La SFHTA publie ses nouvelles recommandations sur l'HTA de l'adulte
La SFHTA publie ses nouvelles recommandations sur la prise en charge de l'HTA de l'adulte. Au menu, une volonté de simplicité, des innovations, comme la consultation d'annonce de l'HTA. 3 janvier 2013Paris, France - La Société Française d'HTA (SFHTA) vient de publier ses recommandations sur la prise en charge de l'HTA de l'adulte. Le Pr Jacques Blacher (Hôtel-Dieu, Paris), qui en est le premier signataire, les a présentées et commentées lors des 32èmes Journées de l'HTA[1].
On peut relever trois particularités méthodologiques de ces recommandations.
Premièrement, des analyses concentrées sur l'essentiel. « Nous avons analysé 40 publications », précise le Pr Blacher. A la fois par volonté de « faire vite », et « pour ne prendre en considération que les précédentes recommandations ou les méta-analyses, plutôt que les essais en tant que tels. Prendre en compte des essais très récents, ou très médiatisés, peut en effet comporter des biais ».
Deuxièmement, « l'ambition d'être utile ». Selon le Pr Blacher, « ces recommandations sont lisibles par les patients ».
Outre la rédaction, accessible, les nouvelles recommandations sont très structurées. Elles comportent trois volets : « Avant de débuter le traitement », « Plan de soin initial », et « Plan de soin à long terme ». Ces trois chapitres comportent respectivement quatre, cinq et six points - « soit 15 recommandations pour toute la vie de l'hypertendu », souligne le Pr Blacher.
Dernier aspect : une tentative pour mettre à plat la question des conflits d'intérêt, en l'approfondissant. C'est précisément pour cette question que les précédentes recommandations HAS de 2005, avaient été invalidées. Dans le nouveau document, les auteurs ont fait un choix : déclarer qu'ils ont des liens d'intérêt mais demander qu'ils soient examinés par une « autorité supérieure », selon l'expression du Pr Blacher - lequel n'a d'ailleurs pas projeté de diapos portant ses propres liens d'intérêt, en expliquant que « ce qui compte, ce sont les liens d'intérêt des membres du groupe de travail et du groupe de lecture ».
S'agissant de ces liens, ils font, dans les recommandations, l'objet de la phrase suivante : Les signataires de ce document indiquent avoir des liens d'intérêt avec des industries qui commercialisent des produits de santé. Ils déclarent avoir réalisé ces recommandations en toute indépendance.
Sans entrer dans le détail, le Pr Blacher juge que la question des liens d'intérêts et des conflits potentiels, constitue « un problème complexe, qui plombe nos relations ». Il demande donc qu'un « collège de la HAS juge de l'indépendance de ces recommandations ».
C'est en somme une tentative pour distinguer la lettre et l'esprit de la loi, qui pourrait susciter pas mal de commentaires. Entre autres et notamment parce qu'elle implique bien sûr un collège qui soit, lui, parfaitement indépendant (*).
« Avant de débuter le traitement »
Dans leur premier volet, « avant de débuter le traitement », les nouvelles recommandations soulignent la place de la confirmation de l'HTA en dehors du cabinet, par MAPA ou automesure. Hormis les cas d'HTA sévère, « on peut se donner un peu de temps pour cette confirmation », note le Pr Blacher.
Sur le plan biologique, le bilan est celui classiquement recommandé par l'OMS. On remarque que la recherche d'une microalbuminurie n'est recommandée que chez les patients diabétiques, contrairement aux recommandations européennes. « Il n'existe pas de résultat dans la littérature montrant que ce dépistage présente un intérêt, en dehors du patient diabétique », explique le Pr Blacher à ce propos.
Insistance, aussi, sur les mesure hygiéno-diététiques, et, nouveauté, mise en place d'une « consultation d'information et d'annonce de l'HTA ».
« Il doit s'agir d'une consultation dédiée », insiste le Pr Blacher. « Elle sert à annoncer le diagnostic, informer sur l'HTA et son risque, sur le rapport risque/bénéfice du traitement, et fixer avec le patient les objectifs thérapeutiques ».
« Le plan de soin initial »
Second volet, le plan de soin initial. L'objectif, à atteindre dans les 6 premiers mois, est de 130-139 mmHg, et de moins de 90 mmHg.
La PAD n'est donc pas bornée vers le bas. Que faire, en effet, face à des valeurs de 145/75 mm Hg ? Pour le Pr Blacher, il faut traiter, ce qu'une borne inférieure de PAD pourrait inciter à ne pas faire.
On note également qu'il n'existe pas de résultats suffisants sur l'automesure pour recommander des valeurs spécifiques à ce contexte, même si l'on sait qu'il s'agirait de valeurs plus basses.
Enfin, « si une atteinte d'organe cible continue de progresser malgré le contrôle, il faut abaisser l'objectif », relève le Pr Blacher.
Les cinq classes d'antihypertenseurs qui ont démontré une prévention des complications cardiovasculaires chez les hypertendus sont incluses. Et, en cas d'échec d'une monothérapie, les bithérapies fixes, et si nécessaire une trithérapie, sont recommandées - « sans attendre », précise le Pr Blacher.
Enfin, une notion encore peu répandue fait son apparition : la notion de persistance.
Elle désigne, pour un traitement, la probabilité qu'il soit maintenu au-delà de un an. Elle incorpore donc une dimension d'efficacité et une dimension de tolérance. Et le Pr Blacher souligne que « la persistance semble plus élevée lorsqu'on initie le traitement avec un ARA-II ou un IEC ».
« Le plan de soin à long terme »
En ce qui concerne le plan de soins à long terme, c'est-à-dire à plus de 6 mois, on remarque deux points sur lesquels les recommandations mettent l'accent : l'observance et son évaluation, et l'attitude vis-à-vis de la PA après un évènement cardiovasculaire.
S'agissant de l'observance, « il faut personnaliser le traitement, par des moyens qui vont de la simplification du schéma thérapeutique au pilulier », rappelle le Pr Blacher. « La question de l'observance est une question à laquelle il faut penser à chaque consultation ».
Quant à la prise en charge de l'HTA après un évènement, il est recommandé de conserver l'objectif tensionnel (130-139 / < 90 mmg Hg, confirmé en dehors du cabinet). Il est également recommandé d'ajuster le traitement « avec introduction des médicaments antihypertenseurs ayant l'indication préférentielle dans la pathologie ».
Après un évènement tel qu'un AVC, on a tendance à faire passer le contrôle tensionnel au second plan », note le Pr Blacher.
L'évaluation du risque cardiovasculaire n'est pas au programme
Enfin, ce qu'on ne trouvera pas dans le nouveau document : des recommandations sur l'évaluation du risque cardiovasculaire global. Il ne s'agit pas de désintérêt ; on trouve par exemple mentionné, parmi les conseils hygiéno-diététiques, l'arrêt du tabac, qui n'impacte pourtant pas directement la PA. Simplement, « Nous n'avons pas émis de recommandation sur l'évaluation du risque cardiovasculaire global parce qu'il n'y a pas d'intérêt démontré de cette évaluation », explique le Pr Blacher. « Que le risque soit élevé ou modéré, la prise en charge sera la même ».
Au-delà de cette question pratico-pratique, l'enjeu est peut-être aussi de savoir qui l'on est et d'où l'on parle. « Nous ne nous sommes pas préoccupés des lipides et du cholestérol », note le Pr Blacher. Et d'épingler au passage l'European Society of Cardiology, qui, en recommandant les valeurs 140/80 mm Hg chez le diabétique après avoir plusieurs fois changé de cible, « ajoute à la confusion ». Haro, donc sur « les débordements des sociétés savantes ». Il est vrai que lorsqu'on tire son autorité de l'expertise, il est important de connaitre les limites de celle-ci.
(*) « Qui va les garder, ceux-là, les gardiens ? », demandait Juvénal.
Citer cet article: HTA de l'adulte : nouvelles recommandations de la SFHTA - Medscape - 3 janv 2013.
Commenter