mousse à raser semble être une option possible recommandée par les surfeurs d’Australie (voir Que faire en cas de brûlure de physalie ?) ou du sable sec mais surtout pas de l’eau douce), puis la peau doit être grattée (avec un grattoir ou du sable) et rincée abondamment à l’eau de mer », précise le Dr Labadie. 

 

Références
  1. Bernadet P, Dondia D, Labadie M, Penouil F. L’année des méduses. 15èmes Journées Nationales d’Infectiologie. Bordeaux, 11-13 juin 2014.

  2. Labadie M, Albade B, Ong N et coll. Portuguese man of war (Physalia physalis) envenomation on the Aquitaine coast of France: an emerging health risk. Clin Toxicol (Phila). 2012 Aug;50(7):567-70. doi: 10.3109/15563650.2012.707657.

  3. Etude Phys@tox : partenariat InVS et CRS.

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