POINT DE VUE

Nouveaux traitements oraux dans la SEP : la fin des injections ? Dr Dib

Aude Lecrubier

Auteurs et déclarations

28 septembre 2012

Arrivée des traitements oraux dans la SEP : la fin des injections ? Dr Dib

Les nouveaux traitements oraux vont-ils peu à peu détrôner les traitements injectables dans la SEP ? Medscape.fr a demandé son avis au Dr Michel Dib (neurologue, hôpital de la Pitié-Salpêtrière).
28 septembre 2012

Les deux essais de phase III, DEFINE et CONFIRM, tout juste publiés dans le New England Journal of Medicine, ont testé le traitement oral BG-12 (fumarate de diméthyle, Biogen) dans la sclérose en plaque récurrente-rémittente (SEP-R) : ils sont positifs.

Les nouvelles données indiquent que comparé à un placebo, le BG-12 réduit significativement le risque de rechutes (d'environ 20%) et le nombre de lésions cérébrales [1,2].

En parallèle, un autre traitement oral, le teriflunomide (Aubagio®, Sanofi) a reçu une autorisation de mise sur le marché (AMM) de la Food & drug Administration (FDA) dans le traitement de la SEP-R la semaine dernière. L'agence européenne du médicament (EMA), actuellement en cours d'évaluation du rapport bénéfice/risque de la molécule, devrait, elle, se prononcer au premier trimestre 2013

Les nouveaux traitements oraux vont-ils peu à peu détrôner les traitements injectables dans la SEP ? Medscape.fr a demandé son avis au Dr Michel Dib (neurologue, hôpital de la Pitié-Salpêtrière).

Medscape.fr : Quelle place pour les produits oraux dans l'avenir ?

Michel Dib : Actuellement, en première ligne, les patients reçoivent soit des interférons soit de la copaxone® (acétate de glatiramère) et si le handicap progresse, ils reçoivent des immunosuppresseurs comme le natalizumab (Tysabri®) et le fingolimod (Gylenia®).

Dans les années qui viennent, il est clair - à la lumière des nouvelles publications- que les traitements oraux seront indiqués en première ligne comme les interférons et la copaxone®. Il semble évident que les cliniciens vont privilégier les traitements oraux pour des raisons d'adhérence au traitement et de qualité de vie. La pression des patients va être très forte.

En outre, nous avons un recul positif depuis plus d'un an avec le fingolimod qui a montré une efficacité et une tolérance exemplaire.

On ne voit pas pourquoi des patients devraient continuer à utiliser des produits injectables alors que d'autres options similaires et plus simples seront disponibles.

A-t-on un recul suffisant avec ces traitements ?

M.D. : Le seul produit pour lequel nous ayons un long suivi est le teriflunomide (près de 10 ans). Avec le BG-12, le recul est moindre. Le médicament est utilisé depuis une vingtaine d'année en Allemagne dans le psoriasis.

Mais d'une manière générale dans le domaine de la SEP il nous manque les données d'efficacité sur le long terme.

Les études qui évaluent les médicaments dans la SEP ne fournissent malheureusement pas ces données. Ce recul permettrait de montrer si ces produits sont capables d'agir sur le handicap et de modifier l'évolution naturelle de la maladie.

Au vu de ces résultats, le BG-12 semble-il être plus intéressant que les autres produits oraux ?

M.D. : Tenir compte des résultats du BG-12 sur le handicap et de sa non-infériorité par rapport à la copaxone®, ne suffit pas à affirmer sa supériorité par rapport aux autres produits oraux. Il faut qu'il y ait des comparaisons directes entre ces différents produits. De fait, il va être très difficile pour le praticien de savoir avec quel produit il faut commencer.

Pour le BG-12, il existe de réelles questions à se poser au sujet de son efficacité. La comparaison avec la copaxone® dans l'essai CONFIRM me parait étonnante compte tenu de l'absence d'efficacité de la copaxone® sur le handicap, bien notifiée par les autorités de santé. Même s'il s'agissait d'un critère secondaire, comment l'étude pourrait-elle démontrer la supériorité par rapport à un produit qui n'a pas d'efficacité…

En ce qui concerne les effets indésirables, ils sont assez équivalents. Les effets secondaires pour le teriflunomide sont essentiellement gastro-intestinaux (diarrhée, nausée) mais ils entraînent très peu d'arrêt de traitement. Le traitement a, par ailleurs, été associé à des chutes de cheveux. Pour le BG-12, nous observons ces effets gastro-intestinaux mais aussi des bouffées vasomotrices qui peuvent durer plusieurs heures. Aucun effet secondaire majeur n'a été observé avec chacune des deux molécules.

Rappel des études

Dans l'essai randomisé DEFINE, la proportion de patients qui a rechuté est significativement plus basse dans les deux groupes BG-12 que dans le groupe placebo, respectivement 27%, 26% et 46% (p<0,001).

En outre, le taux de rechute annualisée à deux ans est de 17 % dans le groupe BG-12 2cp/j ; de 19% dans le groupe BG-12 3cp/j et de 36% dans le groupe placebo (p<0,001).

La proportion de patients dont l'incapacité a progressé est de 16% dans le groupe BG-12 2cp/j, de 18% dans le groupe BG-12 3cp/j et de 27% dans le groupe placebo.

Enfin, le BG-12 réduit le nombre de lésions visibles à l'IRM (p<0,001).

CONFIRM est également un essai de phase III, randomisé et réalisé en double aveugle. Mené chez plus de 1400 patients atteints de SEP-R par l'équipe du Dr Robert J Fox (Mellen Center for Multiple Sclerosis Treatment and Research, Cleveland Clinic, Cleveland, Etats-Unis), il a comparé l'efficacité des deux mêmes doses de BG-12 à un placebo et à un traitement classique : l'acétate de glatiramère (copaxone®, Teva Pharmaceuticals, injection sous-cutanée quotidienne de 20 mg).

A deux ans, le BG-12 deux fois par jour, trois fois par jour et l'acétate de glatiramère diminuent le risque de rechute de respectivement 44% (p<0,001), 51% (p<0,001) et 29% (p=0,01) par rapport au placebo.

Comparé au placebo, la progression du handicap diminue de respectivement -21%, -24% et -7% avec le BG-12 2cp/j, le BR-12 3cp/j, et l'acétate de glatiramère, mais les résultats ne sont pas statistiquement significatifs.

Les effets secondaires sont similaires dans les deux essais, principalement gastro-intestinaux. Aucun événement indésirable sérieux n'a été rapporté.

Le Dr Dib est consultant pour Genzyme, une filiale des laboratoires Sanofi. Les deux études ont été financées par les laboratoires Biogen. Les liens d'intérêts des auteurs sont nombreux et détaillés sur le site du NEJM.

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