Comment prévenir les fractures en EHPAD ?

Dr Isabelle Catala

Auteurs et déclarations

25 avril 2012

Pour évaluer le risque de chute, l'examen gériatrique prime.

Fragilité, morphologie du rachis, risque de chute, sarcopénie : des notions à prendre en compte chez les plus âgés. D'où l'importance de l'examen clinique.
25 avril 2012

Montpellier, France — « Nous ne sommes pas tous égaux devant l'âge, certains d'entre nous deviendront des personnes âgées fragiles, d'autres moins », analyse le Pr Yves Rolland (Toulouse) à l'occasion d'une session sur la prise en charge de l'ostéoporose au cours du 10e congrès national Gérosanté-Cippeg[1].

Les personnes âgées fragiles présentent un risque majoré de chutes et de fractures dont les conséquences seront généralement plus graves du fait des co-morbidités associées. Elles présentent, en outre, des facteurs précipitants de chute et d'aggravation d'un état pré-existant en raison de leur état de santé intrinsèque (diabète, troubles neurologiques, mauvais équilibre, peur de tomber…).

L'examen clinique de ces patients doit prendre en compte différentes notions (personne âgée fragile, examen du rachis, fracture sévère, risque de chute, évaluation de la sarcopénie) et s'accompagner d'examens para-cliniques afin de minimiser leur risque de chute, de dépendance, voire de décès.

La notion de personnes âgée fragile

Depuis 2001, des critères de fragilité ont été proposés. Au nombre de 5, ils permettent de définir la fragilité lorsque le score est supérieur ou égal à 3 (entre 1 et 2, on parle de pré-fragilité).

Critères de fragilité

Perte de poids supérieure à 5 % par an ;

Fatigue subjective : épuisement ou fatigue permanente ou fréquente ;

Activité physique : aucune activité physique ou moins de 1 à 2 marches par semaine ;

Vitesse de marche : difficulté à marcher 100 mètres ;

Force « grip strength » appréciée par le médecin en fonction de la mauvaise capacité à serrer la main.


En moyenne, à 5 ans, le risque de chute est majoré de 40 % chez les personnes fragiles, celui de fracture de hanche aussi, celui de fractures non vertébrales de 25 % et celui de décès de 82 %.

Il faut dire que l'incidence de l'ostéoporose est plus élevée chez les personnes fragiles : ainsi une étude a montré qu'en EHPAD, 15 % environ des résidents sont diagnostiqués et qu'un quart de ceux-là ne sont pas traités. Quand on ajoute à ces chiffres, la faible utilisation des examens de diagnostic et un taux important de traitement sous optimal (38 % sous calcium et vitamine D seulement), on comprend que l'incidence des fractures reste élevée chez les plus fragiles. 

Parmi les arguments avancés par les professionnels de santé pour ne pas diagnostiquer et traiter l'ostéoporose, on relève : l'espérance de vie courte, la mauvaise observance, la polymédication habituelle, les co-morbidités et la complexité de l'approche diagnostique actuelle. « On en arrive à un paradoxe : plus on est âgé, fragile et à risque de chute, moins a accès au diagnostic et au traitement de l'ostéoporose. Et pourtant, plus on pourrait bénéficier de ce traitement », explique le Pr Rolland.

Fractures sévères

Parmi les notions épidémiologiques identifiées au cours des dernières années, celle des fractures sévères qui permet d'identifier les sujets les plus à risque est passée au premier plan. Il est désormais acquis que toutes les fractures ne font pas courir le même risque de récidive ou de nouvelles fractures, voire de décès, dans les mois qui viennent.

Certaines sont considérées maintenant comme des fractures « sévères » : extrémité supérieure du fémur, pelvis, vertèbre, tibia proximal, extrémité supérieure de l'humérus, fémur distal et fracture de trois cotes simultanément.

Il convient aussi d'y associer le risque individuel de fracture qui dépend de l'existence de fractures antérieures (le risque augmente particulièrement dans les 2 à 3 ans qui suivent la chute mais il persiste pendant 15 ans), de l'âge et de la densité minérale osseuse (DMO). « La fracture appelle la fracture », analyse le Dr Jean-Bernard Gauvain (Orléans) [2].

Risque de chute

L'examen de la personne âgée doit aussi prendre en compte le risque de chutes. « La chute appelle en effet la chute », explique le Dr Gauvain.

Il convient donc de prendre en compte l'existence éventuelle d'une chute au cours de l'année précédente et, en l'absence de chutes, d'en évaluer le risque par des tests simples : lever du fauteuil et marche, appui unipodal et poussée sternale. L'évaluation du risque de fracture et du risque de chute permet de mettre en place des mesures qui permettront d'éviter - tant que faire se peut - ces risques en mettant en place des mesures préventives voire des traitements [3].

Le coût de la sarcopénie aussi élevé que celui de l'ostéoporose

Une fois l'examen clinique, l'évaluation du risque de chute et de fracture et les examens para-cliniques effectués, une prise en charge globale doit être proposée. Les performances fonctionnelles et l'activité physique doivent être renforcées afin d'arriver à se lever d'une chaise sans aide, à tenir en équilibre sans peur de tomber, à monter les escaliers, à marcher 5 minutes dehors, à s'habiller et à utiliser les transports en commun. La perte des performances musculaires coûte aussi cher à la société que l'ostéoporose (18,5 milliards de dollars annuels pour la sarcopénie contre 16,3 milliards pour l'ostéoporose). Différents traitements ont été proposés pour la sarcopénie : testostérone (SARMs), créatine, bicarbonate, statines, hormone de croissance, oestrogènes, inhibiteurs de cytokines (IL-6), inhibiteurs de myostatine, antagonistes du récepteur 4 de la mélanocortine, ghréline synthétique.

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