Paris, France – RE-ACTUALISATION - Compte tenu du risque potentiel d’infections à virus Zika – y compris en métropole – lié à la présence de plus en plus accrue de vecteurs – les moustiques du genre Aedes – et d’une épidémie qui sévit actuellement au Brésil, le Haut Conseil de la Santé Publique (HCSP) vient d’émettre des recommandations de prise en charge des patients qui pourraient en être atteints. Sont aussi rappelés les modalités de transmission, la situation épidémiologique, l’expression clinique des infections par ce virus et les moyens de diagnostic biologique. En effet, après s’être propagé en Micronésie, en Polynésie française, et en Nouvelle-Calédonie, le virus Zika sévit actuellement au Brésil, où une épidémie a été identifiée. Compte tenu de la présence des moustiques vecteurs – dont le moustique-tigre – et des flux de voyageurs, le HCSP estime que le risque d’introduction de la maladie Zika dans les départements français d’Amérique (Guadeloupe, Guyane, Martinique), mais aussi à La Réunion et à Mayotte – où Aedes albopictus est implanté – est réel. La métropole n’est pas en reste puisque, selon le HCSP toujours, « les conditions pour une transmission autochtone du virus Zika sont réunies, dans les départements où le moustique vecteur est présent. » Rappelons que le virus Zika est un arbovirus et que sa transmission est presque exclusivement vectorielle par les moustiques du genre Aedes , par ailleurs vecteurs de la dengue et du chikungunya. SL. |
Bordeaux, France; 25 juin 2014 -- « Entre octobre 2013 et avril 2014, au moins 32 000 personnes vivant en Polynésie Française ont été infectées par le virus Zika. Ce chiffre a été obtenu par extrapolation à partir des 8 750 cas suspects rapportés par les médecins et professionnels de santé du réseau sentinelle élargi et des 383 cas confirmés sérologiquement. On peut donc estimer que le taux d’attaque de cette affection est de 12 % en moyenne (10 à 40 % selon les archipels) », a analysé le Dr Henri-Pierre Mallet (bureau de veille sanitaire de la Polynésie Française) lors des Journées Nationales d'Infectiologie 2014 [1].
« Dans ce territoire qui compte 268 270 habitants répartis sur 76 îles, autonome en santé par rapport à la métropole, la plupart des patients ont présenté des formes pauci ou asymptomatique (50 % de porteurs sains chez les donneurs de sang). Mais on déplore quand même 42 cas de syndrome de Guillain Barré et 25 de manifestations neurologiques auto-immunes qui semblent en lien avec l’infection ».
Un arbovirus transporté par les moustiques
Tout a commencé en octobre 2013 par le signalement de cas de syndromes éruptifs peu fébriles par les médecins et le personnel des dispensaires de Tahiti, Moorea et des Marquises.
Ces signes ne correspondaient pas à une infection par la dengue qui survient de façon régulière dans l’archipel ni au chikungunya présent en Nouvelle Calédonie en 2011 et 2013.
Dans ce territoire où sont présent des arthropodes tels que Aedes aegypti et Aedes polynesiensis une recherche d’arbovirus a été effectuée par l’Institut Louis Malardé (Tahiti).
Ce travail a aboutit fin octobre 2013 à l’indentification par mise en évidence d’ARN viral du virus Zika, un arbovirus de la famille des flavivirus, transporté par les vecteurs présents dans cette région et proche des virus de l’encéphalite de Saint Louis et des virus de la dengue.
Le réseau sentinelle élargi de surveillance syndromique a été activité. Dans un premier temps, des dosage PCR ont été effectués sur les patients signalés comme potentiellement infectés par les médecins du réseau. De 41 à 52 % de patients suspects étaient positifs en PCR. Tous les cas suspects étaient suivis à l’aide d’une fiche comportant des renseignements cliniques initiaux et les patients ont été contactés par téléphone à J7, J30 et J60.
Des éruptions, des œdèmes, une hyperhémie conjonctivale
Classiquement, l’infection par le virus Zika se caractérise par une éruption maculo-papuleuse érythémateuse, associée à une fièvre modérée (moins de 38°5) et à au moins deux autres signes parmi l’hyperhémie conjonctivale, les arthralgies ou myalgies et les oedèmes des mains ou des pieds.
L’analyse a postériori des fiches cliniques de surveillance a montré qu’en Polynésie Française, parmi les signes cliniques, l’éruption maculo-papuleuse était la plus fréquente (93 % des patients durée moyenne 5,2 jours), suivie de la fièvre ressentie (72 % durée moyenne 2,9 jours), les arthralgies (65 %, 6,8 jours) et l’hyperhémie conjonctivale (63 %, 3,5 jours). D’autres signes cliniques ont été rapportés : asthénie (78 %), œdème des mains et des pieds (47 %), céphalées (46 %), myalgies (44 %), diarrhées et vomissements (28 %), signes ORL (23 %), douleurs rétro-orbitaires (16%), adénopathies (15 %) et ulcérations buccales (4 %).
Les articulations les plus touchées étaient les mains (30 %), les pieds (17 %), les genoux (16 %), les doigts (10 %) et les poignets (10 %).
Ce sont les femmes qui étaient plus sujettes aux oedèmes (52 contre 38 %), et les plus âgés qui souffraient plus d’arthralgies et d’hyperhémie conjonctivale.
42 cas de syndrome de Guillain Barré en rapport avec Zika
« Dès la mi-novembre, nous avons été alertés par des hospitalisations pour syndrome de Guillain-Barré ou pour d’autres complications neurologiques auto-immunes dans les suites d’une infection par Zika. En Polynésie Française, en moyenne 5 cas de Guillain Barré sont décrits chaque année. Pendant tout le mois de décembre 2013, chaque semaine c’est plus de 6 patients qui étaient hospitalisés pour des signes neurologiques graves », analyse le Dr Mallet.
Au total, en trois mois, 42 personnes atteintes de Guillain-Barré et 25 de complications neurologiques ont été admises dans les hôpitaux du territoire.
Il s’agissait d’hommes en majorité (74 %), jeunes (47 ans d’âge moyen), tous nés en Polynésie Française. Ils avaient été atteints d’un syndrome viral de 2 à 23 jours avant l’apparition des signes neurologiques pour 88,1 % d’entre eux.
La plupart des patients n’ont été amis qu’en service de médecine polyvalente (pour une durée moyenne de 11 jours), mais 10 d’entre eux ont dû être traités en réanimation (pour une durée médiane de 45 jours).
La cause exacte de cette flambée de Guillain Barré n’a pas été détectée. Une étude est en cours afin d’établir un éventuel lien entre la survenue des signes neurologiques et certains profils spécifiques d’anticorps antigangliosides.
REFERENCE
1. Mallet PH. Emergence du virus Zika en Polynésie Française. JNI 2014.
Citer cet article: Le virus Zika se rapproche : le HCSP actualise ses recommandations - Medscape - 11 août 2015.
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