Grippe H7N9 en Chine : et si c'était elle, la pandémie attendue…

Dr Isabelle Catala

Auteurs et déclarations

5 avril 2013

Grippe aviaire H7N9 en Chine : et si c'était elle, la pandémie attendue…

Une souche de grippe aviaire a fait 6 décès en Chine. Cette souche qui ne tue pas les volailles aurait-elle un potentiel pandémique ?
5 avril 2013

Shanghai, Chine — Dans la famille des grippes aviaires, une nouvelle souche au potentiel pandémique H7N9 fait parler d'elle depuis quelques semaines en Chine. A ce jour, elle est responsable de 6 décès et 14 cas d'infection ont été répertoriés.

Tout a commencé à la mi-mars, avec dans un premier temps la détection de 3 cas de décès d'origine inconnue à Shanghai et dans la province de Anhui. Ces personnes jeunes (45 et 48 ans) ou moins jeunes (83 ans) sont mortes des suites d'une infection respiratoire basse foudroyante. Seule une d'entre elles étaient en contact avec de la volaille [1].

Le CDC chinois - aidé d'un maillage dense d'un réseau de surveillance des maladies respiratoires - a rapidement procédé à une analyse virale détaillée et a conclu qu'il s'agissait d'une nouvelle forme du virus H7N9, différente de celle connue jusqu'alors. Ce virus avait déjà sévit en effet dans le pays entre 2003 et 2009 - avec un maximum de 6 décès annuels en 2006 - pour un total de 25 morts. En 2008, un virus H7N9 avait été isolé en Mongolie mais n'avait pas été considéré comme très pathogène [2].

Contamination interhumaine ou non ?


Rapidement, 88 personnes de l'entourage des patients ont été testées. Aucune n'était porteuse du virus, chose rassurante et semblant signifier que le potentiel de contamination interhumaine est limité.

Pourtant, quelques jours plus tard, on apprenait que deux des fils du plus vieux patients et un autre membre de sa famille avaient aussi été hospitalisés pour des symptômes respiratoires - l'un d'entre eux en était même mort - mais aucune trace du virus H7N9 n'avait été retrouvée.

Non létal chez l'animal, mortel chez l'homme


Ce virus est doté d'un potentiel pandémique puisque la population humaine n'a pas été exposée massivement par le passé aux virus H7 ou N9 et ne possède donc pas des anticorps dirigés contre ce virus.

Depuis le 1er avril, l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) suit de très près la situation, mais le virus est encore considéré comme un virus animal et non humain.

Pourtant, depuis cette date le nombre des cas humains augmente de façon régulière et le 5 avril, le nombre des décès était évalué à 6 et le nombre de cas avérés à 14 [3].

Face à l'afflux de questions des pays étrangers, le CDC chinois a laissé filtrer de nouvelles informations. Le virus serait d'origine aviaire, il n'aurait pas de lien avec les cadavres de porcs repêchés dans la rivière Huangpu à Shanghai à la fin du mois de mars, mais des tests plus précis sont en cours. Chez les volailles, il semblerait que ce virus puisse se développer sans causer la mort de ses hôtes.

Chez l'homme, la maladie se traduirait par une forte fièvre, de la toux et des signes d'infection respiratoire basse. Ces signes s'aggraveraient en 5 à 7 jours dans un tableau de pneumonie dans un premier temps puis de détresse respiratoire et de défaillance multi-viscérale.

Sensible aux inhibiteurs de la neuraminidase


Le séquençage génomique et antigénique de ce virus suggère qu'il pourrait être sensible aux inhibiteurs de neuraminidase qui seraient efficaces s'ils étaient utilisés en début d'infection. Le gène de la protéine N de ce virus est similaire à celui d'une souche H11N9 isolée en Corée en 2011, en Chine en 2010 et en république tchèque en 2005, toutes des souches aviaires. Celui de la protéine H a déjà été isolé lui aussi dans des souches aviaires. Il semble donc que le virus soit purement aviaire, contrairement au virus H1N1 qui était le fruit d'un réarrangement entre des virus aviaires, porcins et humains.

Le séquençage montre aussi que le virus H7N9 a acquis une mutation spécifique qui lui permet de se fixer au niveau des cellules pulmonaires humaines par le biais d'un récepteur. C'est l'absence de contacts précédents chez l'homme - donc d'antigénicité contre ce virus - qui fait tout le potentiel pathogène de ce virus. Reste que pour l'instant il semble peu transmissible d'homme à homme mais c'est une donnée qu'il va falloir particulièrement surveiller dans les jours à venir [5].

Pas de vaccin pré-pandémique


A l'heure actuelle, aucun vaccin pré-pandémique H7N9 n'a été développé, mais 6 vaccins sont spécifiquement dirigés contre H7 (H7N2, H7N7, H7N3, H7N1) sont en cours de développement.

Le 2 avril, un éditorial est paru dans la revue Nature [6] soulignant le potentiel pandémique de ce virus. Le Pr Malek Perris (Hong Kong), découvreur du SRAS CoV y souligne qu'il « prend ces cas au sérieux mais qu'il n'existe pas de preuve actuellement d'une possible transmission interhumaine du virus ».

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