La Polypill promet des artères de 20 ans aux plus de 50 ans

Adélaïde Robert-Géraudel

26 juillet 2012

Londres, Royaume-Uni - Des chercheurs britanniques proposent une cure de jouvence aux 50 ans et plus sans antécédents cardiovasculaires connus : une pilule à prendre chaque soir, associant l'amlodipine (2,5 mg), le losartan (25mg), l'hydrochlorothiazide (12,5mg) et la simvastatine (40 mg).

Cette combinaison de trois antihypertenseurs à mi-dose et d'une statine à dose standard abaisserait en effet la pression artérielle et le LDL-cholestérol à des niveaux rencontrés chez des jeunes de 20 ans, donc propre à réduire le risque cardiovasculaire ultérieur, selon une étude de cross over parue dans PLoS ONE[1].

Le Dr David S Wald, de la Queen Mary University of London, fils du pionnier de la Polypill (et co-auteur de l'étude), le Pr Nicholas J Wald, a mené la première étude randomisée où la Polypill était proposée sur le seul critère de l'âge.

A noter cependant : les personnes recrutées prenaient d'ores et déjà de la simvastatine et au moins un antihypertenseur dans le cadre d'un programme de prévention des maladies cardiovasculaires, un choix de recrutement destiné à favoriser une meilleure adhésion au traitement.

L'objectif était en effet de prouver la véritable efficacité de ce traitement de prévention primaire qui, depuis la première description du principe en 2000, n'aurait pas eu l'opportunité de montrer de quoi il était réellement capable faute d'une adhésion suffisante au traitement ou à cause du type d'essai choisi…

Une version simplifiée de la Polypill, sans aspirine, ni acide folique

Une version un peu remaniée de la Polypill décrite initialement a ainsi été administrée pendant trois mois à 84 personnes âgées de plus de 50 ans, avant ou après la même période sous placebo, de manière à ce que chaque participant constitue son propre contrôle.

La version remaniée n'incluait ni aspirine ni acide folique : l'acide folique parce que les auteurs n'étaient pas certains d'obtenir l'approbation des autorités faute de preuve clinique suffisante sur son efficacité et l'aspirine parce que le risque de saignements, chez des patients sans risque cardiovasculaire connu, n'a pas été jugé acceptable au regard du bénéfice attendu.

Les auteurs soulignent cependant que cette évaluation du rapport bénéfice/risque de l'aspirine pourrait être revu étant données les preuves récentes de son intérêt sur la baisse du risque de cancers.

Une baisse prédite des maladies ischémiques de 72%

En trois mois, la pression artérielle systolique moyenne a été diminuée de 17,0 mmHg (12%) sous Polypill comparée au placebo et la pression diastolique de 9,8 mmHg (11%). Le taux de LDL-cholestérol a, quant à lui, été diminué de 1,4 mmol/L (39%).

Ces baisses correspondent aux baisses prédites par des méta-analyses de 18,4 mmHg, 9,7 mmHg et 1,4 mmol/L respectivement, soulignent les auteurs.

Sur la base de ces résultats, les auteurs estiment la baisse prédite d'événements cardiaques ischémiques de 72% et d'accidents vasculaires cérébraux de 64%.

« Si les gens prenaient la Polypill à partir de 50 ans, environ 28% éviteraient ou repousseraient la survenue d'un infarctus ou d'un AVC au cours de leur vie. En moyenne, ceux qui en tirent bénéfice gagneraient onze ans de vie sans infarctus ou AVC », estiment les auteurs dans un communiqué de l'université londonienne.

Le Pr Nicholas Wald souligne ainsi que « même si seulement 50% des gens de 50 ans et plus prenaient la Polypill, environ 94 000 infarctus et AVC seraient évités chaque année au Royaume-Uni ».

 
Même si seulement 50% des gens de 50 ans et plus prenaient la Polypill, environ 94 000 infarctus et AVC seraient évités chaque année au Royaume-Uni — Pr Nicholas Wald (Londres)
 

Pas trop d'effets secondaires…chez des patients déjà exposés

Si l'étude n'était pas destinée à évaluer la tolérance du traitement, les questionnaires recueillis confirment davantage d'effets secondaires sous Polypill que placebo.

Sous statine, la prévalence des myalgies était importante mais celles-ci n'ont pas, pour autant, conduit les participants à arrêter le traitement, soulignent les auteurs.

L'adhésion était plus importante que dans les précédentes études, avec 98% des patients qui ont pris plus de 85% de leur traitement.

Les auteurs admettent cependant que ni le taux d'adhésion ni la tolérance ne sont extrapolables à la population générale dans la mesure où les personnes incluses participaient, avant leur inclusion, à un programme de prévention et avaient été exposées au préalable à la simvastatine et à un antihypertenseur.

Rendre disponible la Polypill, une urgence pour Wald & co

Dans PLoS ONE, les investigateurs concluent sobrement « que cette Polypill, conçue principalement pour de la prévention primaire, a un potentiel considérable pour la prévention des maladies cardiovasculaires ».

 
La Polypill devrait être mise à la disposition de tous de manière urgente — Pr David Taylor (Londres)
 

Ce qui n'est pas le cas dans le communiqué presse de la Queen Mary University of London où ils n'y vont par quatre chemins : le Pr David Taylor, de l'University College London, y estime ainsi que « la Polypill devrait être mise à la disposition de tous de manière urgente ». Tandis que le Pr Nicholas Wald, lui, conclut : « Nous avons maintenant besoin d'un soutien publique, professionnel et réglementaire pour rendre la Polypill disponible sans délai ; le bénéfice net est trop important pour être ignoré -». Y compris pour qui en détient les brevets !

Nicholas Wald détient les brevets européens et canadiens d'une polypill de prévention cardiovasculaire et, avec son fils David Wald, a donc des intérêts à la développer.

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