Nancy, France - Le CHU de Nancy veut transformer la prise en charge de l'insuffisance cardiaque et appuie pour cela le développement d'une technologie innovante : un boîtier de télésuivi mesurant des biomarqueurs d'origine cardiaque et rénale [1].
Ce projet innovant est porté par les Pr Faïez Zannad (Service de Cardiologie du CHU de Nancy et Centre d'Investigation Clinique Plurithématique Inserm, CHU de Nancy et Université de Lorraine) et Patrick Rossignol (Centre d'Investigation Clinique Plurithématique Inserm, CHU de Nancy et Université de Lorraine) mais met en jeu de nombreux partenariats (cf. encadré ci-dessous).
Pour le Pr Zannad, il s'agissait de changer de paradigme dans l'insuffisance cardiaque : passer à une gestion dynamique du traitement médical.
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Pr Faiez Zannad |
Encore fallait-il trouver les bons marqueurs de suivi. Or, « jusqu'à présent, on n'avait pas de quoi détecter correctement les décompensations », explique le spécialiste. Les nouvelles données recueillies devraient pallier cette faille et permettre ainsi d'ajuster les traitements.
Les biomarqueurs sont d'origine cardiaque et rénale ; les modalités de leur analyse par un algorithme d'aide à la décision sont pour l'instant confidentielles. « Pour des raisons de compétitivité industrielle je ne peux pas en dire plus», s'excuse-t-il.
« A partir d'une goutte de sang, le boîtier transmettra les données à un centre de télésurveillance, qui les fera suivre si nécessaire au médecin traitant afin qu'il puisse revoir le traitement de son patient, en bénéficiant de l'apport d'un système d'aide à la décision », explique le Pr Zannad.
L'interface sera une tablette interactive « très facile d'utilisation, y compris pour les personnes âgées » qui renverra de plus au patient un diagnostic immédiat.
« Les messages sont simples : en vert un message rassurant indiquant que tout va bien, en orange un message incitant à refaire la mesure, réfléchir à ce qui a pu avoir une influence négative et en parler à son médecin et en rouge un message d'alerte invitant à prendre contact immédiatement avec son médecin », détaille le spécialiste.
Celui-ci envisage même à terme une « autonomie encadrée » pour l'insuffisant cardiaque, comparable à celle du diabétique sous insuline. « Si on leur donne le bon outil, avec des indications en langage simple, ce sera une avancée importante », estime-t-il.
La première étude clinique prévue en 2014
Les premiers prototypes sont attendus pour la fin 2013, et une première étude de validation clinique sera réalisée en vue de l'obtention du marquage CE.
Une autre étude devrait suivre en 2014 sur plusieurs centaines de patients afin d'évaluer la prévention des réadmissions dans les 60 à 90 jours suivant la première hospitalisation. D'autres centres (en France et/ou à l'étranger) devraient s'y associer.
« Nous avons une série d'études en projet, calibrées en fonction des différentes réglementations européennes et de l'étude de marché », explique le Pr Zannad, qui ne cache pas l'ambition mondiale de son projet.
« Chaque pays fonctionne différemment », rappelle-t-il. « En Allemagne, le remboursement est obtenu dès le marquage CE mais deux ans après il faut être en mesure de prouver l'utilité du dispositif. En France, il faut d'abord montrer l'innocuité et l'utilité du dispositif. Aux Etats-Unis, il faut des études de morbi-mortalité et des données médico-économiques… ».
Justement, l'enjeu médico-économique est de taille : l'incidence de l'insuffisance cardiaque augmente et le taux de réhospitalisation est particulièrement élevé.
« Je ne connais aucune autre pathologie pour laquelle, un an après hospitalisation, un quart des patients est décédé et un autre quart est réhospitalisé », souligne le Pr Zannad.
Pour reprendre le parallèle avec les patients diabétiques, le spécialiste insiste encore : « il y a plus de récidives d'insuffisance cardiaque que d'accidents sous insuline ».
La prise en charge en réseau a pourtant permis d'importants progrès. « Le réseau lorrain ICALOR est un exemple en la matière : une étude menée sur 1000 patients a permis de montrer une baisse de 40% des réhospitalisations, ce qui en fait l'expérience la plus aboutie en France », estime le Pr Zannad. « Mais c'est encore trop peu ».
D'où l'importance d'un tel projet pour lequel les investissements sont d'ores et déjà importants. « La Région Lorraine, en partenariat avec l'Union européenne (via le Fond Européen de Développement Régional : FEDER) a investi 1,9 millions d'euros, sur trois ans, pour le budget de recherche et développement. Mais nous allons faire d'autres appels de fonds de crédits de recherche », annonce le Pr Zannad.
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Les Pr Faiez Zannad et Patrick Rossignol sont les inventeurs de cette technologie brevetée, et ont créé avec Gérard Houis la Société CardioRenal diagnosticS |
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Citer cet article: Un boitier de télésuivi des insuffisants cardiaque développé à Nancy - Medscape - 19 juin 2013.
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