Cigarette électronique : les premiers chiffres français

Stéphanie Lavaud

Auteurs et déclarations

28 février 2014

Paris, France – La cigarette électronique est en plein essor mais peu de données de consommation et de modalités d’usage étaient disponibles. D’où l’intérêt de l’enquête de l’Observatoire français des drogues et toxicomanies (OFDT) qui livre une première estimation fiable du phénomène qui met en avant deux résultats [1].Tout d’abord, la e-cigarette gagne du terrain en France. Ensuite : la cigarette électronique semble être plus une solution de sortie du tabac plutôt qu’un mode d’entrée. Puisque parmi la (faible) proportion d’anciens fumeurs de tabac (même occasionnels) qui ont utilisé la cigarette électronique au cours du dernier mois (soit 1,2 %), la plupart (84%) estiment avoir arrêté complètement de fumer grâce à celle-ci.

La e-cigarette fait un tabac

Indéniablement, la cigarette électronique gagne du terrain dans l’Hexagone. « De plus en plus de mes patients utilisent la cigarette électronique et d’ailleurs, je leur conseille » témoigne le Pr Bernard Granger, professeur de psychiatrie à l'université Paris Descartes et responsable du service psychiatrie à l'hôpital Tarnier (Paris).
Interrogés en novembre 2013 dans le cadre de l’enquête téléphonique ETINCEL-OFDT (2052 personnes inclues), près de neuf Français sur dix (88%) déclarent connaître, ne serait-ce que de nom, la cigarette électronique. Si les fumeurs qui constituent la cible du marketing sont plus nombreux à en avoir connaissance (93%), la e-cigarette n’a pas échappé non plus aux non-fumeurs puisque 85% des personnes interrogées connaissent son existence. Les Français sont non seulement plus nombreux à la connaître mais ils sont aussi plus nombreux à l’utiliser : 2,5 plus que 18 mois auparavant, un engouement qui touche surtout les plus jeunes. Pourtant, c’est après 35 ans que les personnes semblent plus enclines à « adopter » la cigarette électronique après l’avoir essayée. Probablement un « effet mode » chez les 15-24 ans, commentent Aurélie Lermenier et Christophe Palle (OFDT), alors que les plus âgés seraient plus nombreux à l’utiliser sur le long terme dans un but de sevrage.

L’ampleur du phénomène est récente puisque les trois quarts (76%) des vapoteurs au cours des trente jours précédant l’enquête ont commencé à l’utiliser au printemps 2013, période de forte médiatisation de la e-cigarette, liée à la publication notamment d’un rapport du ministère de la santé. Fait intéressant, près d’un quart (24%) des usagers déclarent de pas savoir quel dosage de nicotine contient le liquide ou la recharge qu’ils utilisent. Et parmi ceux qui le connaissent, seuls 11% ont opté pour l'absence de nicotine, témoin de la forte proportion d'usagers dépendants.

Motivation première : le sevrage total

A la question (sur toutes les lèvres), la e-cigarette permet-elle d’arrêter de fumer ? La réponse semble plutôt positive puisque 84% d’anciens fumeurs (même occasionnels) et usagers dans le mois de la cigarette électronique estiment avoir arrêté complètement de fumer grâce à cet outil. « Sans présager de l’efficacité réelle de la cigarette électronique pour le sevrage tabagique, d’autant plus que les effectifs sont ici très réduits, il semble bien que les fumeurs soient convaincus de son utilité pour atteindre ce but, comme alternative aux substituts nicotiniques et aux médicaments pour l’arrêt du tabac » modulent les auteurs de l’étude.
« Certains de mes patients ont arrêté ou réduit de façon spectaculaire leur consommation de tabac grâce à la cigarette électronique. C’est un progrès sous réserve d’une éventuelle toxicité. Mais, pour le tabac, la toxicité du goudron est, elle, bien démontrée » confirme le Pr Granger.
D’ailleurs, arrêter tabac et cigarette électronique constitue la première motivation pour la moitié des personnes interrogées utilisant simultanément les deux produits. Viennent ensuite, loin derrière, la réduction de la consommation de tabac mais sans arrêt complet (11,5%) puis le remplacement du tabac par la cigarette électronique (8,2%), « ce qui peut s’apparenter dans les deux cas à une forme de réduction des risques ». 

Et les auteurs de conclure « la cigarette électronique semble ainsi constituer du moins pour le moment, plutôt une solution de sortie du tabagisme qu’une « porte d’entrée » ». A suivre donc…

Baisse exceptionnelle des ventes de cigarettes en 2013
Selon le bilan de l’OFDT, l’année 2013 a vu les ventes de cigarettes diminuer nettement (- 7,6 %) alors que « la progression de celles de tabac à rouler, moins importante que les années précédentes (+ 2,6 %), ne compense que marginalement cette baisse » [2]. Explication avancée par l’OFDT pour expliquer cette baisse exceptionnelle : «  la régularité de l’augmentation des prix au cours des quatre années précédentes, qui a porté celui du paquet de cigarettes de la marque la plus vendue à près de 7 euros (seuil atteint en janvier 2014), conjugué à l’essor prononcé de la cigarette électronique au cours de cette année ».

Le Pr Bernard Granger a déclaré ne pas avoir de liens d’intérêt avec le sujet.

Références

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