POINT DE VUE

Le Botox : solution de rechange aux anticholinergiques dans le traitement de la vessie hyperactive ?

Dr David Ginsberg

Auteurs et déclarations

15 février 2011

Botox dans le traitement de la vessie hyperactive

Le Botox est évalué à titre de solution de rechange aux anticholinergiques et traitements non pharmacologiques qui ne sont pas efficaces dans le cas de la vessie hyperactive.
15 février 2011

Dmochowski R, Chapple C, Nitti VW, et coll. Efficacy and Safety of OnabotulinumtoxinA for Idiopathic Overactive Bladder: A Double-Blind, Placebo Controlled, Randomized, Dose Ranging Trial. J Urol. 2010;184:2235-6.

Résumé de l'étude

Diverses solutions thérapeutiques s'offrent aux patients souffrant d'une vessie hyperactive (VH). Citons entre autres les thérapies comportementales et les exercices de renforcement des muscles du plancher pelvien, les traitements pharmacologiques, la neuromodulation (y compris la stimulation du nerf sacré et du nerf tibial postérieur) et la chirurgie (comme l'agrandissement vésical). Les traitements pharmacologiques approuvés par la Food and Drug Administration (FDA) pour le traitement de la VNH appartiennent tous à la classe des anticholinergiques. Malheureusement, leur utilisation est limitée parce qu'ils ne sont pas assez efficaces dans certains cas, ou produisent des effets secondaires (sécheresse de la bouche et constipation) chez les patients n'ayant pas répondu de façon optimale au traitement de première intention.

C'est en 2000 qu'on s'est penché pour la première fois sur l'utilisation de la toxine botulique pour traiter la vessie neurogène chez les patients réfractaires aux anticholinergiques (la première étude portait sur le traitement par association à l'oxybutynine et au trospium).[1] Depuis, les résultats de nombreuses études publiées ont prouvé l'efficacité de cette toxine autant pour traiter la VH neurogène que la VH idiopathique. Mais seules quelques-unes étaient des essais contrôlés avec un placebo, avec répartition aléatoire. Celle de Dmochowski et coll. était un essai de phase 2 visant à évaluer l'efficacité clinique de la toxine botulique de type A (BOTOX, Allergan, Inc, Irvine, CA) chez des patients souffrant d'une VH idiopathique.

Cette étude a consisté à évaluer les résultats obtenus chez 313 patients traités par injections de la toxine botulique de type A dans le détrusor. Pour prendre part à l'étude, les sujets devaient souffrir d'une VH idiopathique symptomatique, d'incontinence urinaire par impériosité (IUI) depuis plus de six mois, avoir en moyenne au moins huit épisodes hebdomadaires d'IUI, avoir en moyenne au moins huit mictions quotidiennes et avoir déjà suivi un traitement par anticholinergiques n'ayant pas été inadéquat (c'est-à-dire insuffisamment efficace ou produisant des effets secondaires intolérables). Voici le mode de répartition:

  • Un placebo a été donné à 43 patients ;

  • 50 U de toxine botulique de type A administrées à 56 patients ;

  • 100 U de toxine botulique de type A administrées à 55 patients ;

  • 150 U de toxine botulique de type A administrées à 50 patients ;

  • 200 U de toxine botulique de type A administrées à 52 patients ; et

  • 300 U de toxine botulique de type A administrées à 55 patients.

L'injection a été effectuée par voie cystoscopique, à l'aide d'une matrice standard épargnant le trigone et le dôme vésical ; la quantité de médicament ayant été répartie uniformément entre 20 points d'injection.

Le principal critère d'évaluation était le nombre des épisodes d'IUI après 12 semaines de traitement. On a noté une amélioration appréciable dans tous les groupes traités, la réduction moyenne par rapport aux valeurs de départ étant respectivement de 7,4, de 20,7, de 18,4, de 23, de 19,6 et de 19,4, chez les sujets ayant reçu le placebo et ceux ayant reçu 50, 100, 150, 200 et 300 U de toxine botulique. Bien qu'une analyse non paramétrique des données ait montré l'existence d'une relation de doses-effet, les chercheurs ont observé que les doses supérieures à 150 U procuraient peu d'effets positifs supplémentaires. L'évaluation des sujets chez qui la réduction des épisodes d'IUI a été de 100 % a révélé une amélioration appréciable par les doses de 100 U. Aucune différence évidente n'a été observée entre les doses variant entre 100 et 300 U. Par ailleurs, les chercheurs ont noté une diminution systématique de la réponse avec les doses de 50 U. Ils ont observé le même phénomène pour ce qui est de la durée des effets obtenus avec des doses de 100 U ou plus (main non pas avec des doses de 50 U) quant à d'autres paramètres du journal des mictions, comme la fréquence des mictions, les envies impérieuses, les nycturies et la quantité éliminée. On a signalé un risque accru de cathétérisme rendu nécessaire par l'augmentation du résidu vésical avec les doses élevées de toxine botulique de type A ; ce risque étant de 0,6 % pour les doses de 50 U, de 6,3 % pour les doses de 100 de 150 U, de 60 % pour les doses de 200 de 300 U.

Point de vue

L'étude de Dmochowski et coll. est importante en ce sens qu'elle est la première de grande envergure, avec répartition aléatoire, contrôlée par placebo, qui visait à identifier le type de VH pour pouvoir le traiter. Bien que toutes les doses de toxine botulique de type A aient été plus efficaces que le placebo, il semble que la dose de 50 U a été celle dont l'efficacité a été de moins longue durée. Par ailleurs, aucun bienfait appréciable n'a semblé être associé à l'administration de doses supérieures à 150 U. Ces résultats conjugués au fait que des doses supérieures à 150 U semble exposer le patient à un risque accru de rétention urinaire, auront incontestablement une incidence sur l'essai de phase 3, qui consistera à évaluer l'utilité de la toxine botulique de type A dans le traitement de la VH idiopathique. Au cours de l'essai de phase 3, les sujets recevront par injection un placebo ou une dose de 100 U et par la suite, si une dose plus élevée s'avère nécessaire, une dose de 150 U. Aucune dose supérieure à 150 U ne sera utilisée.

L'étude de Dmochowski et coll. comporte certaines limites. En autres, elle ne fournit aucune définition précise de la rétention urinaire et n'indique aucunement quand le cathétérisme intermittent propre doit être entrepris et quand il peut être interrompu. Seuls les auteurs connaissent ces détails. Dans les essais ultérieurs, ces détails devront être précisés dans le protocole. Par ailleurs, l'étude de Domochowski et coll. ne permet pas de savoir si le patient pourra tolérer l'administration d'injections pendant une période prolongée. L'efficacité du traitement semble être comparable lorsqu'il est administré par injections répétitives ; mais l'étude précédente comportait des limites parce que les groupes de sujets étaient plus réduits.[2] [3] Pour l'instant, la toxine botulique est utilisée à titre expérimental dans le traitement de la VH. Cependant, cette indication est de plus en plus admise par les assureurs couvrant les risques de VH idiopathique ou de VH neurogène. Elle pourrait devenir moins importante lorsque les essais de phase 3 seront terminés et les résultats seront présentés à la FDA.

Note du rédacteur

L'auteur du présent article est l'un des chercheurs de l'étude présentée plus haut.

Ce point de vue a été originalement publié sur medscape.com le 6 janvier 2011.

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