RGO du nourrisson : 80 % de prescriptions médicamenteuses non justifiées
L'étude franc-comtoise ERGO montre une incidence élevée des RGO des moins de 1 an, stable dans le temps et confirme un sur-traitement médicamenteux. 29 avril 2013Paris, France — Pour le Dr Anne Curien-Chotard (Besançon), « 80 % des prescriptions médicamenteuses pour reflux gastro-œsophagien dans la cohorte analysée de 157 enfants (suivis entre la naissance et l'âge de 1 an) ne sont pas justifiées ». C'est la conclusion de l'étude ERGO (Etude épidémiologique du Reflux Gastro Oesophagien chez le nourrisson en Franche-Comté) qui a été présentée à l'occasion des Journées francophones d'hépato-gastroentérologie et d'oncologie digestive[1].
IPP et antiH2 sur-prescrits ?
En 2007 et 2008, l'analyse des données de la caisse nationale d'assurance maladie montre qu'en Franche-Comté, l'incidence de la prescription d'IPP ou d'anti H2 pour traiter un reflux gastro-œsophagien s'établissait à 254 à 276 prescriptions pour 10 000 nourrissons.
« Un chiffre particulièrement élevé qui laisse à penser que ces traitements sont sur-prescrits au regard des données d'incidence de RGO déjà connues ou évaluées par cette étude», analyse le Dr Curien-Chotard.
« C'est pour ces raisons que nous avons mis en place une étude sur des nourrissons de cette région suivi entre la naissance et l'âge de 12 mois afin d'évaluer la prévalence du RGO physiologique et pathologique dans cette tranche d'âge. Ce travail nous a aussi permis de préciser l'histoire naturelle du RGO physiologique et pathologique, les modalités thérapeutiques et le retentissement du RGO ».
1 à 3 régurgitations : de 45 % à 1 mois à 12 % à 12 mois
Les 157 nourrissons - nés à terme, sains et eutrophes - ont été sélectionnés entre octobre et décembre 2009 à la maternité du CHU de Besançon. Les parents devaient répondre à 5 questionnaires I-GERQ qui différentient les RGO physiologiques et pathologiques à 1, 3, 6, 10 et 12 mois.
Le taux de réponse aux questionnaires a été compris entre 80,9 et 89,2 %.
La prévalence des régurgitations a été analysée selon l'âge :
1 à 3 régurgitations : 45 % des enfants de 1 mois, 42 % à 3 mois, 39 % à 6 mois, 15 % à 10 mois et 12,5 % à 12 mois ;
4 à 6 régurgitations : 20 % à 1 et 3 mois, 10 % à 6 mois, 2 % à 10 mois et 0% à 12 mois ;
Plus de 6 régurgitations : 6 % à 1 mois, 5 % à 3 mois, 5 % à 6 mois, 0 % à 10 et 12 mois.
|
Beaucoup de préparations alimentaires, trop de médicaments
Globalement, les traitement les plus prescrits étaient des préparations pour nourrissons épaissies (18,1 %), des préparations associées à des épaississants (0,70 %), des épaississants (2,9%), du Motilium® (5,7 %), du Gaviscon® (10,10 %) et des IPP (2,9 %). « Près de 80 % des prescriptions médicamenteuses - et non alimentaires - étaient donc non justifiées », explique le Dr Curien-Chotard.
Parmi les facteurs de risque, les auteurs retiennent les antécédents familiaux de RGO et le tabagisme paternel, alors qu'ils excluent le sexe, le mode d'alimentation et le tabagisme maternel.
Rassurer, proposer des règles hygiéno-diététiques
Enfin, cette étude a permis d'évaluer le retentissement du RGO sur le comportement de l'enfant : cette pathologie est associée à un retard de l'acquisition de la tenue assise à 6 mois et à la survenue de troubles du sommeil à 12 mois.
Pour le Dr Curien-Chotard, « même si notre étude est limitée du fait des biais d'inclusion et du mode d'analyse des symptômes fondée sur la seule appréciation des parents, il semble que la prévalence du RGO soit élevée dans la population des enfants de moins d'un an, mais ce chiffre est assez similaire à ceux qui étaient connus jusque-là.
Si cette pathologie évolue spontanément favorablement avec l'âge, elle reste encore trop souvent traitée par des médicaments alors qu'un accompagnement parental, une réassurance et des règles hygiéno-diététiques devraient être suffisantes dans la plupart des cas ».
Citer cet article: RGO du nourrisson : 80 % de prescriptions médicamenteuses non justifiées - Medscape - 29 avr 2013.
Commenter