Paris, France -- Le congrès EuroPCR 2014 a consacré 60 sessions à la dénervation rénale. Après l’échec de SYMPLICITY HTN-3 on aurait pourtant pu croire que l’enthousiasme pour cette technique allait retomber. Il n’en n’est rien. Et les pionniers de la dénervation ont analysé les raisons de l’échec de cette étude qui allait à l’inverse des résultats obtenus en préclinique et lors des phases 1 et 2. Selon eux, l’échec est notamment lié au choix du traitement médicamenteux, à la population des patients et aux opérateurs. Ils ont proposé de nouvelles pistes d’études. Bref, la dénervation rénale serait tout sauf l’échec annoncé au moment de la publication des résultats de SYMPLICITY HTN-3…. Synthèse des arguments des « pro-dénervation » lors d’une session consacrée à ce que « devraient être les conséquences cliniques » des résultats [1].
Un retour en arrière sur la méthodologie
Dans un premier temps, le Pr Atul Pathak (Toulouse) est revenu sur la méthodologie de l’étude SYMPLICITY HTN-3, « un choix particulier qui a fortement pesé sur les résultats finaux ».
Des essais préalables – d’abord observationnels, puis un « first in man », suivies d’études ouvertes, phase 1 et 2 – avaient montré qu’une baisse de la pression artérielle pouvait être obtenue par dénervation rénale.
Restait à confirmer ces données à l’occasion d’un travail randomisé, prospectif, en aveugle et contre placebo (procédure simulée « sham »).
« L’étude SYMPLICITY HTN-3 avait pour but de répondre à deux questions : d’une part l’efficacité du traitement par dénervation en prenant en compte la pression artérielle systolique au cabinet du médecin à 6 mois. Et d’autre part, la sécurité d’utilisation de la technique à partir de l’analyse d’un critère composite d’évènements à 6 mois. Ces critères ont été choisis en se fondant sur les résultats des deux études SYMPLICITY HTN-1 et SYMPLICITY HTN-2 », explique le Pr Pathak.
Dans l’étude de phase 3, au total, 535 sujets ont été randomisés. Parmi eux, 169 sujets du groupe « sham » et 350 sujets du groupe dénervation ont pu être évalués à 6 mois.
Dans le premier des deux groupes, la baisse de la pression artérielle systolique au cabinet s’est établi à -11,74 +/- 25,94 mmHg contre -14,13 +/-23,93 mmHg dans le groupe dénervation (p=0,26).
L’analyse de la différence en terme de mesure de la pression artérielle en ambulatoire sur une durée de 24 h ne montre, elle aussi, aucun bénéfice du traitement par dénervation.
Par ailleurs, aucune différence significative en termes de sécurité d’utilisation n’a été notée entre les deux groupes.
Des différences liées aux caractéristiques de la population
Le Pr Pathak souligne un certain nombre de différences entre les patients inclus dans SYMPLICITY HTN-2 et HTN-3.
L’étude SYMPLICITY HTN-3 a été menée dans le but d’obtenir une autorisation de mise sur le marché aux Etats-Unis. Elle a donc inclus 30 % de patients d’origine afro-américaine, ce qui n’était pas le cas de l’étude SYMPLICITY HTN-2 (2 %).
Par ailleurs, SYMPLICITY HTN-3 a incus plus de femmes (40 % contre 30 %), des personnes dont l’IMC était plus important (34,2 +/- 6,5 contre 31 kg/m 2), plus de diabétiques de type 2 (69,2 % contre 40 %), et plus d’hyperlipidémiques (69,2 % contre 52 %).
Enfin, pour être inclus dans l’étude, les patients devaient être stables sous traitement depuis au moins 6 semaines et bénéficier du traitement optimal possible. Or, pendant la durée du suivi, deux patients sur cinq ont changé de traitement médical, dont 69 % en raison d’une inefficacité thérapeutique (et non d’effets indésirables) à l’occasion de l’une des 8 consultations de suivi.
L’analyse en sous-groupe révèle que la dénervation est plus efficace chez les caucasiens, les personnes recevant un traitement par anti-aldostérone, chez les personnes qui ne souffrent pas d’insuffisance rénale et chez les moins de 65 ans.
Des différences liées à la procédure
En ce qui concerne la procédure, l’une des particularités de l’étude SYMPLICITY HTN-3 est le manque d’homogénéité de la réalisation du geste : le nombre d’ablations pouvait être de moins de 8 chez certains patients et de plus de 16 chez d’autres, en passant par toutes les valeurs intermédiaires. Le nombre de quadrants dans lesquels ces ablations était réalisées était lui aussi variable. En outre, tous les impacts de dénervation n’ont pas été réalisés au contact même du vaisseau.
Or c’est chez les patients qui ont eu le plus d’ablations que la baisse de la pression artérielle a été la plus remarquable (-14,3 mmHg lorsque 15 ablations étaient réalisées, -21,1 mmHg pour 16 ablation et - 6 mmHg pour 8 ablations).
A quoi est due cette variabilité ?
Pour le Pr Pathak, « en grande majorité à une formation disparate des cardiologues interventionnels puisque en moyenne chacun des opérateurs a réalisé 3,3 gestes d’ablation, et 35 % un geste unique. Le nombre de procédures réalisées dans chacun des centres est aussi essentiel puisque dans SYMPLICITY HTN-3, 4,7 gestes étaient pratiqués par centre contre 8,6 dans SYMPLICITY HTN-1 ».
« A l'avenir les essais sur ce sujet devront prendre en compte les défauts méthodologiques de SYMPLICITY HTN-3: choix de la technique de mesure de la pression artérielle, sélection de patients, standardisation de la procédure, rigueur sur la prescription médicamenteuse (recours moins fréquent aux modifications de traitement et surveillance de la compliance des patients du groupe dénervation) et suivi à plus long terme des patients des deux groupes », a conclu le Pr Pathak.
Le Pr Atul Pathak déclare avoir reçu des invitations ou honoraires de Terumo, SJM, Medtronic, Recor Medical, Sorin, Boston Scientific et CVRx. |
REFERENCE :
1 Pathak A. Trial review : the data, the statistics, the conclusions. Session SYMPLICITY HTN-3 : what should be the impact on clinical practice ? EuroPCR 2014.
Après la négativité de SYMPLICITY, la feuille de route de Medtronic
Dénervation rénale : pas mieux que le placebo dans SYMPLICITY HTN-3
Dénervation rénale : comment interpréter la négativité de SYMPLICITY 3 ?
Dénervation rénale : comment interpréter la négativité de SYMPLICITY 3 ?
Résultats négatifs pour la dénervation rénale dans SYMPLICITY HTN-3
Citer cet article: HTA : Après SYMPLICITY, les arguments des « pro-dénervation » - Medscape - 3 juin 2014.
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