Arrêt cardiaque ressuscité : comment améliorer la survie ?

Dr Jean-Luc Breda

Auteurs et déclarations

19 mars 2012

Réanimation pré-hospitalière après arrêt cardiaque récupéré

Moins d'un arrêt cardiaque initialement récupéré sur dix survivra à cet épisode. La prise en charge de tels accidents doit dont être améliorée, dès la phase pré-hospitalière !
19 mars 2012

Bordeaux, France — En France, environ 50 000 personnes décèdent chaque année d'un arrêt cardiaque. Bien que ces accidents surviennent majoritairement en présence de témoins, moins de 30 % bénéficient de manœuvres de ressuscitation appropriés, et seuls 21 % arrivent « en vie » à l'hôpital. Mais au final le nombre de survivants ne dépasse guère 2 à 3 %. Une énorme marge de progression existe donc, par une meilleure formation du public d'une part, mais aussi pour les urgentistes par une meilleure prise en charge de la phase post arrêt cardiaque.

Le Pr Pierre-Yves Gueugniaud (CHU de Lyon) a rappelé les dernières recommandations en ce domaine lors des 20es Journées annuelles du Collège Aquitain de Médecine d'urgence[1].

L'objectif des équipes médicales arrivées sur les lieux de l'accident et de celles qui prendront le relai lors des premières heures suivant l'admission est simple : limiter tant que faire se peut la souffrance des tissus nobles et maintenir le fonctionnement normal des différents organes avec trois priorités :

  • Limiter les lésions cérébrales post-AC liées à l'hypoperfusion encéphalique plus ou moins prolongée et à l'œdème secondaire ;

  • Éviter la dysfonction myocardique secondaire à l'hypoxie et qui peut réaliser un véritable syndrome coronarien avec hypokinésie et défaillance hémodynamique ;

  • Prévenir le syndrome d'ischémie — reperfusion comprenant les troubles de l'oxygénation tissulaire, des anomalies de la vaso-régulation et de la coagulation.

Et, bien entendu, le traitement de la cause de l'ACR devra être entrepris parallèlement à la prise en charge de ces complications (accident neurologique, toxique, septique, hypovolémie, etc…)

Trop d'oxygène tue !

Sur un plan pratique, le cahier des charges des équipes médicales est bien codifié, avec des objectifs cibles clairement définis :

  • Contrôler la ventilation et optimiser l'oxygénation en visant la normocapnie et une saturation en oxygène entre 94 et 98 %. « Il est très important d'éviter l'hyperoxie », insiste le Pr Gueugniaud, qui selon les dernières études publiées est aussi nocive en terme de mortalité que l'hypoxie (même si cette dernière est dans ces circonstances beaucoup plus fréquente). Une saturation à 98 % est la valeur plafond à ne jamais dépasser ! »

  • Contrôler l'hémodynamique (FC, PA…) avec pour objectif essentiel de corriger l'hypoperfusion de tous les tissus : les patients ressuscités d'un ACR ont un risque de décès multiplié par un facteur proche de 3 si leur PA systolique n'est pas maintenue au-dessus de 90 mm Hg. Pour autant, il ne faut pas soumettre le cœur en souffrance à une charge de travail excessive. L'objectif recommandé est une PA moyenne comprise entre 65 et 90 mm Hg. Pour maintenir cette valeur, il ne faut pas hésiter à ajuster les doses de vasoconstricteurs et d'inotropes, tout en optimisant la précharge (pression de l'oreillette droite maintenue entre 8 et 13 mm Hg si on dispose d'un monitoring hémodynamique).

  • Protéger coronaires et cerveau est également une nécessité absolue. En l'absence de réveil moins de 5 minutes après reprise d'une activité cardiaque spontanée (RACS), une sédation est recommandée pour limiter au maximum les besoins en oxygène des tissus en souffrance. L'association morphinique + hypnotiques (sufentanyl et hypnovel) est désormais classique et pratiquée en routine.

Hypothermie dès que possible pour tout AC
  • Longtemps réservée aux cas de FV et de TV, l'hypothermie thérapeutique modérée (32° à 34°) est désormais recommandée dans tous les types d'ACR puisqu'elle permet de multiplier par trois les chances de survie. Seule exception : elle semble inefficace quand employée avec une association vasopressine + adrénaline dans l'AC extrahospitalier. Différentes techniques ont été utilisées pour obtenir un refroidissement interne (remplissage glacé) ou le plus souvent externe (céphalique ou corps entier par exposition à un flux d'air refroidi par glace). Son utilisation en extrahospitalier, souhaitable pour réduire le temps de souffrance critique des organes, est réalisable par perfusion de poches glacées (2 litres de sérum physiologique à 4 degrés en 30 minutes).

  • Parmi les autres mesures d'optimisation de la réanimation post-ressuscitation, un contrôle strict de la glycémie (en dessous de 10 mmoles/l) et de l'hémoglobine (supérieure à 9-10 g/l) semblent permettre une amélioration (très modeste) du pronostic.

Enfin, parallèlement à ces mesures, la recherche d'une cause identifiable à l'AC repose sur l'examen clinique, la pratique dès que possible d'examens ECG et échocardiographique, et souvent d'une coronarographie en urgence : le syndrome coronarien aigu demeure la première cause d'ACR, et dans ces cas, la revascularisation la plus précoce possible reste le meilleur gage de survie !

5 priorités pour optimiser la prise en charge après ACR ressuscité
  1. SaO2 94-98 % et normocapnie

  2. PAM entre 65 et 90 mm Hg

  3. Hypothermie 32-34° C

  4. Hémoglobine 9-10 g/l

  5. Glycémie < 10 mmoles/l


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