Plus de cancers tête et cou chez les cardiologues interventionnels ?

Catherine Desmoulins, Shelley Wood

Auteurs et déclarations

28 avril 2014

Buenos Aires, Argentine – Durant le congrès latino-américain de cardiologie interventionnelle SOLACI 2014, une équipe israélienne qui surveille depuis plusieurs années la survenue de cancers chez les radiologues et cardiologues interventionnels a présenté de nouveaux résultats assez inquiétants.  

Dès 2012, l’équipe du Dr Ariel Roguin (Haïfa, Israël) rapportait 9 cas de cancers de la tête et du cou dans cette population mais cette fois-ci c’est un total de 36 cas qui a été présenté, comprenant 28 cardiologues interventionnels, 2 électrophysiologistes et 6 radiologues interventionnels. Ces tumeurs étaient principalement des glioblastomes multiformes (50%), des astrocytomes (7%) et des méningiomes (14%).

Toutes ces personnes avaient travaillé en moyenne 23 ans (de 12 à 32 ans) dans des laboratoires de cathétérisme avec exposition aux radiations. Rappelons que les dispositifs de protection protègent le thorax et la thyroïde mais pas le crâne.

« Le haut du corps du cardiologue interventionnel par opposition au reste du corps n’est pas protégé durant les procédures irradiantes. On peut estimer que cette région reçoit de 20 à 30 mSv par an, soit 10 fois plus que le thorax qui, lui, est protégé. La partie gauche de la tête est deux fois plus exposée que la droite car le cardiologue se tient debout du côté droit du patient durant la procédure avec la source de rayonnement à sa gauche. Or, sur les 30 cas pour lesquels la latéralité de la tumeur était connue, la majorité (86%) était du côté gauche. Or dans une population non sélectionnée, ces tumeurs sont distribuées de manière comparable de chaque côté du crâne» a commenté le Dr Roguin.

Ce dernier a fait part du grand nombre de mails reçus de cardiologues interventionnels après sa première publication car ce type de tumeurs n’a jamais fait l’objet d’une surveillance particulière, à la différence des cataractes.

Augmentation du nombre d’actes et de la complexité des patients

Le nombre de cas par opérateur, le volume de cas par laboratoire de cathétérisme, le degré de complexité des cas prolongeant d’autant le temps de fluoroscopie et le recours à d’autres imageries cardiaques ont très largement augmenté. D’où des durées d’exposition aux radiations de plus en plus prolongées.

« Les cardiologues interventionnels figurent parmi les professionnels de santé les plus exposés. On estime ainsi qu’un cardiologue interventionnel est exposé en moyenne aux rayonnements durant 640 heures, ce chiffre pouvant dépasser 800 heures pour ceux affectés à des unités d’urgence. Bien sûr, on ne peut pas écarter le fait que ces cas de cancers de la tête et du cou soient liés au hasard mais nous devrions au moins être conscients de ce risque pour améliorer les dispositifs de protection » a précisé le Dr Roguin à heartwire.

En France, l'arrêté du 18 mai 2004 définit les formations complémentaires en radioprotection que doivent acquérir les médecins non radiologues, avec mise à jour tous les 10 ans. Un arrêté qui fait suite au développement de recommandations européennes. Les cardiologues interventionnels sont par conséquent tous sensibilisés à la question de la radioprotection durant une formation complémentaire de deux jours.

Mais la formation requise aux Etats-Unis n’est que de 4 heures et quid des autres pays du monde ? « Faudrait-il anticiper en éloignant encore plus les consoles émettrices de rayonnement ionisant ?, en protégeant les têtes ? s’interroge le Dr Roguin.

Référence
  1. Roguin A. Radiation hazards to interventionnal Cardiologists: a report on increased brain tumors among physicians working in the cath lab. SOLACI 2014. 23 avril 2014, Buenos Aires, Argentine.

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