Accompagner la grossesse de la femme obèse pour limiter les risques

Vincent Richeux

Auteurs et déclarations

15 octobre 2012

Accompagner la grossesse de la femme obèse pour limiter les risques

Selon le Dr Berdah, une prise en charge adaptée est recommandée chez les femmes obèses désirant une grossesse, en particulier lorsque l'IMC est supérieur à 35.
15 octobre 2012

Tarbes, France - Pour limiter les complications obstétricales et néonatales, une prise en charge adaptée est recommandée chez les femmes obèses désirant une grossesse, en particulier lorsque l'Indice de masse corporel (IMC) dépasse 35 Kg/m2, selon la gynécologue Julianne Berdah (hôpital de la Pitié Salpetrière, Paris), qui est intervenue la semaine dernière à Tarbes, lors des 26èmes Journées Infogyn[1].

La dernière enquête ObEpi de 2009 [2], réalisée tous les trois ans depuis 1997, a mis en évidence une hausse de 70% en 12 ans de la prévalence de l'obésité en France, qui est passée de 8,5% en 1997 à 14,5% de la population adulte en 2009. Le nombre de personnes obèses est ainsi évalué à près de 6,5 millions, soit 3 millions de plus par rapport à 1997.

Les données de 2009 montrent que la population obèse se répartit entre 10,6% d'obésités modérées (IMC compris entre 30 et 34,9 kg/m2), 2,8% d'obésités sévères (IMC entre 35 et 39,9 kg/m2) et 1,1% d'obésités massives (IMC de 40 kg/m2 et plus). Depuis 1997, l'obésité sévère a plus que doublé et l'obésité massive a presque quadruplé.

« L'obésité est prépondérante chez les femmes en âge de procréer, c'est-à-dire entre 25 et 35 ans », souligne le Dr Berdah. « Les études épidémiologiques montrent que les deux tiers des femmes américaine en âge de procréer sont en surpoids ou obèse. En France, il s'agit de 40 à 45 % des femmes de 25 à 35 ans », ajoute-t-elle.

L'obésité est associée à davantage de complications obstétricales et néonatales. Avec « un risque plus élevé d'hypertension, de pré-éclampsies, d'infections urinaires, de diabète gestationnel, ainsi qu'un risque de fausse couche multiplié par trois. Les naissances sont aussi plus souvent déclenchées, d'où un taux plus élevé de césarienne », énumère la gynécologue.

Ces risques sont majorés selon l'IMC : « le diabète gestationnel est ainsi plus fréquent lorsque l'IMC est supérieur à 35 ou 40, tout comme l'hypertension artérielle et l'éclampsie ». L'obésité de la mère influe également sur le développement de l'enfant, puisqu'elle est « associée à davantage de malformations fœtales », souligne le Dr Berdah.

Jusqu'à 5 mg de folates par jour


Selon elle, la prise en charge des femmes obèses avant une grossesse passe tout d'abord par une mesure du taux sérique en vitamine D, « d'autant plus bas chez ces femmes, que l'IMC est élevé », en vue d'une éventuelle supplémentation, qui devra être régulière.

La vitamine D assure un bon capital osseux pour la mère et l'enfant. « Des études ont également montré qu'une carence est associée à un risque plus élevé de pré-éclampsie, de retard de croissance in-utéro et de diabète gestationnel », rappelle-t-elle. Par ailleurs, selon une étude récente [3], une supplémentation en vitamine D permet de retrouver des cycles ovulatoires en cas de dystrophie ovarienne.

En ce qui concerne la vitamine B9, la Haute autorité de santé (HAS) recommande une supplémentation à raison de 400 µg par jour lors de la visite pré-conceptionnelle et pendant les dix semaines qui suivent la conception [4]. « Pour les femmes dont l'IMC est supérieur à 35, il est envisagé une supplémentation à 5 mg par jour, comme pour les femmes diabétiques ou ayant eu des antécédents d'anomalies de fermeture neurale », afin de limiter les complications.

Pour ce qui est de la prise de poids optimale pendant la grossesse, les recommandations les plus largement adoptées sont celles de l'Institute of Medecine (IOM) [5]. Alors qu'elle peut atteindre 18 kg pour les femmes présentant un état nutritionnel normal (IMC compris entre 18,5 et 24 kg/m2), elle ne doit pas dépasser 11 kg pour les femmes en surpoids (IMC compris entre 25 et 29,9 kg/m2) et 9 kg pour les femmes obèses, « voire 5 à 6 kg pour un IMC supérieur à 35», indique la gynécologue.

Informer au mieux


Pour limiter la prise de poids gestationnel, un régime adapté privilégiant la qualité à la quantité peut être suggéré, en considérant toutefois que « la restriction calorique ne fonctionne pas », estime le Dr Berdah, qui préfère sensibiliser aux bienfaits d'une activité physique  régulière et à l'adoption d'une meilleure hygiène de vie. L'activité physique peut être de la marche ou de la natation, plus adaptées.

La chirurgie bariatrique peut présenter un intérêt, « la prévalence de macrosomie s'avérant alors plus faible ». L'obésité à venir des enfants « se retrouve également réduite d'un facteur 3 ». Toutefois, étant donné que la perte rapide de poids s'accompagne d'un déficit en vitamines et minéraux, il existe un risque pour l'enfant si la mère en vient à négliger sur le long terme ses supplémentations, notamment en vitamines B1 et B9, estime la spécialiste.

Selon elle, le meilleur moyen de sensibiliser ces femmes et de les amener à changer de mode de vie est de les informer sur les risques de complications liés à l'obésité. « C'est un facteur déterminant pour garantir une stratégie de prévention efficace », la grossesse étant « un temps d'apprentissage pendant lequel la future mère est disposée à adopter des comportements bénéfiques pour l'enfant », à condition d'être bien informée.

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