15 mn de réanimation post-arrêt cardiaque : un seuil clé pour la récupération

Dr Isabelle Catala

25 novembre 2013

Dallas, Etats-Unis — Près de 75 % des patients qui quittent l'hôpital avec un bon pronostic neurologique après un arrêt cardio-respiratoire, ont récupéré une circulation sanguine spontanée en 10 à 13 minutes de réanimation. C'est le résultat d'une analyse rétrospective portant sur 1014 arrêts cardiaques, présenté lors du congrès de  l'American Heart Association, et publié dans Circulation [1,2].

Dans cette série, où 11 % des patients au total sont sortis vivants de l'hôpital, le délai de 15 minutes de réanimation apparait comme un seuil, au-delà duquel le taux de survie avec récupération fonctionnelle passe de 6 % à 2 %.

Le plus tôt c'est le mieux

Ce travail, mené par le Dr Joshua Reynolds (Pittsburg, Etats-Unis) et son équipe, visait à définir la durée de l'arrêt cardiaque à partir de laquelle il devient licite de proposer les nouvelles techniques de ressuscitations : table à masser, circulation extracorporelle, réalisation d'une coronarographie, d'un scanner pulmonaire injecté ou d'une aortographie.

Pour le Dr Reynolds, « plus tôt ces techniques sont mises en place, meilleur sera le pronostic neurologique ».

Faisant une analogie avec d'autres spécialités médicales, il explique : « on n'attend pas qu'un patient infecté soit en sepsis grave pour lui administrer des antibiotiques, ni qu'un cancéreux souffre de métastases pour lui proposer une chimiothérapie ».

Des nouvelles techniques encore rarement utilisées

Les bases du traitement de l'arrêt cardio-respiratoire n'ont que très peu évolué depuis 20 ans, et restent fondées sur le massage cardiaque externe, la défibrillation et l'utilisation d'épinéphrine, selon les recommandations américaines - et bien qu'il existe désormais un débat sur l'intérêt de ce médicament.

Le Dr Reynolds propose donc que « lorsqu'un patient est pris en charge à l'extérieur de l'hôpital pour un arrêt cardio-respiratoire, le traitement doit suivre les recommandations ».

Mais si le délai d'arrivée à l'hôpital se prolonge, il estime inutile de poursuivre la réanimation classique. Mieux vaut faire bénéficier le patient au plus vite d'une CEC, si elle est disponible, et réaliser les examens angiographiques qui peuvent permettre le diagnostic de la pathologie causale : infarctus du myocarde, embolie pulmonaire massive, dissection aortique… ».

Une analyse du devenir neurologique

L'étude a été menée à partir d'une base de données comportant 5517 arrêts cardiaques extrahospitaliers, survenus dans la région de Pittsburg entre 2005 et 2011. Au total, une réanimation a été tentée sur 2349 de ces patients. En raison d'un manque de données, l'analyse n'a pu être effectuée que sur 1014 personnes.

Les auteurs ont choisi d'analyser les caractéristiques des patients et de leur réanimation selon leur devenir fonctionnel neurologique : bon, moyen et mauvais.

Parmi les facteurs qui influent sur le bon devenir neurologique, les auteurs retiennent : la durée de la réanimation, l'âge, la mise en place immédiate de la réanimation cardio-respiratoire par un passant témoin de la scène, l'existence d'un rythme cardiaque choquable (fibrillation ventriculaire) et la réalisation d'un choc électrique externe.

En revanche, l'utilisation de l'adrénaline, la réalisation de technique de ventilation et le sexe des patients n'influent pas sur le devenir du patient.

La question du délai dans des populations particulières

Au vu de ces résultats, l'équipe du Dr Reynold propose donc d'abandonner le principe, recommandé aux Etats-Unis, voulant que le type de réanimation entamé en pré-hospitalier soit poursuivi à l'hôpital. Il faudrait au contraire  préférer des techniques plus invasives en se fondant uniquement sur le délai de 15 minutes.

La notion d'un délai unique est toutefois critiquée par le Dr Dianne Atkins (Iowa-City, Etats-Unis) dans un éditorial accompagnant l'article dans Circulation [3].

La cardiologue-pédiatre explique en effet que non seulement les résultats présentés ne sont ni nouveaux ni surprenants, mais elle souligne aussi que dans des populations particulières telles que les enfants ou les patients victimes d'un arrêt cardiaque hospitalier, des réanimations prolongées avec des techniques classiques permettent des récupérations fonctionnellement acceptables dans des délais beaucoup plus longs (25 à 35 minutes).

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