Nice, France — « Bien que les dyslipidémies importantes soient rares chez les diabétiques, il est important de traiter de façon préventive les formes qui peuvent paraître peu graves, en raison du risque athérogène particulièrement important chez les diabétiques de type 2 » a expliqué le Dr Michel Farnier (Dijon) en préambule de la session sur les dyslipidémies du diabète de type 2 à l'occasion du Congrès de la Société Francophone du Diabète 2012[1].
Les diabétique de type 2 ont un profil athérogène lié en partie au déséquilibre des leurs différents composants lipidiques : ils possèdent des LDL petits et denses qui ont tendance à se déposer sur les parois vasculaires, leur taux de triglycérides est élevé (ainsi que les non HDL-C ou apoB) et leur HDL cholestérol est abaissé. Le traitement anti-lipidique proposé chez ces patients a un double but : la prévention cardio-vasculaire et la protection de la cellule bêta.
Baisse de 1 mmol/l de LDL-C = baisse de 9 % de la mortalité
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Dr Michel Farnier |
Restaurer des taux physiologiques de HDL et LDL cholestérol permet aussi un effet direct sur la cellule bêta puisque ces composants sont indispensables à sa survie en limitant l'accumulation de cholestérol dans les cellules, le stress oxydatif et l'inflammation des îlots, ce qui permet de réduire le risque d'apoptose cellulaire. Mais le risque vasculaire résiduel reste important chez les diabétiques de type 2, même lorsqu'ils sont traités.
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Risque de diabète majoré de 45 % pour les femmes
« La littérature récente a aussi conduit à s'interroger sur l'effet des statines sur l'équilibre glycémique puisque des études (PROVE-IT ou JUPITER) ont montré qu'en dehors de tous signes d'intolérance au glucose, certaines personnes développent un diabète sous traitement par statines.
Dans un premier temps, ces résultats sont passés relativement inaperçus. Mais une méta-analyse de ces travaux confirme une majoration de 9 % du risque de diabète. Plus grave encore, il semblerait que dans les sous-populations de femmes ménopausées, cette augmentation du risque puisse atteindre près de 50 %.
Pour le Dr Farnier, « ces résultats incitent à la prudence, il pourrait exister des différences entre les statines (risque plus important avec la rosuvastatine et l'atorvastatine qu'avec la pravastatine) et cet effet ne serait pas un effet-classe. Et l'augmentation du risque serait corrélée aux doses utilisées et à l'existence de certains facteurs préexistants (intolérance au glucose, IMC, hypertension et existence d'une hypertriglycéridémie de jeun). Cet effet pourrait être lié à une majoration de l'insulino-résistance ou à une action directe sur la cellule bêta ou les adipocytes. »
Intensifier le traitement
« Pour autant, il n'est pas possible à l'heure actuelle de se passer des statines pour les diabétiques. Et certains ont même besoin d'une intensification de traitement en raison d'un risque cardio-vasculaire résiduel sous statines : ceux qui sont traités en prévention secondaire, les diabétiques de type 2 qui présentent une insuffisance rénale modérée à sévère, et ceux qui souffrent d'anomalies des triglycérides ou du HDL cholestérol », poursuit le Dr Farnier.
En ce qui concerne les associations thérapeutiques à envisager, statines et résines permettent une diminution de 12 à 15 % du LDL-C et de 0,5 % de l'HbA1c. Mais le taux de triglycérides tend à augmenter. Par ailleurs, il existe peu de données cliniques concernant cette association sur la prévention cardio-vasculaire et son emploi est délicat en raison d'un nombre important de prises et d'une tolérance imparfaite.
Statines et ézétimibe permettent une diminution de 20 à 30 % du LDL-C et un effet favorable sur l'ensemble des lipoprotéines athérogènes. La tolérance est bonne et aucun effet délétère de l'ézétimibe sur la fonction rénale n'a été signalé. Mais il n'existe qu'un nombre limité de données sur l'homéostasie du glucose avec l'association ézétimibe/statines, et sur l'effet en termes de prévention cardio-vasculaire chez le diabétique.
Quant à l'association statines et fénofibrates, elle est dotée d'effets biologiques reconnus (baisse des triglycérides, petite hausse du HLD-C et baisse des LDL petits et denses), d'un bénéfice sur les atteintes microvasculaires et d'une bonne tolérance clinique. Mais il n'existe que des données limitées sur la prévention cardio-vasculaire chez le diabétique et sur l'effet de ce traitement sur l'homéostasie du glucose.
Enfin, statines et niacine. Là encore, cette association est dotée d'effet biologiques reconnus (baisse du LDL-C, des triglycérides, augmentation du HDL-C, diminution de la lipoprotéine a), d'effets sur l'athérosclérose clinique. Mais sa tolérance clinique est imparfaite et l'on ne connaît pas ses effets sur le métabolisme du glucose.
Le Dr Farnier déclare avoir reçu des financements de recherche médicale ou d'activités éducatives sous forme de subvention et avoir prodigué des prestations de conseils payantes sous forme de travail rémunéré ou d'honoraires d'expert conseil de / pour : AstraZeneca, Genzyme, Kowa, Merck and Co, Merck-Schering-Plough, Novartis, Pfizer, Recordati, Sanofi-Aventis, Solvay, SMB et Takeda. |
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Citer cet article: Dyslipidémie du diabétique : impossible de se passer des statines - Medscape - 23 avr 2012.
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