Oxford, Royaume-Uni - Le British Medical Journal publie une évaluation médico-économique indiquant qu'une taxe de 20% imposée aux boissons sucrées comportant des sucres ajoutés, réduirait de 1,3% la prévalence de l'obésité dans la population adulte britannique, et de 0,9% la prévalence du surpoids [1].
On pourra toujours reprocher bien des imprécisions aux modèles médico-économiques. Mais l'objectif des auteurs se limite à indiquer des ordres de grandeurs, alors qu'un débat agite le Royaume-Uni sur l'opportunité de taxer les boissons avec sucres ajoutés. En janvier dernier, l'ONG Sustain, soutenue par 61 associations impliquées dans la santé, a ainsi demandé une taxe de 20 pences par litre sur ces boissons, rappelle le papier du BMJ. En février, c'était au tour de l'Academy of Medical Royal Colleges de réclamer une taxe de 20%, dans le cadre de la lutte contre l'épidémie d'obésité.
« Bien que le gouvernement ait indiqué sa préférence pour des approches non contraignantes du contrôle de l'obésité, il n'a pas exclu des mesures fiscales. Clairement, l'idée d'une taxe sur les boissons sucrées fait son chemin aux Royaume-Uni », estiment les auteurs, en rappelant que l'instauration d'une taxation spécifique en Irlande et en France s'était soldée par une réduction de consommation, mais que l'impact sur la santé n'avait pas été évalué.
Résultat : « notre étude montre que, sans être une panacée contre l'obésité, elle pourrait contribuer utilement à une stratégie diversifiée pour combattre l'obésité et les autres désordres alimentaires », concluent les auteurs.
Un bénéfice en particulier chez les jeunes
En croisant des données sur la consommation des ménages, la prévalence du surpoids (IMC > 25 kg/m2) et de l'obésité (IMC > 30 kg/m2), et l'impact des boissons sucrées sur le surpoids, les auteurs britanniques aboutissent donc aux résultats suivants.
En ce qui concerne la consommation de boissons sucrées, la moyenne par habitant serait de 123 mL/j au Royaume-Uni, soit 206 kJ/j. Ces valeurs moyennes varient toutefois beaucoup selon l'âge (452 kJ/j entre 16 et 29 ans, contre 96 kJ/j à partir de 50 ans), et en fonction du revenu, avec une courbe un U.
En ce qui concerne la baisse de consommation de boissons sucrées que l'on peut attendre de leur taxation, les auteurs la chiffrent à 15%, avec des compensations sous forme de boissons « diet », de thé, de café, de lait et de jus de fruit.
En termes énergétiques, ces évolutions se solderaient par une réduction moyenne de 16,7 kJ/j. Chez les 16-29 ans, cette réduction atteindrait de 56,3 kJ/j, tandis que chez les plus de 50 ans, les effets de compensation aboutiraient à une augmentation non significative de 1,7 kJ/j. Par ailleurs, c'est parmi les plus hauts revenus que la baisse d'apport énergétique serait la plus substantielle, la substitution par le lait étant plus fréquente parmi les classes moyennes et populaires.
En ce qui concerne la prévalence de l'obésité et du surpoids, la taxation à 20% des boissons sucrées aboutirait donc à des réductions de 1,3% et 0,9% respectivement, ce qui peut paraitre modeste, mais représente tout de même 180 000 (de 110 000 à 247 000) et 285 000 personnes (de 201 000 à 364 000).
On note que ces effets seraient grosso modo homogènes à travers les différentes tranches de revenus. S'agissant de l'âge, en revanche, on trouve un effet maximal chez les 16-29 ans (-7,6% d'obésité ; -4,2% de surpoids), et un effet nul chez les sujets de 50 ans ou plus.
Subventionner les fruits et légumes en taxant les boissons sucrées
L'impact sur les maladies cardiovasculaire et le diabète de cette baisse de prévalence n'a lui, pas été chiffré. Non plus d'ailleurs que celui sur « les cancers, l'arthrite et les caries dentaires », signalent les auteurs.
Pour toutes ces pathologies cependant, le fait qu'en termes d'IMC, les moins de 30 ans soient les plus bénéficiaires, suggère un impact sanitaire à long terme, délai dont les évaluations devront tenir compte.
Sur le plan économique, en revanche, l'impact serait immédiat. Cette taxation aboutirait à un surcoût des dépenses de boissons de 2,1% pour les classes populaires, de 1,7% pour les classes moyennes, et de 0,8% pour les riches britanniques.
Enfin, pour le trésor, la taxation représenterait en rentrée de 276 millions de £ (326 millions d' €).
« En période de restrictions budgétaires, cette somme pourrait être affectée au National Health Service », estiment les auteurs. « Mais elle pourrait aussi servir à subventionner la nourriture saine, comme les fruits et légumes ».
L'étude Global Burden of Disease Study, menée en 2010, indique que l'excès de boissons sucrées pèse en fait beaucoup moins lourd que la trop faible consommation de fruits et légumes dans la morbidité au Royaume-Uni, rappellent les auteurs. « Utiliser les revenus d'une taxe sur les boissons sucrées pour réduire le prix des fruits et légumes est un mécanisme qui pourrait permettre de faire d'une pierre deux coups », concluent-ils.
Aucun financement spécifique n'a été demandé pour ce travail, dont les auteurs sont rémunérés par la British Heart Foundation, ou le National Institute for Health Research. Parmi les auteurs, Richard Tiffin et Ariane Kehlbacher déclarent avoir reçu des financements de l'Union of European Soft Drinks Association. Mike Rayner dirige l'ONG Sustain. |
Actualités Heartwire © 2013
Citer cet article: + 20% de taxes sur les boissons sucrées = 1,3% d'obèses en moins - Medscape - 30 oct 2013.
Commenter