Los Angeles, Californie - La colchicine au long cours et à petite dose pour stabiliser la plaque d'athérome ? Cette fois-ci, ce ne sont pas des cardiologues italiens mais des australiens qui ont testé l'hypothèse. Le Dr Stefan Nidorf (Heart Research Institute of Western Australia, Perth) a rapporté les résultats positifs de l'essai LoDoCo au congrès de l'AHA 2012. Après deux ans de traitement par colchicine à 0,5 mg/j, des patients coronariens stables tirent un bénéfice significatif en terme de réduction des événements cardiovasculaires : SCA (non lié à un stent), AVC et arrêts cardiaques.
« Quand on regarde la composition des plaques lors d'un SCA, on voit qu'elle contient des plaquettes et de la fibrine sur lesquels nous agissons avec les antiplaquettaires et les antithrombotiques mais aussi de très nombreux polynucléaires neutrophiles. Ce troisième composant des plaques instables a été laissé de côté. L'effet anti-inflammatoire de la colchicine, utilisé notamment dans la goutte, passe par une inhibition des fonctions des neutrophiles » a expliqué le Dr Nidorf.
Et si effet de la colchicine il y a, « ce dernier vient en complément des effets de l'aspirine et des statines » a souligné l'investigateur.
Un essai sur 532 coronariens stables qui sort…positif
Pour tester l'hypothèse, l'étude LoDoCo (Low Dose Colchicine for Secondary Prevention of Cardiovascular Disease) a sélectionné 901 coronariens, âgés de 35 à 85 ans avec une sténose coronaire prouvée à l'angioplastie et stable depuis 6 mois. Ils ne devaient pas avoir de comorbidité majeure, pouvoir tolérer la colchicine, ne pas en prendre pour une autre affection et ne pas devaient avoir été revascularises (le cas échéant) depuis moins de 10 ans.
Après la période de vérification de la tolérance digestive du traitement (un mois), les investigateurs ont randomisé 532 patients entre un groupe colchicine sous 0,5 mg/jour et un groupe placebo, les deux groupes étant sous traitement médical optimal (aspirine et/ou clopidogrel : 93,5%, statine à haute dose (40mg d'atorvastatine ou équivalent) : 95%.
Les deux populations de l'essai, colchicine et témoin, sont comparables, à l'exception d'un peu plus de patients sous antiplaquettaire dans le bras témoin (94 % vs 93%) et d'un peu plus sous statine dans le groupe colchicine (96% vs 94%).
« Passé le stade des effets secondaires digestifs initiaux, on sait que la colchicine est bien tolérée au long cours », a commenté le Dr Nidorf. Dans LoDoCO, un tiers des patients (33%) n'ont pas pu être inclus et 8% ont refusé de participer.
La durée de l'essai était au minimum de 2 ans. Le critère primaire de jugement comprend les SCA (non liés et lié à un stent), les AVC non cardio-emboliques et les arrêts cardiaques extra-hospitaliers.
Réduction significative des évènements à 3 ans
A l'issue d'un suivi médian de 3 ans pour 532 patients (11% de sortie d'essai pour cause d'intolérance digestive dans le mois suivant l'inclusion), le critère de jugement primaire est réduit de 67% dans le groupe sous colchicine. Cet effet préventif est principalement lié à la réduction des SCA non liés à un stent : respectivement 1,4% vs 5,6% d'IDM et 1,7% vs 6,4% d'angor instable.
La réduction des événements est présente dans tous les sous-groupes de patients (plus ou moins 65 ans, diabétique, avec ou sans BB, avec ou sans IEC, ATCD de revascularisation ou pas).
Placebo n=250 |
Colchicine n=282 |
HR ; IC 95% |
|
Critère primaire (SCA, AVC, arrêt) |
40/250 (16%) |
15/282 (5,3%) |
0,33 ; 0,18-0,60 |
SCA |
34 (13,6%) |
13 (4,60%) |
0,33; 0,18-0,63 |
SCA lié à un stent |
4 (1,60%) |
4 (1,40%) |
NS |
SCA non lié à un stent |
30 (12,0%) |
9 (3,10%) |
0,21; 0,09-0,50 |
Arrêt cardiaque non hospitalier |
2 (0,80%) |
1 (0,35%) |
0,47; 0,04-5,15 |
AVC ischémique non cardio-embolique |
4 (1,60%) |
1 (0,35%) |
0.23; 0.03-2.03 |
« En réduisant les processus inflammatoires identifiés au sein des plaques, une petite dose de colchicine au long cours limite le risque d'événement vasculaire aigu, chez des angoreux stables » a commenté le Dr Nidorf. « La colchicine est un vieux médicament que l'on connait bien, peu onéreux et sans toxicité majeure. Il reste à savoir comment l'utiliser dans la maladie coronaire stable. »
D'ores et déjà, le Dr Nidorf a annoncé avoir obtenu le soutien du ministère de la santé australien pour lancer un nouvel essai randomisé, faute de sponsors de l'industrie pharmaceutique…
Ce travail, mené par le Heart Research Institute australien, n'a bénéficié d'aucune source de financement extérieure. |
Actualités Heartwire © 2012
Citer cet article: Colchicine en prévention secondaire chez le coronarien stable : ça marche - Medscape - 20 nov 2012.
Commenter