Le décret sur les ruptures d'approvisionnement considérablement allégé

Jacques Cofard

Auteurs et déclarations

9 octobre 2012

Le décret sur les ruptures d'approvisionnement considérablement allégé

Le décret a été considérablement allégé, par rapport au projet de décret soumis à l'autorité de la concurrence. Les associations d'usagers dénoncent des pressions des lobbyings.
9 octobre 2012

Paris, France - C'est un décret sur les ruptures d'approvisionnement considérablement allégé qui est paru au Journal officiel du 1er octobre dernier [1]]. Rappelons que la loi sur le renforcement de la sécurité sanitaires des médicaments [2], avait en effet prévu, via la publication de ce décret, la mise en place d'un dispositif pour contrer ces ruptures d'approvisionnement qui, pour les pharmacies d'officine, concernaient, entre autres, les antirétroviraux, et pour les pharmacies à usage intérieur (PUI), des anesthésiques. En début d'année, des projets de décrets ont circulé pour concertation. Une version a été soumise en juillet dernier à l'autorité de la concurrence pour avis, dont Medscape.fr s'était procuré une copie. Ce projet de décret prévoyait, à l'encontre des laboratoires et des grossistes répartiteurs, des mesures extrêmement drastiques.

Suppression du plan de gestion de la pénurie


Ainsi, il était prévu la mise en place par les laboratoires d'un plan de gestion de la pénurie pour des médicaments d'intérêt thérapeutique majeur. L'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) avait prévu d'ailleurs d'édicter une liste de ces médicaments d'intérêt thérapeutique majeur, qui devait comprendre, entre autres, des antirétroviraux, des anticancéreux et des antibiotiques. Ce plan de gestion prévoyait l'obligation pour les laboratoires la mise en place de stocks desdits médicaments, l'identification de sites alternatifs de matières premières, et de spécialités de substitution.

Suppression de l'interdiction d'exportation


Les grossistes-répartiteurs étaient par ailleurs astreints de constituer des stocks de ces médicaments d'intérêt thérapeutique majeur pour le marché français. Afin de contrôler l'exportation de ces médicaments, le cumul des activités de grossistes-répartiteurs et de distributeur en gros à l'exportation était interdit. Ces médicaments, en cas de rupture d'approvisionnement, auraient été interdits à l'exportation.

Création de centres d'appels d'urgence


L'ensemble de ces mesures contraignantes n'a pas été retenu par le législateur. Qui n'a conservé, du projet de décret, que quelques mesures à visée informative. Ainsi, ce décret institue la création de centres d'appels d'urgence, à la charge des laboratoires : « Les établissements pharmaceutiques exploitants mentionnés au 3° de l'article R. 5124-2 disposent de centres d'appel d'urgence permanents accessibles aux pharmaciens d'officine, aux pharmaciens de pharmacie à usage intérieur définis à l'article L. 5126-1 et aux pharmaciens responsables ou délégués des grossistes-répartiteurs ». Ces centres d'appels d'urgence ont pour mission de prévenir toute rupture d'approvisionnement : « Ces centres sont organisés de manière à prendre en charge à tout moment les ruptures d'approvisionnement qui concernent les médicaments et à permettre la dispensation effective de la spécialité manquante. Cette prise en charge se fait en cas de rupture effective ou de manière anticipée lorsque la rupture est confirmée par le grossiste-répartiteur ou le dépositaire. L'exploitant informe trimestriellement l'agence régionale de santé dans le ressort de laquelle est le pharmacien des approvisionnements d'urgence en mentionnant chaque destinataire et les quantités fournies. »

Participation des grossiste-répartiteur à la PDS


Les exploitants, grossistes-répartiteurs, pharmaciens d'officine et de PUI pourront informer les exploitants pharmaceutiques de toute rupture d'approvisionnement, en tenant au courant l'agence régionale de santé. L'exploitant, pour sa part, informe l'agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) de toute rupture d'approvisionnement, et des alternatives mises en place pour y pallier. Le décret prévoit également la participation des grossistes répartiteurs à la permanence des soins « le samedi, à partir de 14 heures, ainsi que le dimanche et les jours fériés ».

Fureur des associations d'usagers


La publication de ce décret a suscité le courroux de l'association TRT-5, un collectif interassociatif français qui rassemble neuf associations de lutte contre le VIH/sida. Dans un communiqué [3], le collectif dénonce « un décret sans aucun impact sur les situations génératrices de ruptures d'approvisionnement dans les pharmacies de ville [...] ce décret témoigne de l'impuissance des pouvoirs publics à agir pour protéger les malades, au plus grand bénéfice des industries du circuit du médicament (firmes pharmaceutiques, grossistes répartiteurs) ». En conséquence, le TRT-5 « interpelle la Ministre de la Santé, Marisol Touraine et lui demande de s'engager publiquement à compléter et corriger rapidement le dispositif législatif pour répondre aux demandes des malades ».

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