Trois effets collatéraux de l'affaire des pilules de 3e et 4e génération
Vente de contraceptifs, réaction de Servier, indignation d'un syndicat de médecins : la crise sanitaire liée aux pilules de 3e et 4e génération n'en finit plus de faire des vagues. 5 avril 2013Paris, France - La crise sanitaire liée aux pilules de 3e et 4e génération n'en finit plus de faire des vagues. Premier effet collatéral, la répartition des contraceptifs vendus en France a évolué [1]]. Deuxième effet : les laboratoires Servier se sont fâchés [2]], enfin, un syndicat de médecins s'est énervé et a obtenu gain de cause [3].
La vente des pilules de 3 et 4eme génération a baissé de 34%
L'épisode des risques thrombotiques liés aux pilules de 3e et 4e génération a laissé des traces chez les utilisatrices comme en témoigne l'analyse des ventes de contraceptifs en France qui a globalement baissé en l'espace d'un an. Toutes générations confondues, la vente des contraceptifs oraux combinés (COC) a diminué de 2% entre février 2012 et 2013. En revanche, sur la même période, les ventes de COC de 1re et 2e génération ont augmenté de 27%, tandis que celles de 3e et 4e génération ont baissé drastiquement de 34%. La vente de Diane 35®, dont l'Autorisation de mise sur le marché (AMM) a été suspendue fin janvier, a baissé de 62%. Les données du Conseil national de l'ordre des pharmaciens (CNOP) fournissent des chiffres similaires à ceux de l'ANSM. Un phénomène de baisse des ventes des autres contraceptifs estroprogestatifs non oraux, comme les anneaux vaginaux, a également été constaté : elle est de 13% en février.
Augmentation des ventes de contraceptifs d'urgence
En revanche, les autres contraceptifs (implants, progestatifs...) connaissent une hausse de 24% sur la même période, dont 44% pour les seuls stérilets. « Nous estimons aussi que la vente de contraceptifs d'urgence a augmenté en un an », ajoute le Dr Mahmoud Zureik (pôle épidémiologie, ANSM).
Mais globalement, la vente de contraceptifs marque une baisse de 1,4% sur un an. L'ANSM souhaite délivrer un message de prévention à l'ensemble des femmes d'ici l'été, a souligné le Pr Dominique Maraninchi, directeur général de l'ANSM, pour les prévenir de tous les dangers liés à l'utilisation des COC. La Ministre des Affaires sociales et de la Santé, Marisol Touraine devrait, elle, présenter sa politique de contraception en avril prochain.
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Servier furieux se fend d'un communiqué
Lors de l'annonce des décès causés par les COC[5], le Dr Mahmoud Zureik a tenu à établir une « grande différence », entre l'affaire du Médiator et celle des pilules. « Le Médiator n'a pas d'utilité, alors que les contraceptifs oraux ont une grande importance en matière de santé publique, c'est une différence majeure, a-t-il affirmé. Deuxième différence, les risques du Médiator étaient connus de l'industriel mais cachés. Les risques des contraceptifs oraux ont été sous-estimés, ce qui est différent. Troisième point : le nombre de personnes qui prennent des contraceptifs oraux est dix fois plus important que pour le Médiator, pour un risque six fois moindre. »
Des propos qui n'ont pas été appréciés par les laboratoires Servier, lesquels ont répliqué via un communiqué de presse, en dénonçant la supposée inutilité du Médiator : « Les propos du professeur Zureik sont infondés ; en effet, l'efficacité du Médiator était avérée par les indications de l'AMM ainsi que par plusieurs études des années 2000. » Tout en affirmant qu'aucun risque n'avait été caché par l'industriel : « lors de l'audience du 11 décembre 2012 pour la mise en examen pour homicide et blessures involontaires du Dr Jacques Servier et de quelques sociétés du Groupe Servier, à l'issue de l'interrogatoire de première comparution, les juges, dans le libellé de la mise en examen qu'ils ont ordonnée, ont exclu toute dissimulation par les laboratoires Servier vis-à-vis de l'Agence du Médicament concernant la pharmacologie, le métabolisme ou les effets secondaires du benfluorex sur toute la période de la prévention, soit de 1995 à 2009. »
Mentions manuscrites : la CSMF obtient gain de cause
Enfin, on se rappelle que la Confédération syndicale des médecins français (CSMF) avait exprimé sa totale désapprobation avec la recommandation de l'ANSM qui imposait aux médecins prescripteurs de confirmer « par écrit à la main sur l'ordonnance qu'il a bien vérifié que l'état de santé de sa patiente était bien compatible avec ce type de contraceptifs oraux. ». Le syndicat a été entendu. La Ministre de la Santé a en effet annoncé fin mars qu'elle avait demandé à l'ANSM le retrait de cette mesure, « reconnaissant qu'il n'y a aucune raison de différencier la pilule des autres médicaments, tout médicament comportant un risque [4]».
Citer cet article: Trois effets collatéraux de l'affaire des pilules de 3e et 4e G - Medscape - 5 avr 2013.
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