Tabagisme : même chez le senior, le sevrage est bénéfique
Compte tenu des bénéfices apportés, notamment sur le plan cardio-vasculaire, il n'y a pas de limite d'âge pour encourager le sevrage tabagique. Le Pr D. Thomas explique pourquoi. 25 janvier 2013Paris, France - Un sevrage tabagique initié après 60 ans réduit le risque de décès de 25%, d'où la nécessité d'encourager les fumeurs âgés à mettre fin à leur consommation de tabac, le bénéfice sur les mécanismes cardio-vasculaires survenant « extrêmement rapidement », a rappelé le Pr Daniel Thomas (hôpital de la Pitié-Salpêtrière, Paris), lors d'une intervention [1] aux XXIIIèmes Journées européenne de la Société française de cardiologie (SFC), qui se sont déroulées du 16 au 19 janvier, à Paris.
Les personnes âgées ne constituent pas une population cible des campagnes de prévention et de lutte contre le tabagisme et le personnel soignant a tendance à adopter une attitude laxiste face à des patients âgés fumeurs. « Parmi les fumeurs, beaucoup sont à un âge avancé, et lorsqu'ils expriment le souhait d'arrêter, ils se retrouvent bien souvent face à des médecins peu disposés à les aider », a souligné le Pr Thomas.
Si la proportion de fumeurs dans la population diminue avec l'âge, « elle s'élève encore chez les plus de 65 ans, à 10% chez les hommes et 6% chez les femmes », selon des estimations du baromètre santé de 2010. Selon le cardiologue, il est d'autant plus important de prendre en compte le tabagisme de ces patients, que le risque de décès lié au tabac, en particulier par infarctus, est très élevé au-delà de 60 ans.
Des bénéfices multiples
Après l'arrêt du tabac, « le bénéfice en termes de diminution du risque de maladies cardiovasculaires survient extrêmement rapidement, contrairement à celui associé au risque de développer un cancer ou une bronchopathie. En 24 heures, la disparition du monoxyde de carbone améliore immédiatement la capacité de transport en oxygène du sang. En 15 jours, après le renouvèlement complet des plaquettes, l'agrégation plaquettaire est corrigée, ce qui réduit le risque de thrombose ».
Il reste fondamental d'initier un sevrage tabagique au plus tôt, mais « il n'est jamais trop tard pour arrêter, car il y aura toujours un effet sur le sur-risque de développer une maladie coronarienne aigu, à condition toutefois que les artères n'aient pas été trop abimées sur la durée par la consommation de tabac », souligne le Pr Thomas.
Par ailleurs, un sevrage peut améliorer la survie post-opératoire, le risque de décès après chirurgie étant plus élevé chez les fumeurs par rapport aux non-fumeurs, ajoute-t-il. « Selon les données d'Euroscore (European System for Cardiac Operative Risk Evaluation), la mortalité après chirurgie cardiaque s'élève à 14% pour les patients fumeurs, contre 2% chez les non-fumeurs, en raison de complications respiratoires. Et, parmi les fumeurs, les plus de 60 ans sont ceux qui présentent le plus de risque de décès post-opératoire ».
Un taux de succès identique à celui des plus jeunes
Ce bénéfice concerne même les « petits fumeurs », qui ne sont pas pour autant confrontés à un moindre risque, puisqu'« une à quatre cigarettes par jour pendant 30 ans multiplie par trois le risque de décès par maladies cardio-vasculaires ou par cancer », précise le cardiologue. « Il n'y a pas de seuil en dessous duquel le risque est nul ».
En prévention secondaire, qui concerne globalement les sujets âgés, le bénéfice du sevrage tabagique après un infarctus est incontestable, car « il permet une diminution du risque de récidive et de mortalité, de respectivement 32% et 36% », rappelle le Pr Thomas.
Souvent, les patients âgés désirent arrêter de fumer, mais des doutes persistent sur leur capacité à engager un sevrage et à le respecter, surtout pour les fumeurs de longue durée. Or, « il a été prouvé qu'un sevrage engagé avant ou après 60 ans présente le même taux de succès. Dans le premier mois, le taux d'échec est tout aussi élevé, puis à un an, il y a aucune différence significative ».
Pour renforcer la motivation, le cardiologue suggère de projeter l'âge du sujet en considérant le risque cardiovasculaire lié au tabagisme. « Le patient peut être sensibilisé en lui annonçant qu'un fumeur de plus 60 ans a, en termes de risque cardiovasculaire, dix ans de plus. S'il a arrêté de fumer depuis dix ans, la baisse du sur-risque lui fait gagner quatre années d'espérance de vie. S'il a arrêté depuis 10 à 20 ans, il gagne six années, et s'il a arrêté depuis plus de 20 ans, le retrouve l'espérance de vie d'un non-fumeur ».
Enfin, il est important de souligner le gain obtenu par le patient en termes de qualité de vie après l'arrêt du tabac, sur le plan respiratoire, mais aussi sur les capacités fonctionnelles ou la perception du goût. « Des arguments efficaces, surtout chez les personnes âgées ».
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Citer cet article: Tabac : même après 60 ans, le sevrage est bénéfique - Medscape - 25 janv 2013.
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