Acouphènes accessibles à la thérapie cognitivo-comportementale
Publié dans le Lancet, une étude sur près de 500 patients montre pour la première fois l'efficacité d'une prise en charge cognitivo-comportementale sur la sévérité des acouphènes et la qualité de vie. 31 mai 2012Maastricht, Pays-Bas - Une étude randomisée parue dans le Lancet apporte, pour la première fois, des éléments de preuve tangibles en faveur de la thérapie cognitivo-comportementale, associée aux soins standards (thérapie de ré-entrainement par le son) par rapport aux soins standards seuls. Les effets se font sentir tant sur la qualité de vie des patients que sur la sévérité et le handicap générés par les acouphènes [1].
1 adulte sur 5 souffre d'acouphènes au cours de sa vie
Un résultat important lorsque l'on considère que « 16 à 21 % des adultes développent ces troubles auditifs à un moment ou à un autre de leur vie et que l'absence de traitement curatif conduit à des prises en charge prolongées et coûteuses » comme l'indiquent Rilana Cima et Johan Vlaeyen de l'Université Maastricht (Pays-Bas), les auteurs de l'étude, avec leurs collègues belges et britanniques.
Aujourd'hui, différentes techniques s'offrent au patient souffrant d'acouphènes sans qu'aucune n'ait véritablement fait ses preuves, ce qui revient souvent à dire au patient d'apprendre à vivre avec ce sifflement désagréable et handicapant, expliquent les chercheurs. Il existe principalement 2 approches thérapeutiques, les thérapies basées sur le son - qui consistent en des stratégies de masquage du bruit de l'acouphène - associées à des conseils. Néanmoins, les preuves de l'efficacité de cette technique consistant à contrecarrer le son désagréable sont peu nombreuses et résultent la plupart du temps d'essais non contrôlés et rétrospectifs. L'autre approche consiste en une thérapie cognitivo-comportementale (TCC) visant à adapter, à modifier ses comportements. Mais là encore, des études contrôlées et de grande ampleur manquent pour établir son efficacité à, non pas guérir, mais soulager les patients, considèrent les chercheurs. D'où l'essai qu'ils ont mis au point, portant sur 492 patients adultes suivis pendant 1 an.
Qualité de vie améliorée, sévérité des acouphènes réduite
Les patients ont été dispatchés en 4 groupes selon la sévérité de leurs acouphènes puis en 2 groupes selon la thérapie proposée.
Un groupe de 247 s'est vu proposé des soins standards comprenant :un diagnostic audiologique, des conseils, une thérapie de réentrainement basée sur le son et, si indiqués, une prothèse auditive et/ou un dispositif « masker » qui génère un son neutre pour distraire des acouphènes.
L'autre groupe de 245 patients recevait, en plus de ces soins standards, la TCC comprenant différentes approches (dont la relaxation) d'intensité graduée selon la sévérité des acouphènes. Les séquences de soins duraient 12 semaines.
A 8 et 12 mois après randomisation, les patients du groupe « TCC » présentent une amélioration supérieure en matière de qualité de vie par rapport aux patients du groupe soins habituels. Quant à la sévérité et au handicap liés aux acouphènes, ils sont réduits aux trois périodes de contrôle, soit à 3, 8 et 12 mois chez les patients du groupe TTC, avec une différence entre les 2 groupes qui tend s'amplifier entre le début et la fin de l'étude. A 12 mois, la différence de sévérité des acouphènes et le handicap associé était de 0,43 et de 0,45 respectivement (p<000,1 dans les 2 cas) en faveur du groupe TTC.
Des résultats applicables en pratique clinique
Au final, les auteurs concluent à l'efficacité de la TCC combinée aux soins standards, quel que soit le degré de sévérité des acouphènes et ce, sans effets indésirables. A noter, le taux de « perdus de vue » est relativement élevé mais du même ordre pour les soins standards (35%) et pour la TCC (30%), et ne serait pas, semble-t-il, lié au contenu de la thérapie, indiquent les auteurs.
Dans un commentaire accompagnant l'article, Berthold Langguth, un spécialiste des acouphènes de l'université de Regensburg en Allemagne, mentionne que ces résultats ne sont pas seulement probants mais sont applicables en pratique clinique.
L'étude a été financée par l'Organisation néerlandaise pour la rcherche et le développement en santé (ZonMW). Les auteurs n'ont pas rapporté de liens d'intérêt. Le Dr Langguth a, quant à lui, reçu des honoraires et des dédommagements financiers pour son activité de consultant et d'intervenant auprès d'AstraZeneca, Merz, Novartis, Servier, Pfizer, ANM, and Magventure; des équipements de recherche d'AstraZeneca, Cerbomed, Magventure, the American Tinnitus Association, the German Research Foundation, et the Tinnitus Research Initiative. |
Citer cet article: Acouphènes : un essai randomisé de bonne facture prouve l'intérêt de la thérapie cognitivo-comportementale - Medscape - 1er juin 2012.
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