Paris, France - L'expérience d'une interruption volontaire de grossesse (IVG) ne modifie pas le regard des femmes sur la contraception mais elle permet souvent de faire accepter un mode de contraception plus adapté et en particulier de passer à une contraception réversible de longue durée, estime le Dr Philippe Faucher, gynécologue à l'hôpital Trousseau [1].
« Contrairement à une idée reçue, près des deux tiers des femmes qui ont recours à l'IVG sont sous contraception [2]]», a-t-il déclaré. La grossesse non désirée survient suite à l'échec de la méthode dans 19% des cas et suite à son utilisation incorrecte dans 46% des cas. Pour les femmes sous contraception orale, l'oubli de la pilule est en cause dans 91,5% des cas [3].
Après IVG, les femmes ne sont pas moins à risque de grossesse accidentelle. « L'IVG n'améliore pas l'observance », observe le Dr Philippe Faucher. Une étude a même montré que les femmes ayant eu recours à l'IVG avaient 60% plus de chances d'être à nouveau enceintes non intentionnellement que celles qui n'avaient jamais avorté [4].
D'où l'intérêt des moyens contraceptifs réversibles de longue durée. Leur efficacité est « indépendante de l'observance de la patiente, leur continuation ne nécessite pas un approvisionnement régulier chez le pharmacien, et leur discontinuation nécessite l'intervention d'un professionnel », explique le spécialiste.
Résultat, plusieurs études ont mis en évidence une meilleure efficacité des implants et des dispositifs intra-utérins (DIU) en prévention des IVG répétées.
Les femmes n'y sont pas réfractaires. Elles choisissent même plus souvent ce type de contraception en cas d'antécédent d'IVG et si elles y ont accès immédiatement en per-IVG.
« Le choix préférentiel du DIU par rapport à l'implant en per-IVG est probablement lié au fait qu'il s'agit de deux procédures intra-utérines », souligne le spécialiste.
Pas de raison donc de se priver de ces moyens de longue durée. Et ce, y compris chez les femmes de 20-25 ans. « Ceux qui s'alarment des taux élevés d'IVG chez les jeunes sont souvent les mêmes qui mettent en garde contre la contraception de longue durée chez les jeunes », ironise le Dr Faucher.
Inutile d'attendre : « c'est une erreur de considérer la consultation de contrôle comme la consultation de contraception », estime-t-il, « la discussion sur la contraception doit se faire au moment de la demande d'IVG ». Le spécialiste craint en effet que les 20% de femmes qui ne reviennent pas à la visite de contrôle soient donc perdues de vue.
Poser un DIU lors de l'IVG chirurgicale, c'est possible
Dans le cas d'une IVG chirurgicale, la pose d'un DIU au moment de l'aspiration est une bonne option -sauf dans le cas d'un avortement septique où elle est formellement contre-indiquée.
Hors avortement septique, la pose du DIU en per-IVG ne présente en effet pas plus de risque (ni de saignement, ni de douleur, ni d'expulsion ni d'infection génitale haute) qu'une pose réalisée au moment de la visite de contrôle.
La nécessité d'attendre les résultats d'analyse concernant une éventuelle infection par Chlamydiae ou par des gonocoques n'est pas non plus une raison de retarder la pose puisqu'il est possible de traiter une infection génitale haute en présence du DIU, a précisé le Dr Faucher.
Dans le cas d'une IVG médicamenteuse, le DIU peut être inséré après expulsion du sac gestationnel en l'absence de signes cliniques d'infection.
« En pratique, le DIU est souvent posé lors de la visite de contrôle à J15 -ou J7 pour ceux qui pratiquent le contrôle précoce. Une insertion plus tardive (J21) semble risquée car il y a possibilité d'ovulation dès le 10ème jour post-IVG », met en garde le spécialiste.
En cas de doute sur le caractère complet de l'avortement, mieux vaut cependant reporter la pose du DIU après les premières règles, conseille-t-il.
L'implant en per IVG évite les « perdues de vue »
L'implant peut être posé en per-IVG (le jour de l'aspiration pour l'IVG chirurgicale, le jour de la prise de la mifépristone pour l'IVG médicamenteuse) ou lors de la consultation de contrôle. Là aussi, le per-IVG a les faveurs du Dr Faucher, toujours pour éviter les perdues de vue.
Si l'implant est posé lors de la consultation de contrôle, des précautions sont à prendre. Préservatif ou abstinence depuis le jour de l'IVG et jusqu'à 7 jours après la pose de l'implant, ou initiation d'une contraception orale à J3 et jusqu'à la pose de l'implant, a expliqué le Dr Faucher.
A noter que « l'aménorrhée est plus difficile à interpréter quand l'implant est posé en per-IVG (continuité de la grossesse vs efficacité de l'implant) », a-t-il souligné.
Patch, anneau ou pilule ?
Quant aux autres moyens de contraception (contraceptifs oraux combinés, progestatifs purs, patch combiné, anneau vaginal), ils peuvent être proposés et initiés immédiatement après une IVG au premier trimestre de grossesse.
Pour le choix de la pilule, le seul paramètre lié à l'IVG à prendre en compte c'est la raison pour laquelle il y a eu échec de la contraception orale. Si le mauvais respect de l'intervalle entre deux pilules est en cause, il est possible de proposer une pilule en prise continue. Si les oublis sont répétés (et si les oestroprogestatifs sont souhaités), mieux vaudra opter pour un patch ou un anneau.
Dans le cas d'une IVG médicamenteuse, la contraception orale doit être reprise - ou le patch posé - le jour même de la prise du misoprostol. A noter que les progestatifs peuvent compliquer l'interprétation des saignements (rétention trophoblastique ou métrorragie liée à la pilule ?).
Dans le cas de l'anneau, il doit être posé le lendemain de la prise du misoprostol ou reportée de deux ou trois jours en cas de saignements persistants. En suite immédiate d'une IVG chirurgicale, celui-ci pourrait être associé à un risque infectieux ou à une source d'inconfort en cas de saignements persistants, note le spécialiste.
Le Dr Philippe Faucher est expert auprès du Laboratoire MSD au sujet de l'implant sous cutané contraceptif. |
Citer cet article: Quelle contraception après IVG ? - Medscape - 8 oct 2013.
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