Taux bas de cholestérol et risque CV dans la polyarthrite rhumatoïde
Selon un travail portant sur plus de 600 patients atteints de polyarthrite rhumatoïde, il existe un paradoxe lipidique dans cette maladie avec plus d'accidents vasculaires en cas de cholestérol total bas.Myasoedova E, Crowson CS, Kremers HM, et al. Lipid Paradox in Rheumatoid Arthritis: The Impact of Serum Lipid Measures and Systemic Inflammation on the Risk of Cardiovascular Disease. Ann Rheum Dis. 2011;70:482-487.
25 avril 2011Introduction
Les maladies cardiovasculaires sont la principale cause de morbi-mortalité chez les patients atteints de polyarthrite rhumatoïde (PR) [1] [2], Cependant, en cas de PR, le rapport entre les lipides et le risque de maladies cardiovasculaires est plus complexe que dans le reste de la population. Par conséquent, des taux élevés de cholestérol total (C-T), de cholestérol LDL et de triglycérides (TG), ou des taux bas de cholestérol HDL n'ont, semble-t-il, pas les mêmes significations.
Myasoedova et coll. ont analysé le lien entre les lipides et les mesures de l'inflammation systémique dans le cadre d'une étude prospective et rétrospective (The Rochester Epidemiology Project) des dossiers médicaux de patients vivant dans le comté d'Olmsted, dans le Minnesota.
Résumé de l'étude
Les investigateurs ont analysé les dossiers médicaux de 651 patients atteints de PR entre 1998 et 2007, et qui ont bénéficié d'un suivi moyen de 7,8 ans. L'âge médian d'apparition de la maladie était de 56 ans ; 69 % des patients étaient des femmes et 62 % étaient porteurs du facteur rhumatoïde.
L'étude s'est intéressée aux liens entre les taux de lipides (C-T, LDL, HDL et TG), les marqueurs de l'inflammation (VS et CRP) et les accidents liés aux maladies cardiovasculaires (cardiopathies ischémiques incluant angor, infarctus du myocarde, interventions de revascularisation) et/ou insuffisance cardiaque.
Durant le suivi, 62 patients ont fait un accident ischémique et 56 patients ont développé une insuffisance cardiaque.
D'après les chercheurs, un taux bas de C-T était associé à une augmentation du risque d'accidents cardiovasculaires, avec un triplement du risque d'accidents lorsque ce taux était inférieur à 155 mg/dL. Ils notent une tendance qui reste non significative, entre les valeurs les plus basses de LDL et un risque accru de maladies cardiovasculaires. Cependant, un taux de LDL > 77 mg/dL n'était pas associé à un risque accru d'accidents liés aux maladies cardiovasculaires.
A la différence du cholestérol, des taux élevés de TG étaient eux bien associés à un risque accu d'accidents cardiovasculaires.
Le risque cardiovasculaire était par ailleurs corrélé significativement à la valeur de la VS et tendait vers la significativité pour la valeur de la CRP.
Les auteurs n'ont retenu aucune association entre la prise d'hypolipémiants (y compris les statines) ou le traitement antirhumatismal et le risque de maladies cardiovasculaires, mais l'étude n'avait pas la puissance statistique nécessaire pour en juger.
Ils ont conclu que « l'association entre les lipides sériques et les accidents cardiovasculaires pourrait être différente pour les patients atteints de PR et ceux qui ne le sont pas ». Dans leur discussion, ils suggèrent de mener des études plus précises pour déterminer le lien biologique entre les lipides et le risque de maladies cardiovasculaires dans le contexte de la PR. Ceci, afin déterminer la meilleure approche des dyslipidémies dans le cadre de cette affection.
Point de vue
Compte tenu du risque élevé d'accidents cardiovasculaires chez les patients atteints de PR, nous devons bien sûr identifier et traiter leurs facteurs de risque. Cependant, d'après les résultats présentés dans cette étude, si les cliniciens s'en remettent aux approches courantes qui consistent à mesurer les taux de lipides pour évaluer le risque de maladies cardiovasculaires (pour calculer par ex. le score de risque de Framingham), le véritable risque d'accidents liés aux maladies cardiovasculaires peut être négligé chez les patients atteints de PR.
Par ailleurs, il se peut que les indications d'un traitement hypolipémiant applicables à la population générale, ne conviennent pas aux patients atteints de PR. Comme l'affirment les chercheurs, d'autres études sont nécessaires pour comprendre le lien exact entre la PR, l'inflammation et les lipides, de manière à déterminer le risque de maladies cardiovasculaires. Plus particulièrement, des essais contrôlés randomisés s'imposent pour établir des stratégies thérapeutiques visant la réduction du risque vasculaire dans le contexte de la PR.
Ce point de vue a été originalement publié sur medscape.com le 13 avril 2011. |
Citer cet article: Un taux bas de cholestérol majore t-il le risque cardiovasculaire dans la polyarthrite rhumatoïde ? - Medscape - 25 avr 2011.
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