Auckland, Nouvelle Zélande-Supplémenter en vitamine D les adultes en bonne santé dans le but de prévenir l'ostéoporose serait sans fondement et à l'origine de dépenses inutiles, selon les auteurs, le Dr Ian R Reid et coll. (Université d'Auckland, Nouvelle Zélande).
D'après les résultats d'une méta-analyse publiée dans le Lancet, la supplémentation en vitamine D sans ajout de calcium n'augmenterait pas la densité minérale osseuse chez la plupart des adultes sans facteurs de risque [1].
« Les résultats de récentes méta-analyses sur la supplémentation en vitamine D sans ajout de calcium ont montré qu'elle était inefficace sur la prévention fracturaire, possiblement en raison d'une puissance statistique insuffisante des études, de doses inappropriées ou parce que la supplémentation a été prescrite à des populations non carencées en vitamine D [2,3]. Toutefois, en dépit de ces données, presqu'un adulte sur 2 de plus de 50 ans reçoit encore une supplémentation », indiquent les auteurs.
Pour tenter d'y voir plus clair, les chercheurs ont réalisé une méta-analyse de 23 essais colligeant les données de 4082 personnes (92% de femmes, moyenne d'âge 59 ans, principalement d'origine caucasienne) qui ont pris de la vitamine D pendant en moyenne 2 ans.
A l'entrée dans l'étude, les taux de 25-hydroxyvitamine D s'échelonnaient de 16 nmol/L (pakistanais vivant au Danemark) à 82 nmol/L avec des taux moyens inférieurs à 50 nmol/L dans 8 essais (n=1791). Il était de 50 à 75 nmol/L dans 11 études (n=1860).
Les chercheurs ont mesuré la densité minérale osseuse (DMO) à plusieurs endroits (1 à 5 sites) et notamment au niveau lombaire, du col du fémur, de la hanche, du trochanter, du corps entier et de l'avant-bras. Les doses de supplémentation variaient d'une étude à l'autre, 10 d'entre elles (n=2294) ont utilisé des doses quotidiennes ne dépassant pas 800 UI.
Un léger bénéfice au col fémoral et nulle part ailleurs
Globalement, les auteurs n'ont pu identifier qu'un léger bénéfice de la vitamine D au niveau du col fémoral (augmentation moyenne de la DMO de 0,8%, IC 95% 0,2% à 1,4%) et aucun bénéfice aux autres sites.
« Nous avons observé une augmentation de la DMO faible mais significative au niveau du col du fémur mais pas au niveau de la hanche totale. Un effet aussi localisé pourrait être un artéfact ou l'effet du hasard », commentent les auteurs.
Ils ajoutent que dans d'autres travaux : « les effets sur la DMO à un site unique n'ont pas été associés à la réduction du risque fracturaire. »
Ils concluent donc que « dans la plupart des cas, les adultes en bonne santé n'ont pas besoin de supplémentation en vitamine D. »
Et si le bénéfice observé habituellement dans les études venait du calcium ?
Ces nouvelles données vont à l'encontre de méta-analyses qui ont montré un bénéfice de la vitamine D sur le risque fracturaire [4,5]]. Mais, les auteurs précisent que ces méta-analyses incluaient des études dans lesquelles la vitamine D était associée à du calcium, qui lui, a un effet démontré sur la densité osseuse [6], ce qui a pu biaiser les résultats.
«Nos résultats vont à l'encontre de la perception selon laquelle la vitamine D agit directement sur les cellules de l'os, ce qui est probablement incorrect », notent les auteurs.
Ils soulignent que bien que l'inactivation du gène du récepteur de la vitamine D chez la souris soit associé à une perte de la masse osseuse, le phénotype peut être complètement corrigé par une supplémentation en calcium et en phosphate.
Quand supplémenter et à quelle dose ?
Dans un éditorial accompagnant l'article le Dr Clifford J. Rosen (Maine Medical Research Institute, Scarborough) commente : « La méta-analyse de Reid et coll. confirme que la supplémentation en vitamine D n'est pas nécessaire pour prévenir l'ostéoporose chez les adultes en bonne santé. En revanche, le maintien de niveaux corrects de vitamine D associé à des apports quotidiens suffisants en calcium (800/1200 mg/j) restent une approche préventive efficace des fractures de hanche chez les personnes âgées. »
Concernant le seuil à partir duquel les personnes doivent être supplémentées, interrogé par Medscape France, le Dr Reid a rappelé que la supplémentation en vitamine D est généralement recommandée lorsque les taux sont inférieurs à 30 ng/mL. « Toutefois, une de nos principales conclusions est que du point de vue de la densité minérale osseuse, 16 ng/mL semble être plus approprié pour définir la carence en vitamine D. Ce seuil, plus bas, signifie que seul un faible pourcentage de la population française est, en fait, en carence. Nous pensons que la définition de la carence en vitamine D devrait s'appuyer sur des études comme la nôtre et non sur des études qui associent les taux de vitamine D à différents états cliniques », explique-t-il.
En outre, s'il est actuellement plutôt recommandé de supplémenter avec des doses élevées de vitamine D ( plus de 1000 UI), Reid et coll. rappellent que des études comparant les fortes doses et les doses plus faibles suggèrent que les doses faibles sont au moins aussi bénéfiques [7,8].
L'étude a été financée par le Health Research Council de Nouvelle Zélande. Les auteurs et l'éditorialiste n'ont pas déclaré de liens d'intérêts en rapport avec le sujet. |
Citer cet article: Méta-analyse de la vitamine D en prévention de l'ostéoporose chez l'adulte - Medscape - 18 oct 2013.
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