L'alerte des anesthésistes sur la pénurie en médicaments entendue

Stéphanie Lavaud

Auteurs et déclarations

24 août 2011

Réponse du gouvernement à la pénurie en médicaments essentiels

Le directeur de l'Afssaps recevra dans les prochains jours la Société Française d'Anesthésie et de Réanimation qui a fait part de ses inquiétudes sur la pénurie de médicaments dans cette spécialité.
24 août 2011

Paris, France - Dominique Maraninchi, le Directeur Général de l'Afssaps, recevra dans les prochains jours la SFAR (Société Française d'Anesthésie et de Réanimation) qui a fait part de ses inquiétudes sur la pénurie de médicaments dans cette spécialité, a indiqué le ministère de Santédans un communiqué[1].

Dans ce texte, Xavier Bertrand, le Ministre du Travail, de l'Emploi et de la Santé et Nora Berra, la Secrétaire d'Etat chargée de la Santé, rappellent que les difficultés d'approvisionnement constatées sur certains médicaments sont « une préoccupation première pour le Ministère de la Santé et qu'il n'est pas question que les patients rencontrent les moindres difficultés d'accès à leurs produits de santé ».

« Pour s'assurer que chaque patient a un accès facile et pérenne à son traitement, il faut que chaque étape de la chaîne du médicament soit optimale : tous les acteurs doivent assumer leurs responsabilités et respecter leurs obligations », ajoutent-ils. Une réunion se tiendra donc dès la rentrée avec l'ensemble des parties prenantes avec un seul objectif : que tout patient puisse avoir accès sans difficultés à son traitement.

Pénurie voire disparaition de médicaments essentiels

Pour mémoire, les anesthésistes s'inquiètent, depuis quelques temps déjà, de la pénurie, voire la disparition pure et simple de certains médicaments essentiels. Qu'elles soient temporaires ou fassent suite à la décision des laboratoires de cesser la fabrication, « les ruptures de stocks des médicaments d'anesthésie/réanimation sont récurrentes depuis plusieurs années » écrit la Société Française d'Anesthésie-Réanimation (SFAR) dans son communiqué daté du 18 août [2]. Au point que « nous en venons à nous demander si nous pourrons continuer d'assurer la prise en charge des patients. Si l'on ne trouve pas de solution, le risque existe que l'on ne puisse plus réaliser d'anesthésie dans le cadre d'actes chirurgicaux ou diagnostiques » affirme son président, le Dr Laurent Jouffroy.

Sont concernés : les médicaments utilisés par les anesthésistes-réanimateurs pour réaliser des anesthésies locales, locorégionales, péridurales (dont les péridurales obstétricales), des anesthésies générales, mais aussi la gestion de la douleur, notamment dans le cadre des soins d'urgence. Comme par exemple, le thiopental -un hypnotique qui a cessé d'être commercialisé par le laboratoire américain qui approvisionnait les établissements hospitaliers français-, mais aussi la lidocaïne adrénalinée -un anesthésique local- ou encore la néosynéphrine -couramment utilisé pour traiter l'hypertension artérielle [3].

Pas assez rentables

Comment expliquer ces pénuries ? Essentiellement par des raisons économiques. « Souvent anciens, ces produits sûrs, aux effets documentés et au rapport bénéficerisque éprouvé ont pour point commun d'avoir un coût très faible, comme la plupart des médicaments utilisés quotidiennement en anesthésie-réanimation, et d'être tombés dans le domaine public, c'est à-dire d'être produits par des fabricants de génériques » considère la SFAR. En un mot : pas assez rentables pour les firmes pharmaceutiques (bien que peu coûteux pour la collectivité).

Pénurie à l'échelle mondiale

Les anesthésiques ne sont pas la seule classe de médicaments touchés par la pénurie, ni la France, l'unique pays à connaître des problèmes d'approvisionnement en médicaments. Si, chez nous, les associations de lutte contre le sida ont été les premières à alerter sur la disponibilité des antirétroviraux [4]], les américains, pour leur part, s'inquiètent très régulièrement de pénuries concernant les traitements anti-cancéreux, altérant la qualité des soins aux patients. Et le phénomène semble de plus en plus fréquent. Selon la FDA, le nombre de ruptures de stocks aurait presque triplé entre 2005 et 2010, passant de 61 à 178 [5]]. Dans l'hexagone, au premier trimestre 2011, on compte plus d'une trentaine d'alertes de rupture ou risques de rupture de stock émanant de l'Afssaps, contre seulement 4 au premier semestre 2010 [6]]. En cause, outre le faible coût des ces produits, l'approvisionnement en matières premières, qui à l'instar d'autres secteurs mondialisés, se fait désormais majoritairement dans les pays émergents (comme la Chine ou l'Inde), créant une dépendance des pays industrialisés vis-à-vis de ces sites de production, mais aussi des problèmes de traçabilité et/ou de perte de qualité (cf le problème rencontré en 2008 avec les héparines d'origine chinoise [7]]). La situation, relativement préoccupante, a d'ailleurs fait l'objet d'une séance de l'Académie nationale de pharmacie au printemps dernier [8].


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