Un questionnaire simple de dépistage précoce de la BPCO, H. Guénard
Le Pr. Guénard revient sur l'importance du dépistage précoce de la broncho-pneumopathie chronique obstructive. Il propose un court questionnaire à afficher en salle d'attente. 9 novembre 2011Point de vue du Pr. Hervé Guénard
Medscape France a demandé au Pr. Hervé Guénard, ancien chef de service des explorations fonctionnelles respiratoires au CHU de Bordeaux, son point de vue sur le rôle que peuvent jouer les généralistes pour lutter contre la broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO).
Medscape France : quelle est l'ampleur de ce problème de santé publique ?
Pr. H.G. : Le problème de la broncho-pneumopathie chronique obstructive est énorme et grandissant. Une récente étude publiée dans le Lancet sur l'incidence de la BPCO au Canada dans l'Ontario est très intéressante parce qu'elle montre bien que la BPCO touche plus d'une personne sur quatre au cours de sa vie, principalement à cause du tabagisme [1]. La BPCO se place au rang du diabète comme maladie émergeante. Le problème est que contrairement au diabète, la maladie est banalisée. Les patients vivent avec leur maladie, leur essoufflement, jusqu'à ce qu'ils soient hospitalisés lors d'une poussée infectieuse. La maladie est alors diagnostiquée mais il est trop tard pour la freiner.
Pourquoi faut-il dépister précocement ?
Il faut dépister tôt, parce qu'il est possible de freiner la maladie même s'il est impossible de l'arrêter. Les poumons des fumeurs ou des anciens fumeurs s'altèrent plus rapidement que ceux des non-fumeurs mais un arrêt à 40 ans permet de ralentir l'évolution de la dégradation. Le sevrage tabagique à 40 ans peut offrir un gain de 20 ans de confort, ce qui n'est pas négligeable.
Comment le médecin généraliste peut-il contribuer à lutter contre cette grave maladie chronique?
Il est important que le médecin généraliste s'accroche au dépistage de la BPCO. Une stratégie peut être proposée pour y arriver. Il s'agit d'avoir un questionnaire en cinq questions en tête ou même affiché dans la salle d'attente, ce qui est peu chronophage. Les questions sont les suivantes :
Avez-vous fumé ou fumez-vous ?
Toussez-vous fréquemment ?
Crachez-vous fréquemment ?
Lorsque vous pratiquez une activité donnée, êtes-vous plus essoufflé(e) que les gens de votre âge ?
Avez-vous plus de 40 ans ?
Si le patient répond positivement à trois de ces questions, le généraliste peut soit mesurer le souffle du patient à l'aide d'un spiromètre soit orienter le patient vers un confrère pneumologue.
Personnellement, je pense qu'il est aussi important pour un médecin généraliste d'être équipé d'un mini-spiromètre que d'un tensiomètre. Il me semble indispensable qu'il puisse mesurer le souffle des patients qui ont des problèmes respiratoires. L'asthme ou la BPCO touchent quasiment une personne sur deux, il faut donc se donner les moyens de suivre ces maladies respiratoires. Bien sûr, l'achat d'un mini spiromètre est un investissement car un bon appareil coûte autour de 400 euros, mais ces dispositifs ne s'altèrent pas. En Aquitaine, nous disposons d'un réseau qui délivre des mini-spiromètres à des prix négociés et le dépistage d'une BPCO donne droit à une indemnité de 20 euros, ce qui est mieux que rien.
S'il est doté d'un mini spiromètre, le médecin généraliste peut aussi avoir un rôle dans la prise en charge et le suivi des patients Si le rapport VEMS/CVF du patient est autour ou inférieur à 70%, il est nécessaire de pratiquer des examens complémentaires même si la personne est âgée. En fonction du stade de dégradation ou d'obstruction, des bronchodilatateurs de courte durée d'action « à la demande » seront prescrits dans un premier temps puis ce sera les bronchodilatateurs à longue durée d'action et la réhabilitation auxquels des corticoïdes pourront être associés en cas d'exacerbations. Lorsque la maladie est très sévère, le patient aura recours à l'oxygénothérapie ou à la ventilation non invasive, voire même à la chirurgie dans des cas particuliers (voir les directives GOLD pour Global initiative for chronic Obstructive Lung Disease).
Les médecins généralistes qui souhaitent se préoccuper de cette question ont tout intérêt à entrer en contact avec un réseau de réhabilitation respiratoire (liste des réseaux en France).
Enfin, la cause essentielle de la BPCO est le tabac et, là encore, les conseils du médecin généraliste sont très importants car il est le médecin le plus écouté des patients.
Le Pr. Hervé Guénard a déclaré ne pas avoir de liens d'intérêts en rapport avec ce sujet. |
Citer cet article: 5 questions pour dépister une BPCO précoce, Pr. Hervé Guénard - Medscape - 9 nov 2011.
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