Paris, France – Grâce à une activité physique, même modérée, la sensibilité à l’insuline peut être améliorée chez les patients avec un diabète de type 2. Un bénéfice qui s’explique par une amélioration de la capacité oxydative des muscles, mais aussi de la répartition des lipides, a indiqué le Dr Patrick Schrauwen (Université de Maastricht, Pays-Bas), lors d’une session consacrée aux lipotoxicités, consécutives à l’excès de lipides, au congrès de la Société Francophone du Diabète 2014 [1].
L’accumulation de lipides dans les cellules musculaires joue un rôle important dans le développement du diabète de type 2. Des recherches ont montré que ce stockage lié à un taux d’acides gras circulants élevé conduit à une baisse de la fonction mitochondriale et de la sensibilité à l’insuline.
Toutefois, cette concentration élevée de lipides dans les muscles s’observe également chez les sportifs de haut niveau, en particulier ceux exerçant une activité d’endurance, sans qu’ils soient pour autant confrontés à une lipotoxicité puisqu’ils disposent, à l’inverse, d’une forte sensibilité à l’insuline.
« C’est ce qu’on appelle le paradoxe des sujets entraînés », a souligné le Dr Schrauen. A travers deux études menées par son équipe, il a apporté quelques éléments explicatifs sur ce paradoxe, qui illustre les effets bénéfiques que peuvent tirer les patients diabétiques d’une activité physique.
Une sensibilité à l’insuline nettement améliorée
La première étude porte sur une évaluation des répercutions d’un effort modéré sur la fonction mitochondriale et la sensibilité à l’insuline chez des patients en surpoids, atteints d’un diabète de type II [2].
Un groupe de 18 hommes diabétiques, ainsi qu’un groupe contrôle de 20 hommes en bonne santé, de même corpulence, mais sans diabète, ont suivi un entrainement comprenant chaque semaine trois sessions sur vélo ergomètre d’une durée totale de 45 minutes.
La fonction mitochondriale s’est avérée plus faible chez les individus diabétiques avant l’entrainement. Après 12 semaines d’entrainement, elle a progressé de 48% chez les individus diabétiques pour atteindre le niveau du groupe contrôle lors de l’inclusion.
La sensibilité à l’insuline s’est nettement améliorée chez les individus diabétiques, avec une hausse de 63%, contre 8% chez les non diabétiques. Des biopsies ont également montré que le stockage endogène du glucose dans les cellules musculaires a progressé dans les deux groupes.
Cette évolution positive pour les patients diabétiques s’est pourtant accompagnée d’une hausse du niveau d’accumulation des lipides dans les cellules musculaires de 27%.
Meilleur stockage des triglycérides
Pour interpréter ce dernier résultat, l’équipe s’est penchée sur l’expression du co-activateur PGC-1 (Peroxisome Proliferator Activator Receptor), un modulateur important du métabolisme énergétique et glucidique dont l’activation varie selon l’effort physique [3].
Au cours de travaux sur des rats soumis à un régime riche en graisse, les chercheurs ont induit une surexpression du co-activateur dans l’une des pattes des animaux. Ils ont alors observé une accumulation de gouttelettes lipidiques dans les muscles plus élevée, comparativement à l’autre patte.
La surexpression de PGC-1 s’est accompagnée d’une hausse du taux de périlipine 2 (PLIN2), une protéine qui favorise le stockage des lipides. Cette hausse de PLIN2 a été associée dans l’étude à une amélioration de la sensibilité à l’insuline, en dépit du niveau élevé d’acides gras circulants.
« Les périlipines sont présentes dans l’enveloppe recouvrant les gouttelettes lipidiques intracellulaires. En améliorant la répartition des acides gras en excès vers un stockage de triglycérides dans des gouttelettes lipidiques, elle contribuent à réduire la résistance à l’insuline associée à une lipotoxicité », a expliqué le chercheur.
« L’exercice physique active PGC-1, ce qui conduit à une amélioration de l’activité mitochondriale par la multiplication des mitochondries, ainsi qu’à la production de protéines nécessaires au stockage des lipides dans les cellules musculaires et à la bonne répartition des acides gras ».
« Un muscle en bonne santé, capable de maintenir une sensibilité à l’insuline, est un muscle dans lequel existe un équilibre entre la capacité oxydative et l’accumulation de lipides dans les cellules », a conclu le Dr Schrauwen.
Références :
Schrauwen P, Lipotoxicité : quel mécanisme pour quel tissu ? Les muscles, Congrès de la Société Francophone du Diabète. Paris, 13 mars 2014.
Meex R, Schrauwen-Hinderling, Moonen-Kornips E, Restoration of muscle mitochondrial function and metabolic flexibility in type 2 diabetes by exercise training is paralleled by increased myocellular fat storage and improved insulin sensitivity, Diabetes, mars 2010, 59 (3), pp 572-579
Bosma M, Hesselink M, sparks, L, Perilipin 2 improves insulin sensitivity in skeletal muscle despite elevated intramuscular lipid levels, Diabetes, nov 2012, 61 (11), pp 2679-2690.
Citer cet article: Diabète, muscles et graisses : comment l’exercice physique réduit l’insulino-résistance - Medscape - 26 mars 2014.
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